Marie Philippe, responsable du site www.ivg.net, a publié le 11 septembre une tribune dans Valeurs Actuelles :
"La loi Vallaud Belkacem sur « l’égalité hommes/femmes » qui vient d’entrer en vigueur le 3 août 2014 veut non seulement banaliser un peu plus l’avortement mais recèle en son sein une disposition particulièrement inquiétante pour la liberté d’expression de ceux qui mettent en garde les femmes tentées par l’IVG au sujet de sa gravité tant sur le plan physique que psychologique. Action dont le site www.ivg.net s’est fait la spécialité grâce à sa bonne position sur les moteurs de recherche.
A l’occasion de la première lecture au Senat de cette loi, un groupe de sénateurs socialistes avait déposé et fait voter avec le soutien du gouvernement un amendement qui vise à étendre le délit d’entrave à l’IVG à ceux qui feraient « des pressions morales et psychologiques, à l'encontre des femmes venues y subir ou s’informer sur l’IVG ». Ainsi le nouvel article L2223-2 place sous la menace d’une peine correctionnelle (2 ans de prison !) ceux et celles qui feraient une information « non conforme » sur l’ivg.
Pour motiver son amendement qui a reçu le soutien total de Mme Belkacem, voici ce que disait au Sénat le 16 septembre 2013 la sénatrice Rossignol (PS) :
J'ai recueilli, hier, le témoignage d'une femme de 40 ans ayant eu recours à l'IVG. Elle a dû attendre trois heures dans une clinique pour voir un gynécologue, qui lui a fait subir une échographie avec son et image en s'écriant « Oh ! Le beau bébé ! ». Je vous épargne les détails sordides sur l'IVG médicamenteuse puis le curetage et les remarques désobligeantes d'un autre praticien. Je me suis interrogée. Je ne dispose pas de statistiques, mais suis convaincue qu'un tel cas n'est pas isolé. Nous défendons un amendement relatif au délit d'entrave à l'IVG. Je me suis demandée s'il ne faudrait pas l'étendre aux équipes médicales.
On pressent dans cette incroyable intervention, que la simple évocation par un médecin ou un tiers auprès d’une femme enceinte d’un « accueil possible de la vie » risque de devenir de plus en plus problématique …
Le lendemain Mme Rossignol tentait de rassurer les sénateurs devant l’ambigüité de son texte « Pour qu’il n’y ait pas de confusion, je précise que cet amendement ne concerne pas les actions pouvant être menées sur internet. Mme la ministre aura peut-être l’occasion de revenir sur ce sujet qu’elle a, me semble-t-il, déjà évoqué, hier, dans son intervention. Notre proposition est restreinte aux seules manifestations physiques ayant lieu hors des murs des hôpitaux »
Cela n’empêche pas Mme Valaud-Belkacem de déclarer triomphalement sur le site l’express.fr du 31 juillet « Et puis, cet autre frein auquel sont confrontés les femmes, ces sites Internet qui, sous couvert de neutralité, font en réalité du prosélytisme anti-IVG et ont pour objectif de dissuader les femmes de faire usage de leur droit dans les premières semaines, alors même que le délai est légalement contraint. La loi que je viens de faire adopter prévoit de sanctionner désormais cette entrave à l'information. La loi de 1975 prévoyait déjà de sanctionner l'entrave physique à la pratique d'une IVG, ces gens qui se postent devant les cliniques ou les hôpitaux pour empêcher les femmes d'y pénétrer. Mais, en 1975, on ne connaissait par Internet. Il est aujourd'hui avéré que la principale pression psychologique faite aux femmes, c'est sur Internet qu'elle a lieu. Le fait d'empêcher une femme d'accéder à une information neutre et fiable sur l'IVG sera désormais poursuivi.
On peut mesurer maintenant l’incroyable duplicité de Mme Belkacem et ses amies qui prétendent avant le vote que la loi que l’information sur internet restera libre mais qui après sa promulgation veulent en découdre avec les sites comme www.ivg.net qui tentent de dissuader les femmes de recourir à l’IVG. La mauvaise foi est encore flagrante quand Mme Belkacem prêtant que c’est la loi Veil de 1975 qui a institué le « délit d’entrave », alors qu’il s’agit en fait de la loi Neiertz de 1993 (du nom de la proposition de la députée communiste Neiertz).
L’extension à « l’information » du délit d’entrave crée donc maintenant dans l’indifférence générale une atteinte caractéristique au niveau des libertés fondamentales et des droits constitutionnels car :
- la définition de l’incrimination pénale est particulièrement imprécise avec une lourdeur de peine disproportionnée.
- la loi porte atteinte à la liberté de toute personne de communiquer des informations sur la grossesse et sur l’avortement en les « menaçant » ;
- et elle porte atteinte au droit des femmes à recevoir des informations sur leur grossesse et sur l’avortement fussent-elles dissonantes par rapport au discours officiel."