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Pays : Syrie

Syrie : deux villes gardiennes de la chrétienté

Syrie : deux villes gardiennes de la chrétienté

Antoine de Lacoste poursuit le récit de son périple en Syrie :

Quittant Alep et le merveilleux Mgr Jeanbart, nous roulons vers la Vallée des Chrétiens où aucun islamiste n’a pu pénétrer. Mais auparavant, un détour par Homs et Hama s’impose. Homs aussi a terriblement souffert de la guerre. Sur des kilomètres, des carcasses d’immeubles éventrés nous accompagnent. Le centre-ville chrétien a subi bien des dommages et, si l’église Mar Elias est restaurée, son cimetière témoigne de l’ignominie des islamistes : toutes les croix des tombes ont été méthodiquement brisées. Le prêtre nous montre fièrement le beau tombeau de saint Elian et un cycle de fresques découvertes par hasard en 1974. Le symbole de la ville est l’église de la ceinture de la Vierge. Remise à saint Thomas par la Sainte Vierge, elle fut ensuite divisée et l’on retrouve des fragments en plusieurs endroits du monde, dont Homs. Elle est soigneusement cachée et l’on ne peut la voir mais on sait qu’elle est là.

Ambiance différente à Hama, ville où les islamistes sont chez eux. Beaucoup de femmes ont le visage entièrement couvert, mais nous croisons aussi des chrétiennes et des alaouites têtes nues. Hama connut une grande révolte islamiste menée par les Frères musulmans en 1982. La répression fut impitoyable et le bilan fut au moins de 30.000 morts. On prête à Hafez el-Assad ce mot terrible et prémonitoire : « Nous sommes tranquilles pour trente ans. »

Il faut maintenant aller dignement fêter les gardiens de la chrétienté : des combattants tout d’abord et le Crac des Chevaliers ensuite.

Deux villes symbolisent l’héroïque résistance de volontaires chrétiens que les islamistes ne purent jamais vaincre : Mhardeh et Sqelbieh. Deux hommes hors du commun ont rassemblé des centaines de volontaires et organisé la résistance : Simon al-Wakil et Nabel Alabdalla. C’est ce dernier que l’on devait rencontrer à Sqelbieh. Il a dû partir avec ses hommes dans le désert combattre des résidus de Daech car l’hydre a encore des soubresauts. Nous lui pardonnons…

D’autres combattants nous reçoivent. Pendant des années, ils se sont battus pour défendre leur ville sous les bombardements et les assauts furieux d’Al-Nosra, cette sinistre milice ravitaillée en armes et argent par le Qatar, l’Arabie saoudite, la Turquie, les États-Unis et la France. Honte sur nous.

Ils nous montrent fièrement l’église qu’ils sont en train de construire. Sa coupole fait penser à celle de la basilique Sainte-Sophie, en plus petit. Un combattant, colosse barbu tatoué d’une croix sur l’avant-bras, sourit :

« C’est quand Erdoğan a transformé Sainte-Sophie en mosquée que nous avons eu l’idée de cette coupole et du nom de notre future église, Sainte-Sophie bien sûr. »

Cette église est destinée à rendre hommage aux 178 combattants chrétiens de Sqelbieh morts au combat. Chacun aura sa plaque. On construit donc encore des églises en Syrie et ces hommes n’ont aucunement l’intention de partir vers les chimères de l’Occident. Mgr Jeanbart a raison : il faut garder l’espérance. Une illustre gardienne de la chrétienté nous attend maintenant : la forteresse symbole des croisades, le Crac des Chevaliers.

C’est un spectacle grandiose. Occupée quelque temps par les islamistes, elle fut libérée par l’armée syrienne et n’a pas trop souffert des combats. C’est avec émotion que nous franchissons la porte et visitons ces formidables remparts, ces salles voutées, intactes, immenses, et la chapelle ornée de son étonnante chaire en pierre. Nous passons devant un assemblage de dalles, formant une pensée pour les soldats syriens égorgés à cet endroit.

Au loin, nous apercevons le donjon du Chastel-Blanc, avec qui le Crac échangeait des signaux. La chute du Crac eut lieu en 1271, par traîtrise et jamais par la force. Alors, nous saluons les cinquante derniers moines-soldats qui défendirent jusqu’au bout celui que Lawrence d’Arabie qualifia de « plus beau château du monde ».

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