L'abbé Amaury Cariot, délégué à la communication du diocèse de Pontoise, écrit :
"A peine un peu plus de 2 mois après la
manifestation du 13 janvier, qui avait déjà rassemblé des centaines de
milliers de personnes au Champ de Mars, c’est plus d’un million de
manifestants (300.000 selon la police) qui sont descendus à Paris dire
leur « non » à ce projet de Loi.Etant sur le toit du podium central pour prendre des photos, j’ai pu
voir cette foule immense, allant de l’arc de triomphe jusqu’à la
Défense. Foule bigarrée, joyeuse, pacifique, peu habituée à descendre
dans la rue. Un peuple qui d’habitude ne fait pas de bruit, ne manifeste
pas, était là. De toutes religions, (présence remarquée de la
communauté musulmane), de toutes tendances politiques (élus de droite et
de gauche), de tous âges…
Les prises de paroles de qualité, qui faisaient plus ressembler
cette manifestation à un meeting qu’à une kermesse, ont redit les
oppositions à cette loi qualifiée de «déstructurante» pour notre
société.Le traitement infligé par le gouvernement, les répressions
policières sans AUCUNE mesure avec les très sporadiques débordements,
les commentaires des ministres le soir même, laissent un sentiment de
dégout et de révolte profonds, quand, rentré chez soi, on écoute les
informations.
Compter 300.000 manifestants ce soir là est une offense à la vérité.
Le général Dary, ancien Gouverneur Militaire de Paris, peu connu pour
ses prises de paroles fantaisistes et organisateur plusieurs années de
défilé du 14 juillet, annonçait en fin de soirée une estimation à
1.400.000 personnes. Faisant de ce rassemblement un rassemblement
historique. Historique par son nombre. Historique par sa bonne tenue.
Historique parce que réitéré à 9 semaines d’intervalle. Historique parce
que confiné et bloqué par la préfecture de police de Paris dans un
périmètre qui ne pouvait contenir la foule. Les « débordements »
auxquels j’ai assisté étaient de vrais débordements : quand il y a un
trop plein de foule compressée, les barrières s’affaissent un moment ou
un autre.
Remplissez une casserole de 5 litres d’eau. Si elle ne peut contenir que 4 litres, n’accusez pas l’eau de se répandre autour…
Alors que je ne croyais pas en cette deuxième manifestation, alors
que le froid régnait comme le 13 janvier, alors que cette date des
Rameaux, entrée dans la semaine Sainte pour les catholiques, pouvait
laisser présager une désaffection des chrétiens, nous avons été plus
nombreux.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs du Gouvernement, ne
soyez pas autistes. Entendez cette voix d’un peuple qui supplie, qui
demande, et qui gronde. Entendez ces familles, qui vous disent que cette
loi les choque. Ils ne sont ni réacs ni homophobes. Ils ne sont ni
haineux ni casseurs. Ils ne sont ni de droite ni de gauche, ni catho ni
athées.
Combien de manifestations faudra-t-il ? Combien de millions de
français déniés et reniés ? Combien d’amalgames douteux ? («la
manifestation de la Honte», Arte)
Combien de clichés scandaleux ? («Quelques serre-têtes et jupes plissées pensent sincèrement que nous allons reculer sur le mariage pour tous!» Sénateur Michel)
Au jeu de la surenchère, nous ne jouerons pas.
Le peuple qui était là ce soir était un peuple digne. Les quelques
excités (30? 40? sur 1.400.000 personnes!), pain béni des médias ne nous
détourneront pas de la fierté d’avoir participé à un jour historique.
Dans le silence de la semaine Sainte, n’ayons pas peur pour reprendre le Pape François, de la tendresse et de la bonté.
Ce sont nos armes. Les seules. A mains nues et à cœur ouvert.
Entendez ce silence. Entendez ces cœurs de France qui battent pour
leurs familles, pour leurs enfants. Ne montez pas les français les uns
contre les autres. Notre pays a besoin de toutes ses forces pour les
défis qui l’attendent, et qui sont des enjeux vitaux.
Entendez ce peuple. Regardez-le. Ne le méprisez pas. Ne le bâillonnez pas."