Interrogé dans Valeurs Actuelles, Stéphane Bern déclare :
[…] C’est toujours la France périphérique qui est abandonnée. Je suis convaincu qu’il faut sauver le Grand Palais, dont la rénovation coûtera plus de 400 millions d’euros. Mais on ne peut, au regard de ce chiffre, accepter que soient accordés seulement 22 millions d’euros pour les petites églises du reste du pays. Outre Notre-Dame de Paris, de nombreuses cathédrales sont en mauvais état. Même la Madeleine. Le curé m’a emmené dans les combles, au deuxième étage, ça peut prendre feu à tout instant ! Je ne sais pas si on se rend bien compte à quel point notre patrimoine est en mauvais état.
La loi Élan d’aménagement du territoire, voulue par Emmanuel Macron, va selon vous poser de gros problèmes. Lesquels ?
Elle souhaite accorder plus de pouvoir aux maires. Faut-il leur faire confiance ? Ah non, pas à tous ! Certains ont mauvais goût. Je le vois pour le Village préféré des Français : j’ai de plus en plus de mal à trouver des villages où il n’y a pas de verrue. C’est d’autant plus regrettable que les jolis villages sont souvent les plus florissants. Le patrimoine, ce n’est pas un coût, c’est un investissement. Nous sommes censés être en pleine période de sensibilité écologique, et on continue de défigurer notre patrimoine et nos sites naturels.
À ce propos, que pensez-vous de la prolifération des éoliennes ?
L’écologie n’est pas étanche à l’influence des lobbys. L’industrie des éoliennes paie des paysans pour qu’ils en installent dans leurs champs. Ces machines dégradent la flore et la faune, leurs pales tuent des oiseaux parfois rares. Au mois de mai, j’ai survolé la Beauce avec le président de la République. Je lui ai dit : « Regarde comme ce pays est couvert d’éoliennes. » Il m’a répondu : « Oui, je crois que les Français n’en veulent plus. » Les Français n’en peuvent plus de voir leurs paysages défigurés ! Veut-on devenir un pays laid ? […]
Ressentez-vous, au cours de votre mission, comme un petit malaise avec l’identité chrétienne de la France ?
Oui, on a un problème avec l’origine chrétienne de la France. La grande bêtise, c’est de ne pas avoir réussi à dire que l’Europe était chrétienne. Une fois que c’est dit, on peut avancer, mais nier son propre passé et sa propre histoire, cela empêche d’avancer. Je pense qu’on pourra avancer d’autant plus facilement que le port d’attache est solide. Le port d’attache, c’est l’identité judéo-chrétienne de la France. À partir du moment où on l’assume, on peut dire qu’on peut sauver toutes nos églises mais aussi d’autres monuments et d’autres édifices religieux. Moi, je n’appartiens à aucune communauté, et je déteste le communautarisme. La seule chose que je reconnais, c’est la communauté nationale et l’amour de mon pays. On sauve des églises, des églises protestantes, des synagogues, une mosquée à Mayotte…
Vous avez souvent été au contact d’hommes d’Église. Que vous disent-ils ?
Nous avons un problème en France, avec la loi de séparation des Églises et de l’État. Il y a une méfiance, on se regarde en chiens de faïence, tout cela est d’une hypocrisie folle. On dit qu’il ne faut pas faire payer l’entrée d’une cathédrale, mais ce que me disent les archevêques, c’est que si on entre par la porte de derrière, on paye un droit d’entrée pour visiter la tour, la sacristie, la crypte, le trésor… donc on trouve des dérogations. Soyons francs, en dehors des heures de messe, faisons un prix d’entrée ou une contribution volontaire, par exemple. Le recteur de Notre-Dame, Mgr Chauvet, avec qui j’ai beaucoup parlé, était en privé tout à fait d’accord avec mon idée. Mais j’ai compris son problème : si on fait payer un prix d’entrée, qui va percevoir l’argent ? C’est l’État, qui va le mettre dans cette grande caisse qu’est le Trésor public, et on ne le reverra plus jamais pour rénover. […]