Communiqué :
"Pour la première fois dans l’histoire de la Justice, de jeunes adultes porteurs de trisomie 21, sans avocat, viennent de saisir le Conseil d’Etat pour faire annuler une décision du CSA qui censure leur libre parole. A l’occasion de la journée mondiale 2014 de la trisomie 21, TF1, M6, Canal+ et D8 ont diffusé gracieusement un clip intitulé « Dear Future Mom ». Ce clip mettait en scène plusieurs jeunes français et étrangers porteurs de trisomie 21. Ils expliquaient que, malgré leur handicap, ils étaient heureux et qu’ils pouvaient vivre, travailler et aimer comme tout le monde. Ce clip, repris sur Youtube, a connu un succès fou royant : il a été vu par plus de 5 millions de personnes.
Mais le 25 juillet dernier, le CSA annonçait sur son site qu’il venait d’écrire aux chaines de télévision pour leur indiquer que ce clip n’était « pas d’intérêt général », pour leur reprocher de l’avoir diffusé et pour leur demander de ne pas recommencer à l’avenir. Le CSA a motivé cette décision par le risque de générer un trouble chez les femmes qui pourraient décider de ne pas garder le fœtus porteur de trisomie qu’elles attendraient.
Informés de cette censure, six jeunes porteurs de trisomie 21, majeurs non protégés (c'est-à-dire dans le plein exercice de leurs droits d’adultes), viennent de déposer un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat. Ils n’ont pas pris d’avocat. Une des jeunes actrices du clip, mineure de 16 ans, s’est jointe à eux par l’intermédiaire de sa mère. C’est une première dans l’histoire de la Justice. Ordinairement, on parle, on agit et on pense pour les personnes en situation de handicap mental, réputées « incapables »… et donc sans voix. Le CSA explique même, dans sa décision, que la parole des personnes trisomiques ne peut être diffusée à la télévision que dans des émissions « encadrées et contextualisées » !
Ni le clip, ni ces jeunes ne font la moindre allusion à l’Interruption Médicale de Grossesse. Les 7 requérants ignorent tout de cette problématique : eux, ils sont vivants, ils ont une conscience aigüe de leur handicap (« j’ai mal » dit l’un d’eux), ils demandent juste leur place dans la société et des regards bienveillants, au lieu de la curiosité appuyée ou du rejet qu’ils perçoivent trop souvent. Aujourd’hui, ces jeunes exercent directement leur droit de prendre la parole, parce que, selon leurs propres mots : « C’est un peu difficile pour les trisomiques » ; « Il faut les écouter quand ils parlent ». Et, comme l’explique Jean-Baptiste : « Moi je ne me défends pas tout seul devant les méchants. Si ils m’embêtent, je préfère un juge ».
Afin d’éviter toute manipulation, leur consentement a été recueilli en dehors de toute pression. La preuve en est apportée au Conseil d’Etat sous la forme de l’enregistrement vidéo intégral de leurs propos durant 2h30. Ces jeunes ont le droit d’être vus et entendus sur des chaines publiques sans être stigmatisés encore et toujours. Ils veulent juste être écoutés, reconnus, acceptés sans restriction, ni gêne, ni condescendance : ils demandent au Conseil d’Etat le droit d’être des citoyens à part entière."