Pour agir en politique, pouvons nous discriminer le contingent du nécessaire, l’accidentel de l’essentiel, le particulier et de l’universel ?
Dans son livre « Fondements de la Cité » (page 27), Jean Ousset explique en effet cette nécessité pour l’homme, à l’opposé de tout relativisme de connaître la vérité.
Tous les acteurs du « mouvement social » travailleront avec intérêt le nouvel ouvrage de formation publié par le Collectif Jean Ousset : La Dictature du Relativisme (200 pages – 12€ et 8,4€ en version numérique).
Ichtus propose des formations inspirées des méthodes développées par Jean Ousset. « Anthropologie et Politique » à l’école de JP II avec Bruno de Saint Chamas, « Faire aimer la Civilisation » par l’Art avec Nicole Buron, « Les ateliers de l’Histoire » avec Martin Dauch.
« Problème fondamental … que celui des rapports du contingent et du nécessaire, de l’accidentel et de l’essentiel, du particulier et de l’universel.
Problème des rapports entre connaissance sensible et connaissance intellectuelle
En réalité nous sommes là devant un problème bien connu, pour méprisé qu’il soit à l’heure actuelle, celui des « universaux »[1] autour duquel nos père se disputèrent si longtemps.
Mais, on l’a dit :
« Ceux qui ont regardé comme de simples disputes de mots les débats interminables et parfois tragiques, auxquels le problème des universaux donna lieu au Moyen Age, n’ont pas voulu comprendre la portée du problème. La question des universaux, en effet, est celle de l’origine même et de l’objectivité de notre connaissance. Toutes les questions capitales de la philosophie sont donc liées à celle-ci. La bien résoudre, c’est déterminer déjà la vraie nature de l’homme et les conditions de la certitude.
« En portant tous leurs efforts sur ce point, les scolastiques du XIe et XIIe siècles firent donc œuvre utile, ils creusaient plus avant qu’on ne l’avait jamais fait avant eux les fondements de la métaphysique et de la philosophie tout entière… »[2]
De ce fameux problème, a écrit Pierre Lasserre[3] avec un humour qui en facilite l’abord, toute personne un peu instruite connaît l’objet littéral…
« Quand je parle de l’Homme, au singulier et en général, Parlé-je d’un objet existant en soi ? Ou bien ce qui existe en réalité, n’est-ce pas les hommes, une multitude d’individus, tous divers, mais ayant entre eux une certaine somme de ressemblances dont mon esprit s’autorise pour les grouper tous ensemble sous un unique concept, une commune dénomination qui enveloppe à la fois Racine et le dernier des crétins, le bel Antinoüs et le plus difforme de nabots ?
« Autrement dit, les genres, les espèces, types auxquels nous rattachons respectivement les êtres individuels, ont-ils, indépendamment de ces êtres, une réalité par laquelle ils constitueraient comme autant de moules constants dans lesquels la nature a coulé coulera indéfiniment ce qu’elle produit ? Ou bien n’y a-t-il que des êtres individuels et particuliers sans aucun élément d’identité véritable entre eux ? Et les concepts abstraits ne sont-ils que des constructions de notre pensée, constructions d’autant plus artificielles que ces concepts se définissent en traits plus précis et plus arrêtés ? »
Ainsi, ramené à ces principaux traits, le problème des universaux peut être présenté en termes simples.
Disons qu’il est… le problème posé par la nature même de la connaissance humaine…
Connaissance à deux degrés, en quelque sorte, (apparemment contradictoires, sinon très différents).
Connaissance sensible couronnée par une connaissance intellectuelle.
La première rendant compte d’un donné matériel en perpétuel changement (fait d’une infinité d’éléments singuliers, concrets, individuels : ce que l’on voit, ce que l’on entend, ce que l’on touche, etc.)
La seconde s’exprimant en notions, idées marquées d’un caractère essentiel de permanence et d’universalité.
« L’âme connaît les corps, a-t-on dit, d’une connaissance immatérielle, universelle et nécessaire, connaissance très différente, pour ne pas dire opposée, à la connaissance sensible. »
D’où la difficulté qui, précisément, permet de dire qu’il y a problème…: un problème des universaux.
Problème de la nécessaire recherche d’une formule permettant de concilier…
… d’une part l’affirmation des sens, (lesquels nous montrent un univers fait de mille êtres singuliers, individuels, changeants)
… d’autre part l’affirmation de notre intelligence, pensant le même univers, à l’aide d’idées, (autant dire de notions essentiellement universelles et perdurables).
Trois solutions
Comment ne pas être troublé par cette opposition, au moins apparente ?
Autrement dit, comment une connaissance par concepts perdurables et universels, pourrait-elle être considérée comme la reproduction fidèle, la connaissance vraie d’un réel que les sens nous montrent individuel, multiple et changeant ?
Dès lors quelle valeur accorder au caractère universel de cet élément essentiel de la connaissance humaine que sont les idées ?
Le caractère d’universalité qu’elles expriment existe-t-il réellement, ou faut-il n’y voir qu’une déformation, sinon une schématisation commode, mais arbitraire, une convention, une simplification utilitaire de notre esprit ?
Dans cette dernière hypothèse la connaissance intellectuelle de l’homme, (connaissance par les idées), ne correspondrait pas au réel. Et ce qu’elle exprime n’existerait comme objets fixes, que dans notre esprit, n’ayant qu’une valeur de signe, de figure, d’étiquette, de nom. D’où le terme de « nominalisme » servant à désigner l’ensemble des théories ou systèmes qui se rattachent à cette hypothèse.
Admet-on, au contraire, que ce qu’expriment les idées est le réel par excellence ; beaucoup plus réel en un sens que les données sensibles, toujours mouvantes ou contingentes, si fugaces parfois… ?
On aura l’idéalisme ; autrement dit un nouvel ensemble de théories et systèmes prétendant, peu ou prou, que tout le réel est dans l’idée (d’où le terme même d’idéalisme).
A ces deux catégories de solutions extrêmes et contradictoires nous verrons qu’une troisième s’ajoute : seule harmonieuse, et vraiment seule solution, car, seule, elle parvient à concilier dans une unité rigoureuse l’affirmation des sens et l’affirmation de l’intelligence ; à concilier, autrement dit, le nécessaire et le contingent, l’universel et le particulier, le perdurable et le changeant évidents dans le monde.
… A suivre … la semaine prochaine.
[1] Problème dit des « universaux », parce qu’on y recherche quelle vérité doit être accordée à la connaissance intellectuelle de l’homme, connaissance par les idées, lesquelles sont universelles (d’où le vieux mot « d’universaux »). Alors que le réel qui tombe d’abord sous nos sens est particulier, singulier (non universel).
[2] Blanc, Dictionnaire de philosophie, p. 886. Édit. Lethielleux, Paris.
[3] Un conflit religieux au XIIe siècle, p. 41, éd. Artisan du livre, Paris.