Suite à des interrogations venues de plusieurs milieux (notamment de la FSSPX, mais aussi d'intellectuels italiens), le cardinal français Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, a expliqué, dans un article publié par l'Osservatore Romano daté de mardi, l'intérêt de la prochaine rencontre interreligieuse à Assise.
"Le dialogue n'est pas une conversation entre responsables religieux ou croyants d'autres religions. Il ne s'agit pas non plus d'une tractation de type diplomatique; ce n'est pas le lieu d'un marchandage et encore moins de compromis. (…) Il ne cherche ni à souligner, ni à annuler les différences. Il ne vise pas à créer une religion globale, acceptée par tous (…) ; il ne concède rien à l'ambiguïté des concepts et des mots.»
Pour le cardinal Tauran, l'enjeu de la rencontre d'octobre est de créer un «espace pour un témoignage réciproque entre croyants» et de «corriger des images erronées, et dépasser les a priori et les stéréotypes sur les personnes et les communautés». Ce dialogue entend
«connaître l'autre, tel qu'il est, parce qu'il a le droit d'être connu ainsi et non à partir de ce que l'on dit de lui, et encore moins tel qu'on voudrait qu'il fut».
Pour Jean-Marie Guénois, "deux choses semblent se dessiner" :
- "La période naïve du dialogue interreligieux, celle des années 70 pour être précis, est close. Les responsables religieux, comme les spécialistes, savent que toutes les avenues de ce dialogue ont été largement parcourues. Beaucoup s'accordent pour reconnaître que cette tentative de rapprochement butte aujourd'hui sur des impasses et des sens interdits.
- Une nouvelle forme de dialogue, plus identitaire et moins idéaliste, plus technique aussi, a donc pris le relais. Comme dit le cardinal Tauran, il n'est pas question de travailler à l'avénement d'une sorte de "religion mondiale" mais de contribuer à une vraie connaissance de l'autre. Ce qui est capital pour la conviavilité des sociétés d'aujourd'hui et de demain, marquées par un brassage intense des populations et des origines."
Le cardinal Ratzinger précisait le sens de ces rencontres, en 2005, dans un ouvrage rédigé avant son élection et publié juste après, Foi, Vérité, Tolérance (lire le texte : 1, 2, 3). Extrait :
"de tels procédés doivent rester des exceptions et surtout faire l’objet d’une clarification rigoureuse de ce qui se passe et de ce qui ne se passe pas. Cette clarification doit mettre en lumière le fait qu’il n’existe pas « les religions » en général, que la conception commune de Dieu ou la foi commune n’existe pas, que la différence ne touche pas seulement le domaine des images et des formes d’expressions changeantes, mais aussi les décisions fondamentales elles-mêmes. Cette clarification est importante, non seulement pour les participants de l’événement, mais pour tous ceux qui en sont témoins ou qui en sont informés de quelque manière. Cet événement doit être assez clair en lui-même et devant tous pour ne pas devenir une manifestation du relativisme par lequel il serait anéanti dans sa raison d’être."
C'est sans doute dans cette optique que le Pape a entamé le 4 mai une nouvelle série de catéchèses consacrées à la prière. Il disait notamment :
"Dans les exemples de prière des différentes cultures, que nous avons pris en considération, nous pouvons voir un témoignage de la dimension religieuse et du désir de Dieu inscrit dans le cœur de chaque homme, qui trouvent leur accomplissement et leur pleine expression dans l’ancien et dans le Nouveau Testament. La Révélation, en effet, purifie et porte à sa plénitude l’aspiration originelle de l’homme à Dieu, en lui offrant, dans la prière, la possibilité d’une relation plus profonde avec le père céleste."
En octobre 1986, Jean-Paul II déclarait aux membres des autres religions :
"Oui, il y a la dimension de la prière qui, dans la diversité très réelle des religions, tente d'exprimer une communication avec une Puissance au-dessus de toutes nos forces humaines. La paix dépend fondamentalement de cette Puissance, que nous appelons Dieu et que, comme chrétiens, nous croyons révélée dans le Christ. C'est là le sens de cette Journée mondiale de prière. […] La forme et le contenu de nos prières sont très différents, comme nous l'avons vu, et il ne peut être question de les réduire à une sorte de commun dénominateur. […] Le défi de la paix, tel qu'il se présente actuellement à toute conscience humaine, transcende les différences religieuses. C'est le problème d'une qualité de vie convenable pour tous, le problème de la survie de l'humanité, le problème de la vie et de la mort. […] Je redis ici humblement ma propre conviction: la paix porte le nom de Jésus-Christ."