Alors que Marine Le Pen avait refusé de siéger avec l’AFD au Parlement européen, le Bundestag a adopté à 348 voix pour, 344 voix contre et 10 abstentions une motion parlementaire de la CDU sur l’immigration grâce aux votes de l’AfD. Angela Merkel, l’ancienne chancelière et figure de la CDU, le SPD et les Verts fulminent contre cette première historique. Pour l’actuel chancelier Olaf Scholz, il s’agit d’«une erreur impardonnable».
Ce vote commun pourrait avoir des conséquences profondes à différentes échelles.
Cette motion non contraignante sur le durcissement de la politique migratoire allemande a été votée par les parlementaires de l’Union chrétienne démocrate (CDU/CSU, EPP), du parti libéral-démocrate (FDP, Renew) et du parti Alternative für Deutschland (AfD, ESN). Les parlementaires ont largement suivi les consignes de vote par groupe. Seule une députée de la CDU, Antje Tillmann, a voté contre la motion. Hormis deux abstentions, le groupe FDP dirigé par l’ex ministre des finances Christian Lindner a également soutenu la motion de la CDU, tandis que le groupe du Bündnis Sahra Wagenknecht (BSW), jeune parti de gauche populiste, s’est abstenu en bloc. Un vote contraire de ses dix membres aurait permis de mettre en minorité la motion de la CDU/CSU.
Depuis l’été 2024, l’AFD progresse dans les sondages et se trouve aujourd’hui proche de son niveau le plus élevé, atteint il y a un an. À plus d’un mois des élections fédérales, qui se tiendront le 23 février, la CDU/CSU voit ses intentions de vote reculer.
Friedrich Merz, le candidat favori à la chancellerie, élu en janvier 2022 à la tête du centre-droit allemand, avait remis en cause à l’été 2023 le cordon sanitaire en évoquant une potentielle coopération avec l’AfD au niveau des communes, voire des Länder, avant de reculer face aux critiques de la direction de son propre parti. Par ailleurs l’AfD a également conquis en juin 2023 le Landkreis de Sonneberg en Thuringe, qui constitue donc le premier mandat exécutif du parti.
Au plan arithmétique, la formation de majorités CDU-AfD est actuellement facilitée par la première position de la CDU dans une majorité de Länder. Seules les deux cités-États de Brême et Hambourg voient encore un parti de centre-gauche (le SPD) arriver en tête, tandis que l’AfD l’emporterait en Thuringe, au Brandebourg et au Mecklembourg-Poméranie-Occidentale.
Le Bundestag doit se prononcer vendredi sur une loi visant à « limiter l’afflux [de migrants] » (Zustromsbegrenzungsgesetz), par laquelle la CDU/CSU veut notamment mettre fin au regroupement familial pour les réfugiés ayant un statut de protection limité.
Pour Alice Weidel, la candidate à la chancellerie de l’AfD et coprésidente du parti, ce vote marque la fin d’un « cartel anti-démocratique » et constitue un « grand jour pour la démocratie ».