En Argentine (en France, 96% des enfants porteurs de la trisomie sont exterminés avant leur naissance) :
"Une femme souffrant d'un handicap mental peut-elle être responsable d'un groupe d'enfants? Les autorités de Cordoba (Centre-nord), deuxième ville d'Argentine, ont répondu "oui": c'est une première dans le pays et sans doute l'un des seuls cas au monde. Cette femme de 31 ans, qui a obtenu un diplôme d'institutrice de crèche et maternelle, exerce dans des crèches municipales depuis quatre ans.
Dans l'établissement où elle travaille depuis janvier, les enfants l'appellent "Noé". Quand elle ouvre la bibliothèque, ils se dépêchent de s'asseoir par terre, attentifs à chacun de ses mots. […] Elle anime l'atelier de contes dans le cadre d'un programme de stimulation précoce à la lecture. Le reste de la journée, elle est en charge d'un groupe de dix enfants, en doublon avec une collègue plus expérimentée.
Pendant trois ans elle a fait deux heures de trajet par jour pour se rendre à la première crèche où elle a été affectée. "Cela a été un grand défi. Il y avait des gens avec des responsabilités et des convictions qui pensaient que ce n'était pas possible qu'une personne trisomique travaille comme maîtresse", se souvient Alejandra Senestrari, directrice de cette structure. Mais "rapidement, nous nous sommes rendus compte que c'était sa vocation et qu'elle donnait beaucoup aux enfants".
Les parents ont confiance en Noelia. "On nous a dit qu'il y allait avoir une maîtresse trisomique et qu'il ne fallait pas avoir peur", se souvient Ariel Artino. "Moi ça m'a paru une excellente idée de donner cette opportunité" à une personne handicapée, "qu'elle puisse échanger avec les enfants".
Souvent, les trisomiques sont cantonnés à une vie d'exclusion, à des emplois protégés, à des tâches manuelles. […] Sûre d'elle malgré le handicap, optimiste et responsable, elle a conquis ses collègues de travail. Sa trisomie "n'a jamais été un handicap", fait remarquer Mme Senestrari."