Nous remercions l’association Una Voce de nous autoriser à publier des extraits des excellents commentaires des cinq pièces grégoriennes du dimanche ou de la fête à venir.
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La fête des saints Apôtres Pierre et Paul du 29 juin est une des plus grandes fêtes de l’année. C’était autrefois fête d’obligation et un jour férié, mais elle ne l’est plus en France depuis le concordat de 1801, et la solennité doit obligatoirement être reportée, dans l’ancien ordo de 1962, au dimanche suivant.
Ces deux saints sont vraiment les colonnes de l’Église : celui qui en a été fait le chef par Notre Seigneur lui-même, et celui qui l’a répandue dans le monde entier.
Même s’ils ne sont pas réellement morts le même jour, tous deux ont arrosé de leur sang cette ville de Rome qui allait devenir pour toujours la Ville éternelle, la capitale de la chrétienté, et l’Église ne les sépare pas dans le culte qu’elle leur rend. On notera cependant que tous les textes de la messe se rapportent uniquement à saint Pierre. En effet dans les premiers siècles, cette fête comportait deux messes dédiées l’une à saint Pierre, l’autre à saint Paul ; puis la deuxième messe fut reportée au lendemain 30 juin, appelé maintenant ” commémoration de saint Paul “.
Saint Pierre, premier Pape, parle au nom du Christ qui lui a communiqué son infaillibilité doctrinale. Aussi n’est-ce pas la chair et le sang qui le guident, mais le Père céleste qui ne permet pas non plus que les portes de l’enfer prévalent contre l’Église, dont il est le fondement.
Saint Pierre en recevant les clefs est préposé au « royaume des cieux » sur terre, c’est-à-dire à l’Église, et règne au nom du Christ qui l’a investi de sa puissance et de son autorité suprême. Les noms de S. Pierre et de S. Paul ouvrent la liste des apôtres au Canon de la Messe. Avec l’Église qui ne cessait d’adresser des prières à Dieu pour Pierre, prions pour son successeur, le serviteur de Dieu, notre Saint Père le Pape (Canon de la Messe).
Introït : Nunc scio vere
Le texte de l’Introït est tiré du livre des Actes des Apôtres, et plus précisément du récit de la libération miraculeuse de saint Pierre qui avait été emprisonné par le roi Hérode. On sait qu’un ange lui apparut dans sa prison pendant la nuit, lui ordonna de se lever, de s’habiller et de le suivre. Saint Pierre obtempéra, à moitié endormi, croyant encore rêver. Toutes les portes de la prison s’ouvrirent devant eux et ils se retrouvèrent dans la rue. C’est alors que saint Pierre reprit conscience et prononça ces paroles :
Nunc scio vere, quia misit Dominus Angelum suum : et eripuit me de manu Herodis, et de omni exspectatione plebis Judæorum.
Maintenant je sais vraiment que le Seigneur a envoyé son ange ; il m’a arraché aux mains d’Hérode et à l’attente du peuple juif.
La mélodie avec ses montées pleines d’élan et ses finales douces et mystiques exprime bien l’émerveillement et la reconnaissance de saint Pierre pour le grand miracle qui venait de s’accomplir. Cet Introït est accompagné du premier verset du psaume 138 qui est souvent utilisé aux fêtes des Apôtres :
Domine probasti me, et cognovisti me : tu cognovisti sessionem meam, et resurrectionem meam.
Seigneur vous m’éprouvez et me connaissez, vous savez quand je m’assieds et quand je me lève.
Graduel : Constitues eos
Le texte du Graduel du 29 juin ne concerne pas seulement saint Pierre, mais les apôtres en général. Il est tiré du psaume 44 qui est très utilisé dans la liturgie, et que nous avons déjà rencontré notamment au temps de Noël. C’est un poème nuptial qui célèbre les noces du roi d’Israël, et qui se divise en deux parties : l’éloge du roi et l’éloge de la reine. Mais ce psaume est messianique ; le roi d’Israël est la figure du Christ et son épouse est la figure de l’Église. Les versets utilisés ici sont pris dans l’éloge de la reine et ils évoquent plus spécialement la renommée que lui apporteront ses fils :
Constitues eos principes super omnem terram : memores erunt nominis tui Domine. Pro patribus tuis nati sunt tibi filii : propterea populi confitebuntur tibi.
Pour bien comprendre ce texte, il faut replacer ses versets dans l’ordre du psaume, qui a été modifié, en lisant la troisième phrase avant les deux premières, ce qui donne :
Pour remplacer vos pères des fils vous sont nés, vous les avez établis comme chefs sur toute la terre ; ils garderont le souvenir de votre nom. C’est pourquoi tous les peuples vous loueront.
De plus dans ce Graduel non seulement la liturgie a modifié l’ordre des versets, mais elle a ajouté à la fin de la deuxième phrase le mot Domine qui ne figure pas dans le psaume. Si bien que ce n’est plus à la reine ou à l’Église que l’on s’adresse, mais à Notre Seigneur. C’est lui qui a établi ses apôtres comme chefs sur toute la terre pour faire connaître son nom. La succession apostolique fait remplacer les pères par leurs fils spirituels pour inviter tous les peuples à la louange divine.
La mélodie, comme celle de tous les Graduels, est faite de formules que l’on retrouve souvent, mais l’adaptation au texte est parfaite, expressive et élégante. Elle est très ornée, bien entendu, mais ne comporte pas de très grandes vocalises, sauf sur le mot patribus au début de la deuxième partie, avec un crescendo enthousiaste vers le sommet de la pièce, suivi d’une belle descente dans le grave à la fin de la phrase.
Alléluia : Tu es Petrus
Le texte du verset de l’Alléluia du 29 juin nous ramène à saint Pierre. Il s’agit cette fois d’un passage de l’Évangile très célèbre, puisque c’est la réponse de Notre Seigneur à la profession de foi du chef des apôtres à Césarée de Philippe.
Tu es Petrus, et super hanc petram ædificabo Ecclesiam meam.
Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église.
Nous retrouverons ce même texte à la Communion, et on le retrouve également dans une petite antienne des Vêpres qui est souvent chantée comme prière pour le pape notamment au Salut du Saint Sacrement. Ce texte a également été mis en musique par de nombreux compositeurs.
La mélodie de cet Alléluia est une mélodie type que nous avons déjà rencontrée à plusieurs reprises, notamment au temps de Noël et tout récemment à la fête de la Nativité de saint Jean Baptiste. Elle est solennelle et affirmative, mais ici la formule initiale est un peu écourtée à cause de la brièveté du texte.
Offertoire : Constitues eos
Nous retrouvons dans l’Offertoire du 29 juin le même texte que dans la première partie du Graduel, tiré du psaume 44, mais ici nous avons le texte exact du psaume, tandis que dans le Graduel la deuxième phrase était tronquée, et on y avait ajouté le mot Domine.
Constitues eos principes super omnem terram : memores erunt nominis tui, in omni progenie et generatione.
Vous les établirez chefs sur toute la terre : ils garderont le souvenir de votre nom d’âge en âge.
Cette prière peut donc s’adresser aussi bien à Notre Seigneur qu’à l’Église mais, n’est-ce pas, c’est tout un. Il s’agit toujours des Apôtres et de leurs successeurs dont la suite se poursuit sans interruption jusqu’à la fin des temps. Ils ont bien besoin de nos prières.
La mélodie assez complexe est très ornée, presque toutes les syllabes sont chargées de neumes. Elle est pleine de mouvement et de dynamisme sauf la vocalise finale de la dernière syllabe qui s’apaise et se termine de façon statique et contemplative.
Communion : Tu es Petrus
Les chants du propre de la messe du 29 juin comportent peu de textes, puisque l’Offertoire reprenait celui du Graduel, et celui de la Communion est le même que celui de l’Alléluia, tiré de l’Évangile.
Tu es Petrus, et super hanc petram ædificabo Ecclesiam meam.
Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église.
Mais la mélodie est très différente de celle qui ornait le même texte dans l’Alléluia. Nous n’avons ici qu’une petite antienne toute simple et légère, une corde de récitation avec quelques broderies. Les musiciens pourront noter qu’elle est pentatonique c’est-à-dire qu’il n’y a pas de demi-ton. Mais c’est quand même le Seigneur qui parle, et sur cette structure mélodique très simple les neumes assez chargés apportent une certaine solennité.