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France : Politique en France / Pays : Afghanistan

Quand M.Macron vaticine à propos de la situation en Afghanistan : danger pour la France

Quand M.Macron vaticine à propos de la situation en Afghanistan : danger pour la France

L’allocution de M.Macron, à partir de sa villégiature méditerranéenne à propos de la situation en Afghanistan, est –c’est bien normal- un concentré du macronisme. Nous remarquerons pourtant que deux de ses mantras favoris n’ont pas été cités : le célébrissime « Je ne cèderai rien » et « La France a une part d’Afghanistan en elle ». Un petit relâchement estival sans doute. Pour le reste, nous avons été comblés : rassurez-vous braves gens, nous ne maîtrisons rien et d’ailleurs nous n’avons nullement l’ambition de maîtriser quoi que ce soit.

Dans son historique des événements, on aura remarqué que M.Macron a exonéré M.Obama de toute responsabilité dans le processus de retrait des américains d’Afghanistan :

« Après une guerre de vingt années, après la décision de retrait des troupes américaines prise successivement par le président Trump et le président Biden, Kaboul, la capitale de l’Afghanistan, est tombée en quelques heures, sans résistance, aux mains des Talibans ».

Or, c’est en 2012 que M.Obama a pris la décision d’un retrait presque total pour fin 2014, politique ensuite suivie par M.Trump. Mais aggraver le compte débiteur de M.Trump n’est d’aucun danger et, entre globalistes de bon aloi, on s’épargne : on ne sait jamais de quels appuis M.Macron devra disposer dans une future vie professionnelle.

La logorrhée n’a pas épargné cette partie historique :

« L’intervention militaire française a donc définitivement cédé la place, le 31 décembre 2014, à l’action civile que nous avons continué de mener à bien, auprès du peuple afghan, avec lequel nos liens d’amitié sont anciens et profonds ».

Nous sommes heureux d’apprendre que les Afghans forment un peuple et non un agrégat de tribus (et il n’y a aucun contenu péjoratif à cet état de fait) et qu’au surplus, les liens d’amitié entre les peuples afghan et français sont anciens et profonds. Sans doute avait-on inséré cette tranche de l’histoire à côté de l’enseignement de la traite arabo-musulmane, ce qui explique son caractère confidentiel jusqu’à aujourd’hui.

M.Macron est un humaniste. Il décide donc l’accueil en France des

« personnels civils afghans qui ont travaillé pour l’armée française, ainsi que leurs familles. C’est notre devoir et notre dignité de protéger ceux qui nous aident : interprètes, chauffeurs, cuisiniers et tant d’autres. Près de 800 personnes sont d’ores et déjà sur le sol français. Plusieurs dizaines de personnes sont encore sur place qui ont aidé l’armée française et pour lesquelles nous restons pleinement mobilisées ».

De plus, « de nombreux afghans, défenseurs des droits, artistes, journalistes, militants, sont aujourd’hui menacés en raison de leur engagement. Nous les aiderons parce que c’est l’honneur de la France d’être aux côtés de celles et ceux qui partagent nos valeurs, autant que nous pourrons le faire et en tenant compte de la nécessaire adaptation de notre dispositif. Je remercie les associations, collectifs et communes qui aideront à leur accueil ».

On fera concernant cette décision trois observations principales :

1° Comme l’intervention militaire française avait cessé depuis six ans et que nous ne travaillions que dans le cadre de liens d’amitié anciens et profonds (dixit M.Macron), cet accueil n’a aucune base formelle de protection de personnels autochtones qui auraient été engagés dans un conflit. Pour être parfaitement clair, ces Afghans accueillis à la va-vite n’étaient en rien des personnels combattants (ni des vietnamiens, ni des harkis engagés dans les armées françaises) et ne travaillaient pas pour des personnels combattants.

2° La Constitution française dit dans son article 53-1 : « Les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ». Peut-on poser la question de savoir quelles ont été les actions en faveur de la liberté des personnels techniques ayant travaillé avec les représentations françaises en Afghanistan ?

3° Au moment où vient de se terminer l’adoption de la grande loi ( !) macronienne contre le séparatisme musulman (évitons les formulations hypocrites), peut-on juste savoir si on s’est assuré de la compatibilité de ces Afghans ainsi amenés en France avec les « principes républicains français » ?

C’est l’occasion de débrancher quelques instants vers la décision du Conseil constitutionnel (toute récente : le 13 août 2021) à propos de cette Loi confortant le respect des principes de la République. Cette décision a deux aspects qui nous intéressent : tout d’abord, dans son paragraphe 20 concernant l’article 12, elle énumère les obligations souscrites au terme d’un contrat d’engagement républicain, que nous pouvons donc considérer comme ces fameux principes républicains :

« les obligations prévues au titre de ce contrat sont celle de respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République au sens de l’article 2 de la Constitution, c’est-à-dire l’emblème national, l’hymne national et la devise de la République, celle de ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République et, enfin, celle de s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public ».

On sait donc quoi exiger.

Par contre, l’article 26 de la loi subordonnait le séjour d’un étranger en France à l’absence de manifestations d’un rejet des principes de la République. Or, les députés (de gauche) auteurs de la saisine concernant cet article avaient estimé que

« au regard de l’imprécision de l’expression « principes de la République » et de l’absence de critères permettant de caractériser la manifestation d’un rejet de ces principes, ces dispositions méconnaîtraient le principe de clarté de la loi et l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Ils font valoir également que ces dispositions, de par leur caractère équivoque, ne préviendraient pas « le risque de décisions administratives ou juridictionnelles arbitraires » et méconnaîtraient, de ce fait, la liberté d’aller et venir, la liberté individuelle et le droit à une vie de famille normale » (§49).

Et bien, le Conseil constitutionnel leur a donné raison :

« Le législateur n’a pas, en faisant référence aux « principes de la République », sans autre précision, et en se bornant à exiger que la personne étrangère ait « manifesté un rejet » de ces principes, adopté des dispositions permettant de déterminer avec suffisamment de précision les comportements justifiant le refus de délivrance ou de renouvellement d’un titre de séjour ou le retrait d’un tel titre (§54). Dès lors, les dispositions contestées méconnaissent l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, l’article 26 est contraire à la Constitution (§55) ».

On aura remarqué la grande cohérence du Conseil constitutionnel qui considère que les principes de la République, qu’il vient de rappeler propos de l’article 12, ne sont plus suffisamment précis pour l’article 26 ! Et que, comme d’habitude avec les diverses juridictions françaises et extra-françaises, il sanctionne toutes les mesures prises par le pouvoir exécutif ayant le moindre début d’intérêt pour le contrôle de l’immigration.

Ainsi, c’est vrai, d’une certaine façon le pouvoir macronien n’a pas l’autorisation d’évaluer un éventuel rejet des principes de la République parmi les Afghans qui vont se précipiter en France ! On dirait volontiers : Merci Qui ? Mais on ne voudrait pas être ipso facto taxé d’antisémitisme…

Enfin, l’aspect le plus structurant de la déclaration de M.Macron concerne l’organisation des flux migratoires :

« Au-delà de l’urgence, j’entends prendre au nom de la France plusieurs initiatives en lien étroit avec les autres états européens et nos alliés. Et en premier lieu, face au risque de « flux migratoires irréguliers vers l’Europe. La France, comme je l’ai dit, fait et continuera de faire son devoir pour protéger celles et ceux qui sont les plus menacés. Nous prendrons toute notre part dans le cadre d’un effort international organisé et juste. Mais l’Afghanistan aura aussi besoin dans les temps qui viennent de ses forces vives et l’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle. Nous devons anticiper et nous protéger contre des flux migratoires irréguliers importants qui mettraient en danger ceux qui les empruntent, et nourriraient les trafics de toute nature. Nous porterons donc, en lien avec la République Fédérale d’Allemagne, et je me suis entretenu il y a quelques instants à ce sujet avec la Chancelière Merkel, et avec d’autres états européens, une initiative pour construire sans attendre une réponse robuste, coordonnée et unie qui passera par la lutte contre les flux irréguliers, la solidarité dans l’effort, l’harmonisation des critères de protection, et la mise en place de coopérations avec les pays de transit et d’accueil comme le Pakistan, la Turquie ou l’Iran ».

Tout ça ne respire pas ni la clarté ni la franchise. C’est fait exprès. Le point crucial est la juxtaposition d’un « effort international organisé et juste » et de « flux migratoires irréguliers ». C’est exactement la terminologie contenue dans ce pacte mondial pour les migrations, piloté par l’ONU et signé en particulier par la France lors d’une assemblée générale de l’ONU à Marrakech le 10 décembre 2018. Retenons pour le divertissement, et nonobstant son rôle dans tout ce chaos et les prévisions de flux migratoires justes ou injustes, les Etats-Unis n’ont pas signé ce pacte.

Rappelons les principaux présupposés qui ont présidé à l’élaboration de ce Pacte endossé par M.Macron : Les migrations sont inévitables ; aucun pays ne peut faire face seul à la migration et il faut une gouvernance mondiale ;  les expulsions de personnes en situation illégale sont décommandées ; les migrations sont fondamentalement positives pour les pays d’accueil ;  les gouvernements doivent ouvrir des voies d’accès pour des migrations régulières ; les pays d’accueil ont l’obligation d’aider les migrants à réaliser pleinement leur potentiel ; le regroupement familial est recommandé ; la structuration et l’organisation des migrants dans les pays d’accueil en « communautés » et en « diasporas » (ce terme revient 25 fois dans le texte) sont privilégiées : c’est donc l’institutionnalisation du communautarisme. Le migrant n’est pas là pour s’intégrer.

Se soumettant à nouveau à un cadre international ôtant toute capacité de décision souveraine française, M.Macron préannonce donc une structuration des flux migratoires, en particulier avec l’Allemagne (et on connaît la dilection de Mme Merkel pour les immigrants des pays musulmans). Ces flux, au départ irréguliers seront déclarés « justes » et passez muscade. Après tout, l’Afghanistan, ce ne sont que 38 millions de personnes, ce n’est pas la mer à boire. Et d’ailleurs, le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU vient de réclamer l’interdiction du renvoi des ressortissants afghans vers leur pays, même si leur demande d’asile est rejetée.

Et puis, M.Macron est un peu emporté par sa péroraison :

« Enfin, il nous faut continuer de défendre nos principes, nos valeurs, qui font ce que nous sommes.  L’histoire de l’Afghanistan n’a pas commencé pas en 2001. Nous sommes intervenus dans un pays ébranlé par quarante ans de guerre, un grand pays tourmenté. Et Nous, Français, sommes à même de le comprendre. Nous, à qui il a fallu des siècles de lutte, de fautes, d’avancées et de reculs pour bâtir une nation conforme aux plus grandes espérances humaines : l’égalité sans considération d’origine, de sexe ou de religion et la liberté de choix et de conscience ».

On aura retrouvé ce thème macronien qui lui est si cher, celui des « fautes » de la France ; il n’y a pas de petit plaisir…

Et M.Macron de terminer dans son flou artistique qui lui va si bien :

« Si le destin de l’Afghanistan est entre ses mains, nous resterons, fraternellement, aux côtés des Afghanes et des Afghans. En soutenant la société civile afghane et en faisant notre devoir de protection de celles et ceux que nous pouvons protéger. En disant très clairement à ceux qui optent pour la guerre, l’obscurantisme et la violence aveugle qu’ils font le choix de l’isolement. En étant toujours du côté de ceux qui combattent pour la liberté, les droits des femmes, qui portent dans le monde le même message que le nôtre. C’est le choix de la raison, c’est le choix de ce que nous sommes profondément ».

Mais, au fait, que craignons-nous réellement pour les Afghans ? Après tout, les talibans ne pratiquent-ils pas un islam chimiquement pur ? Et l’islam n’est-il pas, dans sa pureté, un régime de tolérance et de paix ? Et M.Darmanin lui-même n’a-t-il pas rappelé que

« au regard de l’histoire, s’il y a une religion qui a moins de difficulté à travailler avec la République, c’est l’islam… un dialogue plus facile, une discussion plus spontanée qu’avec les autres cultes » (septembre 2020).

Ne déclarait-il pas en février 2021 que « l’islam est parfaitement compatible avec la République » ?

Alors, qu’est-ce qu’un paisible cuisinier afghan, ayant travaillé pour un Français ami ancien et profond du peuple afghan aurait-il à craindre d’un Afghan musulman, certainement paisible et tolérant puisque soucieux de la véritable application de l’islam, cette religion avec laquelle l’Etat français travaille si bien ? Ou bien nous cacherait-on quelque chose ?

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