Le 20 novembre, trois mineurs vivant avec leurs parents dans une ferme isolée au cœur d’une forêt des Abruzzes, en Italie, ont été placés sous tutelle par le tribunal pour enfants de L’Aquila, suite à un contrôle effectué après une suspicion d’intoxication aux champignons. Ce contrôle a révélé un logement dépourvu d’eau courante, d’électricité et de chauffage, ainsi que l’absence de vaccination et de scolarisation des enfants.
L’ordonnance du tribunal, accompagnée d’une motivation détaillée, mentionnait parmi les principaux motifs d’intervention l’isolement des enfants, jugé préjudiciable à leur droit fondamental à la vie sociale et au développement psychosocial. La décision a suscité une vive réaction, notamment de la part de membres du gouvernement Meloni qui ont critiqué son bien-fondé et soulevé des doutes, provoquant un affrontement direct avec la justice des mineurs.
« Je ne peux cacher ma perplexité face à la décision prise », a déclaré l’archevêque Bruno Forte, ordinaire du diocèse de Chieti-Vasto, où l’affaire s’est déroulée.
« Un dialogue aurait pu être mené avec détermination. Je m’interroge sur la proportionnalité entre les agissements des parents et la mesure prise. »
Giorgia Meloni et le ministre de la Justice Carlo Nordio ont discuté de la question, envisageant la possibilité d’envoyer des inspecteurs ministériels à L’Aquila – une initiative qui, bien que relevant des prérogatives de l’exécutif, a été perçue par beaucoup comme une tentative d’influencer la justice des mineurs. Le vice-Premier ministre Matteo Salvini a qualifié la décision des juges de « honteuse », affirmant que l’intervention de l’État avait empiété sur le domaine de l’éducation privée.
Face au silence de la Conférence épiscopale italienne sur la question, Mgr Forte a exprimé une position modérée mais claire, se déclarant « perplexe » par l’issue de la procédure. Il a exhorté les institutions à « reconnaître la place légitime de la famille et de l’autorité parentale », tout en affirmant la nécessité d’agir « au service du bien supérieur des enfants ». Sa prise de position a donné une résonance particulière à l’affaire, l’inscrivant également dans le débat éthique sur les rapports entre l’autorité publique et le rôle éducatif des parents.
La famille, d’origine anglo-australienne, composée des époux Nathan et Catherine Trevallion et de leurs trois enfants âgés de 6 à 8 ans, vivait dans une ferme isolée au cœur de la forêt des Abruzzes. Tout a commencé par un contrôle médical suite à une suspicion d’intoxication aux champignons chez l’un des enfants. Cet incident a conduit les services sociaux et les autorités compétentes à inspecter le domicile de la famille, organisé selon un mode de vie autosuffisant, déconnecté des réseaux de services essentiels.
Au cours de l’enquête, les juges ont examiné la faisabilité du mode de vie « néo-rural » choisi par les parents et son impact sur les enfants, concluant qu’un isolement total et prolongé représentait un risque réel pour leur développement psychosocial. L’ordonnance a finalement ordonné le placement des enfants.
L’affaire aborde également le droit des parents à assurer l’éducation de leurs enfants, car le tribunal, en examinant la situation des mineurs, a dû déterminer si l’absence de scolarisation relevait de l’instruction à domicile légitime ou constituait un signe supplémentaire d’un environnement inadéquat.
La question centrale est désormais de savoir si l’intervention judiciaire visait un choix de vie alternatif ou un environnement concrètement dangereux, car l’issue de cette affaire influencera la manière dont l’État abordera à l’avenir les formes d’éducation non étatiques, déjà soumises en Italie à des contrôles rigoureux et à un cadre réglementaire particulièrement restrictif.
