La candidate du camp Démocrate, portée par les médias et l’univers du showbiz, était censée capitaliser sur les minorités. La victoire de Trump a dynamité cette stratégie. Si l’Amérique est divisée, le 47ème président des Etats-Unis bénéficie d’un socle populaire inédit pour un candidat Républicain. Commentaire du père Danziec dans Valeurs actuelles :
Cette vague rouge, personne ne l’avait vue venir. C’est du moins la musique que tentent de faire entendre les médias mainstream depuis la réélection du candidat Républicain. S’ils parlaient la langue de l’Eglise, on dirait que la victoire de Trump leur fait perdre leur latin. Mais devant la débâcle incontestable du camp démocrate – et par là de la stratégie de la candidate Kamala Harris – un certain nombre d’observateurs progressistes refusent d’expliquer cet échec qui serait à mettre essentiellement sur le compte de la bêtise des votants. Raphaël Enthoven évoque ainsi sur X la servitude volontaire du peuple américain : « On ne s’étonne pas assez du fait qu’on puisse être un corrupteur actif, un délinquant fiscal, un autocrate raciste et se faire réélire quand même » écrit-il, entre autres choses, au long d’un copieux message. Laure Murat, à travers une tribune publiée dans Libération, tonne : « La “plus grande démocratie du monde” se livre à la dictature annoncée ».
Le refrain du peuple qui vote mal, les chantres de la démocratie savent le reprendre à gorge déployée lorsque les résultats les dérangent. Les faits sont là pourtant. Imperturbables et incontestables. Alors que tous les bulletins de vote n’ont pas encore été dépouillés, la candidature de Donald Trump a fédéré sur elle plus de 74.263.000 d’électeurs, un record pour un candidat Républicain. Nicolas Sarkozy analysait cette victoire du vote populaire sur BFM :
« Trump a été élu parce qu’il a parlé de l’Amérique aux Américains. Kamala Harris a parlé aux noirs des noirs, aux homosexuels des homosexuels, aux femmes de l’avortement, aux latinos des latinos. Où était le pays ? Où était la grandeur de l’âme nationale ? Où était la flamme nationale ? Où était l’espérance ? C’était une addition de communautés à qui on a cherché à faire plaisir. Voilà la réalité. Et bien en France, ça sera le même résultat. Il faut parler de la France aux Français. »
S’il faut parler pour être élu, l’expérience du pouvoir aura appris à notre ancien Président qu’il faut en outre agir pour le rester…
L’Inflation. L’immigration. Le wokisme.
« Parler de l’Amérique aux Américains » ? Une étude publiée par l’institut Blueprint à la suite des élections présidentielles, et mise en lumière par Le Figaro, souligne que trois motifs principaux expliqueraient la victoire éclatante de Trump : l’inflation, l’immigration, le wokisme. En prenant à bras le corps ces trois sujets, le candidat Républicain aurait rejoint les classes moyennes et leurs préoccupations. Le fameux pays réel qui ne demande pas grand-chose sinon d’être considéré et compris dans son quotidien. Un slogan valant mieux parfois qu’un long discours, ce dernier s’affichait lors des plages publicitaires de compétitions sportives : « Kamala Harris est pour iel/ellui. Le président Trump est pour vous. »
N’en déplaise à Enthoven, les petits et les sans-grades – et, je le crois, le bon sens populaire tout court – ne demandent pas aux candidats un certificat de bonne conduite et de probité morale. Il réclame une capacité de gouvernement qui soit en mesure de les rendre fiers. Cette fameuse « flamme nationale » évoquée par Sarkozy.
Cette flamme, Ernest Renan en parle dans son célèbre discours Qu’est-ce qu’une nation ? prononcé à la Sorbonne en 1882. Quelle est-elle ?
« Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire, voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple ».
Oui, la souveraineté fondamentale d’une nation se manifeste dans sa culture et la pérennité de son histoire : « Avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore ». La nation représente ce tabernacle institutionnel contenant en son sein un peuple qui, ayant pris conscience de lui, s’aime lui-même et entend exister comme une réalité objective à ses propres yeux. Autrement dit, elle est « Une communauté de destin enracinée dans un héritage commun » selon la formule de Taine. Nos politiques devraient s’interroger avec sérieux sur ces concepts incarnés. On nous serine le “vivre-ensemble” sans travailler aux fondations qui permettraient de réellement vivre en paix. Comment prendre plaisir à vivre en commun quand nous n’avons pas même l’idée du bien en commun ?
L’enjeu de la continuité civilisatrice d’une nation
Réveiller le souvenir des gloires du passé afin d’essayer d’en faire encore est sans doute l’une des expressions de la charité politique. Cette piété nationale n’est pas un accessoire du sentiment national mais bien plutôt la condition de sa survie. Elle est œuvre de justice et gage de fierté. Grave danger que de se montrer désinvolte ou indifférent à l’égard du patrimoine moral et intellectuel de sa nation. Kamala Harris en fit les frais à ses dépens. A faire fi de ses racines, comment ambitionner d’offrir des fruits ? Si l’on n’honore pas, on commence à négliger et l’on court alors le risque de se retrouver désarmé, plus vite qu’on ne le pense, devant la barbarie.
Beaucoup se posent la question de savoir si l’on peut encore, si l’on peut toujours, attendre du christianisme les énergies par lesquelles il a tant de fois dans le passé, guéri, voire ressuscité des nations. Cette inquiétude, légitime, mériterait cependant d’être remplacée par une certitude plus stimulante : la continuité civilisatrice de notre nation ne passera que par la réappropriation d’un christianisme retrouvé et renouvelé. Libre à chacun de s’en convaincre. Et, surtout, d’y contribuer.