De Jean-Pierre Maugendre sur Renaissance catholique :
Devenue l’homme malade de l’Europe, la France s’enfonce dans la crise politique, démographique, économique, sociale et spirituelle. Un président déconsidéré (11 % de bonnes opinions fin octobre 2025), dont le seul objectif politique est de survivre, a laissé les clés de la maison à une Assemblée nationale scindée en trois groupes d’importance numérique sensiblement égale qui s’écharpent sur le vote du budget 2026. Abasourdis et hébétés, les Français assistent à des débats et des votes d’assemblées, à des combines d’appareils politiques qui rappellent les pires heures de la IVe République et du parlementarisme triomphant. Quelques-uns en appellent à la dissolution de l’Assemblée nationale qui verrait, enfin, l’émergence d’un bloc national en mesure de redresser le pays. Sans mépriser cet enjeu électoral, ne nous y trompons pas ; il y a, pour redresser le pays, urgence à ce que le personnel politique digne de ce nom s’arrête sur l’origine profonde des maux dont nous souffrons. Pour le moment, il faut bien reconnaître que la précision du diagnostic n’est pas au rendez-vous.
Mettre des mots sur nos maux : les symptômes de la décadence française
Nul médecin ne peut prétendre guérir son patient s’il ne commence par avoir une claire vision de la maladie qui l’atteint. Citons quelques symptômes de ce qu’il faut bien nommer la décadence française.
- La crise démographique : un avenir en péril
Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la France a enregistré plus de décès (651 200) que de naissances (650 400) sur les douze derniers mois, à fin mai 2025. Or, la démographie, c’est l’avenir. Ce sujet, qui devrait être la priorité d’un gouvernement de redressement national, ne semble intéresser personne. Aucun élément du projet de budget 2026 ne prend en compte ce sujet, pas plus qu’aucun des amendements déposés par les uns ou les autres. Il faudrait pour cela remettre en cause le dogme libéral de la diversité légitime des différents modèles familiaux. Or, le fait est que les unions homosexuelles sont par nature stériles, que les familles décomposées puis recomposées sont moins fécondes que les familles stables constituées de l’union pérenne d’un homme et d’une femme. Entre redresser la natalité française et constitutionnaliser l’avortement, promouvoir les unions homosexuelles, faciliter le divorce, soutenir tous types de sexualités précoces et récréatives, etc, il faut choisir.
- L’effacement culturel et identitaire
« L’homme est un être culturel (et religieux – NDA), par nature » (Edgar Morin).
Les êtres humains ne sont pas des monades interchangeables réduites au statut commun de producteurs-consommateurs. Chaque personne est constituée par son histoire, ses croyances, ses mœurs, son art de vivre. Il en est de même de chaque peuple et de chaque nation. Or, le fait est que la France a été façonnée par le christianisme, ce dont témoignent ses paysages, ses œuvres artistiques, son art de vivre, son droit. « Il n’y a pas de culture française » proclamait Emmanuel Macron. Tragique aboutissement d’un processus entamé depuis plus de deux siècles, niant toute notion d’héritage et de transmission et faisant de la France un terrain vague, ouvert à tous, à condition d’en respecter les mantras promus au rang de vérités universelles : les Droits universels de l’homme « né enfant trouvé et mort célibataire » (Ernest Renan) et la laïcité. Tragiquement, l’échec de ce modèle n’est plus à démontrer alors que se poursuit, benoîtement, l’archipellisation (Jérôme Fourquet) de notre pays et que le nouveau ministre de l’Intérieur se révèle incapable de dire s’il y a 200 000 ou 700 000 clandestins installés sur notre territoire national. Entre se reconnaître l’héritier de 2000 ans d’histoire qui obligent et se prétendre le simple contractant d’un contrat évolutif et révocable, un choix s’impose.
- L’utopie égalitariste et ses dérives

La société moderne repose sur le postulat, faux, que l’homme est bon par nature et que c’est la société qui le déprave. Logiquement, en ajustant au mieux les structures de la société et, en particulier, en supprimant les inégalités sociales, le paradis terrestre pourrait, enfin, resurgir. Dangereuse utopie qui assimile inégalité à injustice alors que l’inégalité c’est la vie ; nous n’avons pas tous reçu le même nombre de talents, nous n’aurons pas tous les mêmes comptes à rendre ! Cruelle erreur concernant une liberté d’expression soigneusement balisée qui laisse prospérer la culture de la pornographie et se scandalise de la pédophilie, qui excuse ou place un mouchoir pudique sur les horreurs de la Terreur révolutionnaire de 1793 et s’émeut du génocide cambodgien des années 1975-1979, perpétré par l’ancien étudiant en France, Pol-Pot, ou du pogrom du 7 octobre 2023. Enfin, le culte de l’égalité détourne l’impôt de sa finalité de contribution, proportionnée, au service du bien commun pour en faire un instrument de redistribution et de nivellement social trop souvent au service d’idéologies discutables : écologie punitive ou wokisme. Entre les inégalités protectrices et l’égalité stérilisatrice il faut choisir, comme d’ailleurs entre la liberté absolue et une liberté qui serait d’abord celle de rechercher la vérité. N’est-ce pas Gustave Thibon qui observait que la multiplication des lois est le signe indubitable de l’affaissement des bonnes mœurs qui permettent à une civilisation de perdurer ?
- L’effondrement éducatif et anthropologique

Une anthropologie constructiviste, détachée du réel, a envahi tout notre espace politique et conduit à l’effondrement du système scolaire par lequel s’élabore l’avenir d’un pays. Une école qui donne plus de place à l’inclusion, à la lutte contre les stéréotypes de genre et à l’éducation sexuelle qu’à la transmission des savoirs devient une « fabrique de crétins », numériques ou non. Le peu de cas que l’on fait des métiers manuels ou artisanaux fait se traîner sur les bancs des collèges, jusqu’à l’âge de 16 ans, des enfants qui n’ont aucun goût pour les études académiques. Mener 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat c’est inéluctablement : dévaloriser ce diplôme, créer des générations d’aigris – les électeurs de LFI – qui ayant passé le bac se croient émules de Pic de La Mirandole ou d’Einstein et aussi réserver les emplois les moins qualifiés à une population immigrée qui n’a pas eu l’opportunité d’obtenir le précieux Sésame.
- Responsabilité et travail : des mots obscènes

Les mots responsabilité et travail sont devenus obscènes. L’exemple vient de haut : personne n’est responsable ni de l’incendie de Notre-Dame de Paris ni du vol des bijoux de la Couronne au Louvre. Une fausse conception de la solidarité détruit toute responsabilité. La cigale en appelle à la solidarité de la fourmi dans un système de protection sociale obsolète incapable de distinguer les vrais nécessiteux des réels profiteurs. Quant au travail il n’est plus, trop souvent, considéré que comme un mal incontournable et non plus la contribution, nécessaire, de chacun au service de l’intérêt général, permettant de tenir sa place dans la société. Quant à léguer le fruit de son travail à ses enfants, il n’en est plus question au nom de la sacrosainte égalité qui a érigé l’envie et la jalousie en système. « Les héritages en rebond qui passent de génération, en génération, vous savez le truc qui vous tombe du ciel, il y a un moment où cela suffit (…) il faut taxer davantage les héritages » déclarait ainsi le 15 octobre dernier Yaël Braun-Pivet, Présidente de l’Assemblée nationale.
Les voies du renouveau : refuser les mensonges mortifères
De tout cela il ne sera sans doute pas question lors des débats parlementaires sur le Projet de Loi de Finances 2026. Or l’essentiel est pourtant là, selon la juste formule du baron Louis à Guizot : « Faites-nous de la bonne politique et je vous ferai de bonnes finances ». Dans un monde dangereux pour lequel semble avoir sonné « L’heure des prédateurs » (Giulano da Empoli) ne survivront que les peuples qui auront renoncé aux mensonges mortifères :
- irréversibilité des avantages acquis,
- primauté des droits sur les devoirs,
- refus des identités nationales,
- expulsion de la religion de la sphère publique,
- exaltation des droits individuels au détriment du bien commun,
- mépris de son histoire et de ses racines,
- culture de l’excuse,
- intangibilité d’un « modèle social » à la française que, curieusement, personne à l’étranger ne songe à imiter, etc.

Venant d’être nommé Premier ministre du Royaume-Uni, Winston Churchill, dans son premier discours à la Chambre des communes le 13 mai 1940, alors que le Royaume faisait face à une situation militaire catastrophique mettant en péril son indépendance et sa pérennité, fixa son programme : « Je n’ai à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur ». Sous bien des aspects la situation de la France aujourd’hui est bien pire que celle du Royaume-Uni en 1940. Alors que le pays s’écroule, l’esprit de jouissance ayant détruit ce que l’esprit de sacrifice avait bâti, c’est tromper les Français que de leur faire croire qu’une sortie de crise indolore est possible, une fois qu’auront été livrés en pâture aux foules des bouc émissaires commodes comme les « riches » ou les « immigrés ».
Pour nous, confortés par la prophétie de Saint Pie X : « Les fautes ne resteront pas impunies, mais elle ne périra jamais, la Fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes » (29 novembre 1911),nous nous efforçons de rester fidèles au programme fixé par le père Calmel o.p. (1914-1975) :
« Nous maintenons quelques fortins irréductibles d’honneur chrétien, de culture chrétienne. Nous voudrions beaucoup plus que cela. Mais bénissons le seigneur qu’il y ait quand même cela et persévérons à travailler pour son amour ».
