De l’Hermione à Notre-Dame de Paris, une charpente en chêne de 1300 à 1400 arbres. Un volume de bois comparable mais une mise en œuvre beaucoup plus complexe en charpente navale. L’Association Française des Eaux et Forêts, AFEF, a publié sur son blog le 17 avril 2019 un article rappelant que les forêts françaises disposent de tout le bois nécessaire tant en qualité qu’en volume, et ce sans aucun problème : “une goutte d’eau” pour notre forêt. (voir www.afef.fr ) Pour mémoire : l’AFEF, association reconnue d’utilité publique et créée il y a près d’un siècle, est un cercle de réflexion regroupant des responsables forestiers et des professionnels du bois.
Dès le 16 avril, avec Jean-Marie Ballu, le Télégramme évoquait ce volume de bois, assez comparable à celui demandé pour la reconstruction de l’Hermione. (pour plus de détails, voir le livre “l’Hermione, l’aventure de sa reconstruction“, par J-M Ballu éditions Vagnon / Fleurus).
Pour une charpente de cathédrale, il s’agit de bois droits faciles à trouver et de diamètre moyen ; par contre pour une coque comme celle de l’Hermione, la recherche est beaucoup plus difficile car il faut aussi trouver des “fourcats” (en fourche) et des bois courbes, courbant et tors de gros diamètre ; de plus la mise en œuvre est beaucoup plus complexe !
Parce que hissés à grande hauteur avec les moyens de l’époque, de simples cages d’écureuil, les sections des bois de Notre-Dame de Paris, sont relativement faibles (diamètre des troncs de l’ordre de 35 à 45 cm) donc séchant beaucoup plus vite, une fois débités (sciés). En revanche, dans les grands châteaux comme Chambord, les sections des poutres de planchers avaient été réalisées dans des chênes de 80 cm à près d’un mètre de diamètre.
Nos entreprises ont déjà une partie du stock nécessaire en séchage. De plus, même dans les chantiers de marine, on commençait avec les stocks de bois secs, mais une partie du séchage se faisait à l’air le bois étant déjà mis en place, et si on manquait de “bois sec”, on ralentissait de quelques mois la construction pour laisser sécher ; c’était d’ailleurs surtout pour les bordages (pour l’étanchéité de la coque) que l’on exigeait du bois “sec”. Sous Louis XVI, la réglementation imposait qu’une frégate reste au moins deux ans en chantier pour permettre à la membrure de sécher (chantier en général de 3 à 5 ans).
Pascal Jacob, expert bois, a dans le même sens adressé, au Président de la République, à propos de la reconstruction de la charpente de la cathédrale Notre Dame de Paris, une lettre démontrant l’importance de reconstruire en bois : https://www.pascaljacob.fr/
notre-dame-de-paris La comparaison entre “les charpentes de nos bâtiments de terre ou de mer“, comme le disait l’ordonnance de Colbert en 1669, reste instructive. Enfin prévoir un village d’artisans au pied de Notre-Dame serait extrêmement instructif et ferait une belle promotion de nos savoir-faire. C’est ce défi qui a été remarquablement relevé par l’Association Hermione Lafayette, avec Benedict Donnelly et notre académicien Erik Orsenna, en réalisant en 17 ans une superbe réplique historique de la frégate qui avait officiellement conduit La Fayette aux Etats-Unis.
La restauration de la charpente de Notre-Dame de Paris, qui lui avait permis de durer près de 9 siècles et aurait pu durer plus encore, doit se faire dans les règles de l’art et de l’histoire pour les siècles à venir.