Le principal effort de la pénitence consiste à « faire retour sur soi-même », sur son moi le plus profond, sur cette dimension de notre humanité où, en un certain sens, Dieu nous attend. Je dirai qu’en chacun de nous l’homme « extérieur » doit céder le pas à l’homme « intérieur » et, en un certain sens, « lui laisser la place ».
Dans la vie courante, l’homme ne vit pas assez « intérieurement ». Jésus-Christ indique clairement que les actes de dévotion et de pénitence (comme le jeûne, l’aumône, la prière) qui, de par leur finalité religieuse, sont principalement « intérieurs », peuvent eux aussi céder à l’extériorité courante et donc être falsifiés.
La pénitence, au contraire, en tant que conversion à Dieu, requiert surtout que l’homme rejette les apparences, sache se libérer de ce qui est faux et se retrouver dans toute sa liberté intérieure. Un regard, ne serait-ce que rapide, sommaire, sur la divine splendeur de la vérité intérieure de l’homme est déjà un succès. Mais il faut habilement consolider ce succès par un travail systématique sur soi-même. Ce travail est appelé « ascèse » (comme l’avaient déjà appelé les Grecs des premiers temps du christianisme). Ascèse veut dire effort intérieur pour ne pas se laisser prendre et emporter par les différents courants « extérieurs », afin de rester toujours soi-même et de conserver la dignité de son humanité.
Mais le Seigneur Jésus nous appelle à faire encore quelque chose de plus. Lorsqu’il dit : « Retire-toi au fond de la maison et ferme la porte », il demande un effort ascétique de l’esprit humain qui ne doit pas avoir pour terme l’homme lui-même.
Cette retraite est en même temps l’ouverture la plus profonde du cœur humain. Elle est indispensable pour rencontrer le Père et il nous faut donc y entrer. « Ton Père voit tout ce que tu fais dans le secret et il te le revaudra. » Il s’agit ici de retrouver la simplicité de pensée, de volonté et de cœur qui est indispensable pour rencontrer Dieu dans notre « moi » intérieur.
Et Dieu attend cela pour s’approcher de l’homme intérieurement recueilli et en même temps ouvert à sa parole et à son amour. Dieu veut se communiquer à l’âme ainsi disposée. Il veut lui donner la vérité et l’amour, qui ont en lui leur vraie source.
Audience générale du mercredi des Cendres 28 février 1979, ©Librairie éditrice vaticane