Bertrand Souchard, né en 1965, docteur en philosophie et maître en théologie, professeur de philosophie au lycée Ampère, et ancien professeur à l’Université catholique de Lyon, a donné une conférence à l’académie Saint Benoit, le 5 décembre 2022. La conférence (pdf 40 pages) est accessible sur ce lien.
Extrait :
[…] La crise sanitaire liée au covid a bouleversé les pays du monde entier, particulièrement ceux de l’Occident. L’Afrique, l’Inde et l’Asie (hors de la Chine) globalement, n’ont pas suivi la politique occidentale ou ont fait machine arrière. A cette occasion la question est de savoir si notre démocratie libérale n’a pas dérivé vers une tendance totalitaire. Michel Schooyans, professeur à l’université catholique de Louvain a publié en 1991 La dérive totalitaire du libéralisme. Son analyse est une critique du libéralisme économique. Le titre de notre propos Une dérive totalitaire de notre démocratie libérale ? emprunte sa formulation à cet auteur en se centrant sur une analyse politique. Après les deux ans de crise sanitaire, il s’agit de réfléchir politiquement à notre démocratie.
Pourquoi les démocraties occidentales peuvent-elles prendre un tournant totalitaire ? Certes, entre les deux nous avons une apparente opposition. Du point de vue de la terreur, des massacres et des camps de la mort, les deux totalitarismes du XXe siècle semblent encore à ce jour inégalés. La démocratie américaine a vaincu les totalitarismes communiste et nazi. Les cultes de la personnalité de Staline et d’Hitler n’ont pas eu d’équivalent parmi les nombreuses idoles de nos sociétés postmodernes. Pourtant, nous avons vu un rapprochement entre les deux eu égard à nos quatre critères : irascible, négations de la liberté, de la vérité et de Dieu. Avec la crise sanitaire, les caractéristiques du totalitarisme sont devenues plus explicites dans les « démocraties libérales ». Les tendances totalitaires de la crise sanitaire sont-elles une parenthèse ou la réinitialisation vers un monde nouveau ? « Beaucoup d’entre nous se demandent quand les choses reviendront à la normale. Pour faire court, la réponse est : jamais » nous dit Klaus Schwab. Penser qu’il n’y aura pas de retour en arrière, c’est s’inscrire dans le temps long et non penser vivre un épisode momentané, malgré l’idée d’une grande réinitialisation qui ferait table rase du passé. Si tout cela doit perdurer dans le futur, c’est que des prémices s’enracinent dans le passé. Le basculement ne vient pas de nulle part. Reprenons les quatre points en voyant leur enracinement.
L’irascible est une dimension humaine et politique à laquelle on ne peut pas échapper. Un état de nature qui serait pacifique est une chimère. Le libéralisme économique est bien une guerre, une lutte de tous contre tous selon la formule de Hobbes. Le tragique et la mort sont un élément de l’humanité, même si le progressisme voudrait refuser l’entropie du chaos, oublier la mort et préférer la néguentropie immanente du meilleur et de l’ordre. Chasser le naturel de la violence et il revient au galop par la peur, la crainte, la contrainte, l’oppression étatique.
La « démocratie libérale » progresse dans le contrôle de la population et régresse dans la liberté politique: gouvernement d’une élite, confusion des pouvoirs, souveraineté populaire entre parenthèses, refus des référendums et de la participation. Mais de quelle liberté parlons-nous ? N’est-ce pas une vision particulière de la liberté qui engendre cette dérive ? C’est ce qu’affirme Patrick Deen. La liberté du libéralisme est un désir infini, sans obstacles et sans limite. Elle serait naturelle et elle perçoit la nature et les autres hommes comme des obstacles. En fait la liberté dans le sens plus classique est une libération du vice et une nécessité de la vertu. Elle n’existe que par le déploiement et la discipline de la culture. Les bonnes habitudes s’enracinent avec autrui dans la famille, l’école, la religion. Ajoutons que l’individualisme du libéralisme est une atomisation de l’individu qui peut mieux se fondre dans les masses. Cette homogénéisation provoque le besoin d’une intervention de l’État, seul capable de protéger l’individu. Pourtant je suis moi-même, non par auto-construction solitaire, mais par un autre. La singularité de la personne est toujours relationnelle. Ainsi la liberté selon le libéralisme entraine l’esclavage des désirs et le renforcement de la contrainte de l’État.
L’idéologie et la propagande ne sont pas absentes. La raison instrumentale est primat de l’économie et de la technique, matérialiste, calcul, recherche de l’efficacité. Elle serait l’idéologie implicite de la démocratie libérale. Elle devient une servitude parce qu’elle confond les moyens et la fin. Elle devient l’esclave de l’outil et elle perd le sens et le but. La quête de la vérité disparait au profit de l’idéologie du progrès et de la transformation. Les conditions matérielles absorbent les forces de l’esprit. La raison calculante, les dispositifs annihilent la pensée gratuite et méditante. Et parce que les échanges économiques sont mondialisés et la techonologie universelle, la démocratie libérale est mondialiste accomplissant la dimension totalisante des régimes totalitaires.
Enfin les négations postchrétiennes de Dieu n’ont rien à envier, actuellement, à leurs aînées. L’absence d’obéissance à Dieu implique le renforcement d’une obéissance à l’État. Au fond le problème n’est pas de savoir si nous avons une démocratie (le peuple souverain), une aristocratie (une élite au pouvoir) ou une monarchie. En un sens la république française est un peu des trois : il y a quand même des élections ; Paris, les grands corps de l’État et les grandes écoles sont importants et le président est tout puissant. Mais la question est de savoir si est reconnue la place de Dieu. L’occident postchrétien est dans une forme d’apostasie. En France le laïcisme, à savoir la séparation de l’État et de la religion, a tendance à remplacer la laïcité, c’est-à-dire la distinction du pouvoir politique et de l’Église. Si le covidisme qui a imposé un « vaccin » ne revient pas, d’autres négations de la liberté et de la vérité comme religions immanentes pourront se développer. L’inclusion (le wokisme), une vision tronquée de l’écologie et une confiance dans la technologie sont mises en avant par Klaus Schwab pour réinitialiser le monde.
Si la démocratie d’aujourd’hui et le totalitarisme semblent des contraires, ils seraient en fait les opposés d’un même genre, prêt à se ressembler dans l’irascible, la négation de la liberté, de la vérité et de Dieu.
cadoudal
notre “démocratie libérale ” est avant tout le produit de la Révolution nihiliste;
folie suicidaire qui a proclamé la “mort de Dieu” et la fin de la Cité de Dieu.
notre démocratie libérale , c’est l’ anti France révolutionnaire , qui a déclaré une guerre à mort à la vraie
France , diffamée par assimilation au socialisme nazi, à la Bête Immonde athée.
Dieu et le Roi !
zongadar
Une phrase m’a choqué : ‘La démocratie américaine a vaincu les totalitarismes communiste et nazi’. Petite question, d’où venait le pétrole qui a permis à Hitler de traverser la France ? N’y aurait-il pas la Standard Oil derrière ? L’opération paperclip n’est-il pas une exfiltration de nazis vers les US d’où sont issus certains personnages en vue actuellement ? Ceci gâche un peu l’article car ce sont aussi là les racines de l’actualité.
philippe paternot
démocratie française: un professeur d”université appelle à abattre ceux qui votent zemmour! n’est ce pas un appel au meurtre et à la discrimination, mais rien n’advient, le gars est dans le clan du “bien”