Cofondatrice de l’école catholique hors contrat Louis-et-Zélie-Martin, à Angers, Pascale de Malet livre à Famille chrétienne son expérience :
"Notre évêque nous avait mis en garde : “Si vous faites cette école, les difficultés ne manqueront pas ; et ce sera le signe que vous êtes sur la bonne voie”. Des difficultés ? Notre route en a été jonchée, dès le premier jour. On a démarré modestement et pauvrement chez des particuliers, en septembre 2004, “avec cinq pains et deux poissons” ; c’est-à-dire quatre élèves et pas le premier centime pour payer la maîtresse, embauchée à mi-temps. Tout ça sur fond de critiques et de scepticisme, autour de nous : “Votre école est réservée à une élite, vous mettez les enfants dans un ghetto, ça ne marchera jamais…”. Pendant 7 ans, on est restés pauvres et petits : inscriptions et dons arrivant au compte-gouttes et au dernier moment, difficulté à trouver des enseignants, locaux exigus et inadaptés…
Chaque année, on se posait ces questions : “Pourquoi la mayonnaise a-t-elle du mal à prendre ?, est-il raisonnable de continuer ?” Notre conseiller spirituel nous avait dit : “Arrêtez-vous seulement si vous vous trouvez devant un mur infranchissable”. Souvent, un mur s’est présenté mais, au dernier moment, il a reculé. Alors, on a continué. Après avoir déployé une énergie considérable, nous avons enfin trouvé des locaux adaptés. Aujourd’hui, alors que les inscriptions arrivent en nombre à l’école Louis-et-Zélie-Martin, nous vérifions combien la question des locaux, qui nous a minés, conditionnait la reconnaissance de l’école, et donc sa croissance (à présent, nous avons même des listes d’attente !). Nous mesurons aussi combien grandir lentement a été une grâce. Cela nous a permis de rester humbles et de construire des fondations solides. Maintenant que les temps sont meilleurs, il faut veiller à garder le cap : faire grandir les enfants qui nous sont confiés humainement, intellectuellement et spirituellement.
Cela demande de s’appuyer sur deux piliers : la foi et le professionnalisme. Une école doit être créée puis gérée comme une entreprise. La bonne volonté de quelques parents ne suffit pas. Quand on est employeur, on ne fait pas n’importe quoi en fiscalité, comptabilité, gestion des hommes… Et sur le plan pédagogique, il faut sans cesse travailler à s’améliorer. Cela nécessite de se faire conseiller, de se former pour acquérir des compétences. Mais attention : les écoles catholiques indépendantes ne sont pas des entreprises ordinaires. Manifestement suscitées par l’Esprit Saint pour répondre à un besoin, elles appartiennent à l’œuvre de Dieu. À ce titre, elles obéissent aux lois de l’Évangile : chercher d’abord le royaume de Dieu, avoir à cœur de faire sa volonté, prier beaucoup, séparément et ensemble, pour obtenir la lumière et la “manne”, accepter de rester pauvre et petit, faire confiance à la providence… Et ne pas oublier de remercier, quand Dieu donne. C’est au prix d’un juste équilibre entre foi et professionnalisme qu’une école catholique indépendante peut grandir."