Un document conjoint entre catholiques et orthodoxes reconnaissant la primauté du pape doit être publié aujourd’hui à Rome. Le texte intitulé «Conséquences ecclésiologiques et canoniques de la nature sacramentelle de l’Église – Conciliarité et synodalité dans l’Église» est le fruit du travail de la commission de dialogue théologique entre Églises catholique et orthodoxes, qui s’est réunie à Ravenne (Italie) en octobre. Les signataires reconnaissent que l’Église de Rome
"occupe la première place dans l’ordre canonique et que l’évêque de Rome est donc le tout premier parmi les patriarches" (dans l’Église primitive, ils étaient cinq : Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem).
Des désaccords demeurent cependant : si la primauté du pape et de Rome est reconnue, il reste à définir les prérogatives exactes du chef de l’Église catholique. Catholiques et orthodoxes sont d’accord pour affirmer que chaque évêque est maître chez lui et qu’au niveau régional ils doivent reconnaître un primus inter pares («premier entre égaux»). Mais, au niveau universel, les choses sont différentes. Le document affirme que
"ceux qui sont les premiers doivent reconnaître parmi eux celui qui est le premier".
Mais ce ne serait pas forcément une fois pour toutes ; autrement dit, dans la pratique, ce rôle ne reviendrait pas automatiquement au pape. Et, quoi qu’il arrive, ce dernier ne pourrait pas gouverner seul :
"Le premier ne peut rien faire sans le consentement de tous."
Dans les Églises orthodoxes, l’assemblée synodale détient l’autorité suprême, mais pas à Rome.
En outre, les orthodoxes sont désunis : en octobre, la délégation du patriarcat orthodoxe de Moscou a quitté la réunion de Ravenne, à cause d’un désaccord avec le patriarcat de Constantinople, qui avait invité à la rencontre une délégation de l’Église apostolique estonienne, laquelle n’est pas reconnue par Moscou. L’Église orthodoxe russe regrettait aussi que des Églises sous son autorité (États-Unis et Japon en particulier), n’aient pas été invitées. Le document publié simultanément au Vatican, à Istanbul, Athènes et Chypre, n’a pas été signé par le patriarcat de Moscou, qui représente la moitié des orthodoxes du monde. Le cardinal allemand Walter Kasper a souligné hier soir sur Radio Vatican que "la route qui conduit vers la pleine unité avec les orthodoxes est encore longue".
Quoi qu’il en soit, c’est une avancée importante. Benoît XVI a convoqué le 23 novembre tous les cardinaux pour une grande réunion sur le thème de l’œcuménisme.