Juristes pour l’enfance a fait part au Sénat de son inquiétude sur cette proposition de loi concernant les “thérapies de conversion”, qui mélange l’orientation sexuelle et l’identité de genre, sans distinguer pour celle-ci entre les personnes majeures et celles mineures.
Si l’on ne peut qu’approuver la lutte contre les thérapies de conversion décrites comme « des pratiques pouvant prendre la forme d’entretiens, de stages, d’exorcisme ou encore de traitements par électrochocs et injection d’hormones » prétendant lutter contre l’orientation sexuelle, en revanche, s’agissant de l’identité de genre, la proposition de loi suscite les plus grandes réserves.
En effet, si elle est adoptée, elle interdira l’accompagnement prudent des questionnements de genre chez les mineurs au profit d’une approche dite « trans-affirmative ».
Les questionnements identitaires sont fréquents chez les enfants, et ils se traduisent parfois chez un petit nombre par un véritable mal-être face à leur identité sexuée. Mais, pour l’immense majorité de ces enfants (i.e. pour 77 à 94% selon les études citées par l’association mondiale des professionnels en santé transgenre (WPATH) ), le trouble cesse avant l’âge adulte notamment grâce à une prise en charge adaptée.
Pourtant, et alors que depuis moins de 10 années en France, on assiste à une augmentation très importante du nombre d’enfants et surtout d’adolescentes s’identifiant comme transgenres, l’approche trans-affirmative voudrait désormais interdire toutes les « prises en charge psychothérapiques qui ouvrent la possibilité de réfléchir et d’explorer le genre » au profit d’une seule résolution immédiate du questionnement identitaire de l’enfant, y compris médicalement, sans attendre les années nécessaires à l’évolution de ce questionnement.
Au niveau médical, cela se traduirait par l’impossibilité de refuser à un enfant l’accès au parcours trans-affirmatif qui se déroule de la manière suivante : administration de bloqueurs de puberté dès le stade Tanner 2 de la puberté (c’est-à-dire vers 10-11 ans), administration d’hormones croisées vers 15-16 ans, pour les filles mastectomie (ablation des deux seins) à partir de 14 ans, chirurgie des organes génitaux « du bas » et chirurgie du visage etc. dès 18 ans. Ces seuils d’âge sont pratiqués en France et ont été exposés lors d’un séminaire d’endocrinologie en mars dernier, dans lequel un médecin a détaillé les pratiques de l’hôpital parisien Robert Debré. Les parcours médicaux concerneraient déjà plus d’un millier d’enfants.
Bloqueurs de puberté et hormones sexuées croisées entraînent des conséquences lourdes et irréversibles pour les enfants , les transformant en patients à vie (alors que la plupart d’entre eux ont un corps sain à l’origine) avec de nombreux problèmes de santé dus à l’administration prolongée des hormones . Quant à la mastectomie, elle est définitive. Jusqu’à ces dernières années, les médecins pensaient qu’une partie de ces traitements était réversible et sans effets secondaires graves. Les études diligentées depuis deux ou trois ans montrent le contraire.
C’est la raison pour laquelle les pays « pionniers » dans la mise en œuvre de l’approche trans-affirmative, reviennent sur la prise en charge médicale des mineurs, au vu à la fois des conséquences néfastes pour leur santé, et des regrets développés par de nombreux jeunes après leur transition médicale, qui demandent à « détransitionner ». Ils représenteraient aujourd’hui environ 20% des jeunes ayant subi une transition médicale. La Suède , la Finlande ont été les premiers à mettre fin au parcours médical de transidentité des mineurs. La Grande Bretagne est en plein questionnement. Aux Etats-Unis, des cliniques de transition pour mineurs ferment, après que des médecins trans-affirmatifs (comme le Dr Marci Bowers) ont reconnu que les traitements médicaux de transition pour les mineurs soulevaient de graves questions et ne constituaient sans doute pas des soins médicaux adaptés.
Contrairement à ce qui a pu être soutenu à l’Assemblée nationale lors des débats en 1ère lecture sur la proposition de loi, les traitements sont administrés en France régulièrement sur des enfants mineurs, alors que l’on ne peut qu’interroger leur capacité à consentir à un si jeune âge à de tels traitements qui les amènent à devenir des malades chroniques et à renoncer aux capacités sexuelles et reproductives de leurs organes génitaux puisque c’est bien cela dont il s’agit avec les traitements hormonaux, puis avec la chirurgie.
Juristes pour l’enfance demande à ce que la mention de l’identité de genre soit supprimée de ce texte et qu’aucune transition médicale ne puisse être mise en œuvre sur les mineurs.