Libération semble se plaindre qu'Henri Proglio coupe la publicité dans La Tribune :
"Dans son édition du 14 novembre, le quotidien économique affirmait sur une pleine page que l'électricien s'apprêtait à "abandonner le modèle EPR" en pleine polémique sur l'avenir du réacteur de Flamanville.[…] Les choses auraient pu en rester là. Mais Proglio est un sanguin, et un homme puissant peu habitué à ce qu'on le contrarie : dans cette même journée du 14 novembre, la direction de La Tribune est informée par Euro RSCG (Havas), l'agence de publicité d'EDF, que l'électricien "souhaite annuler toutes ses communications dans La Tribune jusqu'à la fin de l'année du fait de l'article paru dans le quotidien". EDF aurait même fait savoir qu'il ne souhaitait "plus être présent dans le titre".
[…] Manque à gagner pour La Tribune : 60 000 à 80 000 euros (après remise et forfait) selon nos informations. Une bien mauvaise nouvelle pour le quotidien économique qui se débat dans des difficultés financières inextricables depuis son abandon par LVMH en 2008, l'échec de sa relance par Alain Weill et sa reprise par Valérie Decamp en mai 2010 : La Tribune est actuellement en procédure de sauvegarde et le tribunal de commerce doit statuer sur l'avenir du journal le 19 janvier. […] [U]n responsable du quotidien […] dénonce "une pression inqualifiable sur un travail journalistique rigoureux" […] EDF rappelle par ailleurs avoir "beaucoup soutenu La Tribune" jusqu'ici : à hauteur de 300 000 euros en achat d'espaces rien qu'en 2011… Bref l'électricien s'attendait à un traitement plus sympa, d'autant que La Tribune avait déjà fait une page sur le thème "L'EPR est une catastrophe industrielle" le 9 novembre".
Et si la presse se donnait les moyens d'être libre ? Impossible ? Pas pour ceux qui le veulent vraiment.
PG
Un journal n’est jamais totalement libre : aucune communauté, aucune personne n’est totalement libre, quand le système économique ne le permet plus.
Un rapport du sénateur CARDOSO de 2010 sur les aides à la presse précisait dans le cadre du projet de loi de finances : http://www.senat.fr/rap/a10-114-6-2/a10-114-6-24.html
“En 2010, les critères d’attribution des aides en direction des quotidiens à faibles ressources publicitaires en ont limité l’octroi à six titres et entreprises de presse (La Croix, France Soir, L’Humanité, Libération, Présent et les publications destinées à la jeunesse de la société Play Bac Presse). Or, le rapport de M. Cardoso souligne que ces aides peuvent représenter 30 % du chiffre d’affaires des publications concernées et que la part des contributions publiques peut dépasser 60 % pour certaines d’entre elles (France Soir).
Le faible nombre de titres soutenus dans le cadre de ce fonds et leur extrême dépendance vis-à-vis des concours publics ne permettent pas, à l’évidence, d’identifier ce dispositif comme propre à garantir le redressement financier et le pluralisme de la presse d’opinion. Au contraire, lorsque la part du soutien public atteint de tels niveaux, il y a lieu de s’inquiéter d’un risque de dépendance structurelle par rapport à l’État, étant entendu que les contraintes qui pèsent sur l’indépendance financière des publications minent leur indépendance rédactionnelle.”
Certaines publications culturelles ou régionales ne reçoivent aucun centime, alors qu’il existe 11 aides différentes à la presse mises en place depuis 1945.
http://www.agencebretagnepresse.com/fetch.php?id=19482
La meilleure preuve d’indépendance totale est de ne dépendre que de ses lecteurs : ce n’est le cas d’aucun journal quotidien papier en France. Les coûts des divers monopoles étatiques et privés que protège le système ne le permet pas : d’où des dérogations et tarifs ”privilégiés” qui sont autant de subventions déguisées.
Mais est-ce que la presse papier a encore un avenir : le parchemin relié en livres a remplacé le volumen, puis il céda la place à l’imprimerie, et le journal papier disparaîtra à son tour : là est sans doute la voie d’une liberté nouvelle.