Courrier à envoyer à l'autorité responsable (maire, directeur…), avec copie à Dominique Baudis (7 rue Saint-Florentin
75409 Paris Cedex 08), défenseur des droits :
"Je me permets d’attirer votre attention sur le fait suivant, qui exige de
votre part la réponse la plus rapide possible. Je ne puis en effet rester sans
réagir devant la discrimination dont je suis victime.
Dans le cadre de (activité,
inscription…), j’ai naturellement dû remplir un dossier administratif,
comprenant le formulaire ci-joint.Or, il s’avère que ce document administratif comporte les mentions :
« Parent 1 » (ou « Représentant
légal 1 ») et « Parent 2 » (ou
« Représentant légal 2 »), en lieu et place des mentions :
« Père » et « Mère », que j’ai bien évidemment rétablies.Le fait d’exiger que je remplisse, tel qu’il est rédigé, ce formulaire,
préalable obligé à toute mise en œuvre de la procédure administrative que je
sollicite, constitue non seulement une violation directe de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage
aux couples de personnes de même sexe, mais encore crée à mon encontre un
préjudice moral particulièrement grave dont la collectivité que vous
représentez est responsable.Pour mémoire :
-
Le communiqué de presse du Conseil des ministres du 7
novembre 2012 affirme que : « Lorsque cela est strictement nécessaire, les
mots « père et mère » sont remplacés par le mot « parent » et les mots « mari
et femme » par le mot « époux ». Ces modifications ne sont pas systématiques.
En outre, elles ne concernent pas les actes d’état civil et le livret de
famille, dont la forme n’est pas régie par la loi. Ces actes, ainsi que le
livret de famille continueront à utiliser les termes de « père et mère » dès
lors qu’il s’agira de couples de personnes de sexe différent » ;-
L’exposé des
motifs de ladite loi énonce que : « Lorsque cela s'avère
nécessaire, les mots « père et mère » sont remplacés par le mot « parents » et
les mots « mari et femme » par le mot « époux ». Ces substitutions concernent
uniquement les articles qui s'appliquent à tous les couples. Dans tous les
autres cas, les articles ne sont pas modifiés : tel est le cas dans l'ensemble
des dispositions concernant la filiation établie par le seul effet de la loi » ;-
L’étude
d’impact de la même loi contient les phrases suivantes, tout à fait explicites :
« La réforme envisagée n’aura pas de conséquence sur les actes d’état
civil (actes de naissance, de reconnaissance, de mariage et de décès) relatifs
aux couples hétérosexuels » (§ 4-1.1.3, p. 26) et « S'agissant
des autres branches du droit civil, il conviendra de procéder aux seules
adaptations légistiques strictement nécessaires afin d'adapter les textes qui
visent actuellement « le père » ou « la mère » et de permettre qu'ils puissent
aussi régir la situation des couples de deux pères ou de deux mères »
(§ 4-1.1, p. 25) ;-
De même, la
circulaire du 29 mai 2013 de présentation de la loi ouvrant le mariage aux
couples de personnes de même sexe est on ne peut plus claire : « le
mariage entre deux personnes de même sexe n’emporte aucun effet en matière de
filiation non adoptive » (§ 1, p. 2) ;-
A la tribune
de l’Assemblée Nationale et du Sénat, la Garde des Sceaux, ministre de la
Justice, Madame Taubira, n’a cessé de rappeler que (1) les diverses versions du
projet du Gouvernement n’avaient jamais compris les expressions « parent
1 » et « parent 2 » et que (2) les adaptations qui étaient
faites au niveau législatif et qui seraient faites au niveau règlementaires ne
remplaceraient jamais, pour les couples de sexe différent, les mentions du
« père » et de la « mère » par ces expressions. Le Journal
officiel des débats des chambres parlementaires fourmille de ces rappels
qu’il est inutile de citer.Le décret n° 2013-429 du 24 mai
2013 portant application de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 n’a lui-même
procédé qu’aux seules adaptations terminologiques strictement nécessaires au
regard du vote de la loi.Est-il enfin besoin de rappeler que l’arrêté du 24 mai 2013 modifiant
l’arrêté du 29 juillet 2011 modifiant l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le
modèle de livret de famille (rectificatif) est précisément venu remplacer
l’arrêté modificatif qui venait juste d’être édicté afin de mieux prendre en
compte le fait qu’il existe aujourd’hui deux types de mariage en droit français,
en instituant deux livrets de famille différents ?Les couples continuant à se fonder sur l’altérité sexuelle bénéficient en
effet d’une loi spéciale dérogatoire à la loi générale, en vertu du nouvel
article 6-1 du code civil, issu de l’article 13 de la loi du 17 mai 2013, qui
exclue le titre VII du livre Ier du code civil de la réforme que la
loi opère. Ainsi, non seulement l’intention du législateur, constante et
manifeste, a été de préserver les couples de sexe différent de toute atteinte à
leur droit élémentaire de voir reconnue leur altérité sexuelle comme origine de
la filiation de leurs enfants, mais encore la lettre même de la loi impose,
oblige et exige que tous les actes administratifs devant prendre en compte la
filiation ainsi établie au regard des règles du code civil, respectent cette
altérité sexuelle.Si la loi générale use de termes génériques, identiques à ceux utilisés
pour la loi spéciale des couples de même sexe, il n’en est donc pas de même
pour la loi spéciale des couples de sexe différent. Or, les formulaires
administratifs sont tenus de prendre en compte ces différences linguistiques,
qui forment l’expression même du droit fondamental reconnu aux couples fondés
sur l’altérité sexuelle de continuer à rendre public et opposable à
l’administration ce fait.La violation de ce droit fondamental constitue une discrimination abusive
et une rupture d’égalité devant la loi et le service public, principe général
du droit et principe à valeur constitutionnelle. Elle constitue également une
violation de mon droit à mener une vie familiale normale, protégé et garanti
par la Constitution française (dixième alinéa du Préambule de la Constitution
de 1946, cf. décision du Conseil
constitutionnel n° 2012-248 QPC du 16 mai 2012, 5ème considérant)
et la Convention de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 (article 8). Vous
ne sauriez l’ignorer.En outre, l’utilisation des expressions « Parent 1 » (ou « Représentant légal 1 »)
et « Parent 2 » (ou « Représentant
légal 2 ») introduit une inégalité manifeste entre les parents que je ne
peux partager. En se référant à une numérotation, ces expressions créent en
effet nécessairement une inégalité, là où les mentions « Père » et
« Mère », en ne signifiant que l’altérité sexuelle, consacraient
l’égalité des parents.En conséquence, je demande que, dans les plus brefs délais, vous mettiez
à ma disposition, comme à celle de tout couple de sexe différent usager des
services publics gérés par votre collectivité, des documents administratifs et
des formulaires conformes à la loi du 17 mai 2013 et comportant les termes
« père » et « mère », à l’exclusion de tous autres.En application de l’article 21 de
la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations, en l’absence de réponse de votre part dans
les deux mois de la réception de la présente demande, je devrais considérer que
vous m’opposerez un refus implicite de modifier lesdits documents
administratifs et de les mettre à disposition.Ce faisant, je me verrais
contraint d’user de toutes voies de droit afin de faire cesser la
discrimination dont je suis victime, de faire annuler tout acte illégal que
vous auriez pris et, le cas échéant, de voir engager votre responsabilité afin
de réparer le préjudice que je subis injustement."