Lors de son voyage en République Démocratique du Congo, le pape François a dénoncé le pillage des ressources en Afrique :
En parlant de frein au développement et de retour au passé, il est tragique que ces lieux, et plus généralement le continent africain, souffrent encore de diverses formes d’exploitation. Il y a cette devise qui sort de l’inconscient de tant de cultures et de tant de personnes : “L’Afrique doit être exploitée”, cela est terrible ! Après le colonialisme politique, un “colonialisme économique” tout aussi asservissant s’est déchainé. Ce pays, largement pillé, ne parvient donc pas à profiter suffisamment de ses immenses ressources : on en est arrivé au paradoxe que les fruits de sa terre le rendent “étranger” à ses habitants. Le poison de la cupidité a ensanglanté ses diamants. C’est un drame devant lequel le monde économiquement plus avancé ferme souvent les yeux, les oreilles et la bouche. Mais ce pays et ce continent méritent d’être respectés et écoutés, ils méritent espace et attention : Retirez vos mains de la République Démocratique du Congo, retirez vos mains de l’Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter ni une terre à dévaliser. Que l’Afrique soit protagoniste de son destin ! Que le monde se souvienne des désastres commis au cours des siècles au détriment des populations locales et qu’il n’oublie pas ce pays ni ce continent. Que l’Afrique, sourire et espérance du monde, compte davantage : qu’on en parle davantage, qu’elle ait plus de poids et de représentation parmi les nations !
Or, présenté hier en conseil des ministres, le projet de loi “immigration et intégration” du ministre de l’Intérieur prévoit notamment la création d’une carte de séjour spécifique pour les métiers en tension, au premier rang desquels ceux de la santé. Cette mesure permettra aux médecins étrangers de bénéficier plus facilement d’une carte de séjour. Une mesure qui risque de priver certains pays, en particulier ceux d’Afrique, de leurs propres soignants. Rony Brauman, cofondateur de Médecins sans frontières, dénonce :
“Au lieu de régler les problèmes de fond, on se tourne vers ce réservoir potentiel en aggravant les pénuries structurelles dont souffre le continent”.
Le nombre de visas accordés aux jeunes Africains en formation a bondi de 32,5% pour la rentrée 2020-2021, ceux d’Afrique subsaharienne de 41% sur cinq ans. Et, d’après les chiffres provisoires, la hausse s’annonce encore plus forte en 2022.
Mohamed Yousfi, président du Syndicat algérien des praticiens spécialistes de santé publique, souligne :
“Ce que fait la France pour régler le problème de ses déserts médicaux n’arrange ni l’Algérie ni aucun pays pourvoyeur”. “Si l’on ne fait rien, cette tendance va s’accélérer, comme pour le Maroc ou la Tunisie.”
Déjà, en 2021, l’Ordre des médecins tunisien a enregistré 970 départs, contre 500 à 600 habituellement.
Par ailleurs, il est douteux que le projet de loi immigration présenté par Gérald Darmanin parvienne à inverser la tendance. Au lieu de prendre des mesures « à la danoise », ce projet de loi poursuit la politique du « en même temps » en compensant l’annonce de plus d’expulsions de clandestins (une annonce dont on connait l’issue…) par celle de régularisations ciblées sur les métiers manquant de main-d’œuvre, qui finissent par accroître l’immigration.