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France : Laïcité à la française

Vers un totalitarisme français, laïque et républicain ?

Vers un totalitarisme français, laïque et républicain ?

D’un lecteur, Thomas Jane :

« La laïcité républicaine, c’est la loi au-dessus de la foi », soutenait fin juin Valérie Pécresse dans les colonnes du Figaro (26/06/2019).

Et la grande consultation des Républicains propose en son Principe 9 :

« La laïcité est pour nous un principe essentiel de tolérance et d’exigence, dont nous sommes les défenseurs intransigeants. En effet, aucune loi religieuse ne peut et ne pourra jamais être supérieure aux lois de la République. »

Bruno Retailleau a d’ailleurs signalé dans un entretien qu’il entend défendre un projet de loi en ce sens.

Or de quoi parle-t-on ?

La constitution de 1958 déclare que « La France est une République [… qui] respecte toutes les croyances. »

La Déclaration de 1789, à laquelle renvoie notre constitution, écrit que « l’Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Etre suprême, les droits suivants de l’Homme et du Citoyen » …

… et à l’article 11 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».

Or ce n’est pas la même chose de dire : « la foi ne peut troubler l’ordre public » et « la loi est au-dessus de la foi ».

En effet, en pratique, cela peut (éventuellement) revenir au même, nonobstant la latitude d’interprétation des exigences de l’ordre public. Mais sur le fond, c’est très différent : on passe du respect au rejet.

Cela peut éventuellement revenir au même car, en 2003, Pierre Mazeaud, alors membre du Conseil constitutionnel, relevait que « l’ordre public n’est explicitement mentionné qu’une fois dans nos textes constitutionnels. C’est [dans cet] article 11 de la Déclaration de 1789. » Cela laisse donc – malgré la rigueur et la finesse de notre système juridique – une certaine latitude d’interprétation au juge !

L’ordre public, poursuit Pierre Mazeaud, recouvre « le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique », mais « n’englobe pas, comme en matière administrative, “la dignité de la personne humaine” [!!], pour la raison que ce principe dispose d’un fondement spécifique dans le Préambule de la Constitution de 1946 [Ouf !!]. »

Pierre Mazeaud précise encore : l’ordre public se distingue de l’intérêt général, en « ce qu’il résulte d’une construction jurisprudentielle tendant à assurer la garantie effective de droits et principes constitutionnels », car, selon la jurisprudence du Conseil, « la prévention des atteintes à l’ordre public est nécessaire à la sauvegarde de droits de valeur constitutionnelle ».

On mesure alors mieux ce que pourrait représenter l’inscription d’un « droit constitutionnel » à l’avortement (ou plus tard, pourquoi pas ? à l’euthanasie, à la PMA, ou à la GPA). Y aurait-il en République, ou plutôt dans notre si particulière République française qui n’en est qu’une réalisation parmi d’autres, y aurait-il place à l’objection de conscience face à un « droit constitutionnel » ?

En outre, sur le plan des principes, ces deux idées (« la foi ne peut troubler l’ordre public » et « la loi est au-dessus de la foi ») reposent sur des bases radicalement différentes.

L’Observatoire de la laïcité, dans un texte de 2017 cité par le Ministère de l’Intérieur, avait déjà amorcé le saut d’une vision à l’autre :

« Aucune religion ne peut imposer ses prescriptions à la République. Aucun principe religieux ne peut conduire à ne pas respecter la loi. »

Le Ministère de la Santé et des Affaires sociales, suite à une commande de 2015 de Marisol Touraine et Ségolène Neuville, renvoie quant à lui au rapport de Michel Thierry, « Valeurs républicaines, laïcité et prévention des dérives radicales dans le champ du travail social », selon lequel « il ne peut y avoir de loi divine, de morale ou de “droit naturel” d’origine religieuse supérieurs aux lois civiles de la République ».

L’Observatoire de la laïcité présentait la même « évidence », non pas simplement d’un ordre sans-Dieu mais en réalité d’un ordre contre-Dieu (comme tous les papes depuis deux siècles l’ont annoncé et dénoncé) :

« La laïcité en France est fondée sur le même principe que la démocratie : les deux récusent qu’un fondement surnaturel puisse ou doive légitimer l’ordre politique, fondé sur la seule souveraineté du peuple des citoyens. »

Vous l’avez bien lu : il ne s’agit pas de donner un fondement naturel, mais de récuser tout fondement surnaturel.

Alors certes, l’Observatoire de la laïcité peut écrire :

« La liberté de croire ne peut en rien être limitée. La liberté de pensée dont découle la liberté de conscience comporte celle de critiquer toute idée, opinion ou croyance, sous les seules limitations légales de la liberté d’expression. La liberté d’expression des convictions religieuses peut, elle, être limitée pour garantir le respect de l’ordre public, dans les conditions définies par la loi (cf. première partie de ladite note). Le principe doit toutefois demeurer la liberté et les limitations l’exception, compte tenu des principes constitutionnels au fondement de notre République et des engagements internationaux de la France, avec lesquels ces restrictions légales doivent être compatibles. »

Mais :

  1. On récuse tout discours d’inspiration religieuse : chrétien ?, juif ?, musulman ?, grec ? (le serment d’Hippocrate !), et pourquoi pas théiste ? (Notre Déclaration de 1789 sous les auspices de l’Être suprême !) – et ce faisant, veut-on interdire toute réflexion rationnelle approfondie portée, soutenue, creusée, et affinée par une intuition spirituelle ?
  2. On ne reconnaît d’autre fondement (y compris philosophique) à l’ordre politique que « la seule souveraineté du peuple des citoyens » – mais la philosophie politique connaît depuis toujours les problématiques complexes liées à la « souveraineté du peuple » : est-elle absolue, réelle, totale, auto-éclairée, et même suffisante ?
  3. On renvoie aux « engagements internationaux de la France » … mais n’ont-ils pas été écartés ces derniers jours pour « régler » avec efficacité le cas de Monsieur Vincent Lambert ?
  4. On érige en absolu la « loi républicaine » du jour, résultant du jeu des institutions politiques, des rapports de force, des intérêts (notamment économiques), des courants de pensée, des modes, et même des émotions du moment. S’agirait-il donc d’instaurer une dictature totalitaire de la loi votée ?

Or oui, après tout, pourquoi cette loi d’aujourd’hui serait-elle un absolu, et non celle d’hier, ou celle de demain ?

Pourquoi, par exemple, la France adhère-t-elle à la Déclaration universelle des Droits de l’homme, et non à la Déclaration islamique universelle des Droits de l’homme (qui se situe dans le cadre du Coran, de la Sunna, et de la Charia) ?

Est-ce pour une simple raison culturelle (nous reconnaissons la Charte formulée selon nos cadres culturels propres) ?

Est-ce pour une simple raison « électorale » (nous reconnaissons la Charte dans laquelle se reconnaissent la majorité des citoyens) ?

Est-ce pour des raisons de fond, pour des raisons et des objections rationnelles ? – Par exemple, parce que nous pensons fondés réellement dans une nature humaine fondamentalement objet d’intelligibilité et de rationalité (et non fruit du seul hasard et de la nécessité, ni du projet de l’homme sur l’homme, ou du projet du peuple sur le peuple), les notions d’égalité de tous les hommes entre eux, quels que soient leur sexe, leur religion, leurs opinions philosophiques et politiques, leur état de développement ou d’altération organiques ou psychiques, et même si on veut le préciser, leur « genre », ou leur « orientation sexuelle » ?

Inversement, serait-il légitime de protester si une majorité votait un jour par acclamation des lois, par exemple sur le drapeau de la République, la citoyenneté de la République, la protection de la laïcité et de l’honneur républicains, ou encore la restauration de la fonction publique et la réglementation de l’accès au barreau – dans la ligne de celles qui ont été prises à Nuremberg en 1935, mais qui ne viseraient pas les mêmes « crimes » ?

Alors, si l’on examine de façon rationnelle, critique, et dépassionnée, ces questions ouvertes – mais alors seulement ! –  les autres principes proposés par l’Observatoire de la laïcité, nos Ministères, et nos partis, pourront recevoir un sens véritable – par exemple ci-après, la formulation des Républicains – et constituer la base d’une véritable France de liberté, égalité, fraternité.

Principe 3

La dignité humaine n’est pas négociable.
Toute personne humaine a un droit imprescriptible au respect.
Les libertés fondamentales – liberté d’aller et venir, d’opinion, de pensée… – doivent être préservées et respectées.
Elles sont l’honneur de notre pays et font la singularité d’un humanisme moderne.

Principe 4

Nous voulons une démocratie moderne et apaisée.
Elle doit favoriser la culture du débat public et impliquer davantage le citoyen dans les décisions qui le concernent.

Nous refusons tout dogmatisme, toute pensée unique et tout extrémisme.
Nous voulons une société de liberté et de responsabilité qui accepte la diversité des opinions et des idées.

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7 commentaires

  1. Ce problème de la foi constitutionnellement positionnée sous l’emprise de la loi est un vieux principe jacobin qui ressurgit vraisemblablement avec celui de l’islam qui a envahi notre pays. Alors on peut se poser la question suivante : nos jacobins n’ont-ils pas sciemment laissé pourrir la situation de l’immigration musulmane afin de créer le prétexte leur permettant d’éradiquer globalement toutes les fois religieuses, incluant ainsi et surtout leur ennemi séculaire qui est la religion catholique ? Il suffit de relire toutes les déclarations d’un Vincent Peillon à l’encontre du catholicisme pour s’en persuader. Une parmi cent : “Le catholicisme est incompatible avec la liberté, contrairement à l’islam”. Donc “Il faut inventer une religion républicaine, la laïcité”.
    Mais ceci est trop machiavélique et je ne suis qu’un affreux complotiste indécrottable.

  2. En fait, nous avons affaire à la République du “en même temps”, dans laquelle on déclare que Notre-Dame de Paris n’est pas un lieu de culte et où les églises peuvent être profanées en toute impunité, et où des quartiers entiers sont soumis à la charia et où toute critique de cet état de choses est considérée comme une manifestation d’homophobie passible des tribunaux et d’une lourde condamnation.
    La différence entre les deux situations : dans le premier cas, les Catholiques descendent rarement dans la rue pour casser des vitrines, incendier des voitures et caillasser les forces de l’ordre. Dans le second cas, c’est automatiquement des nuits d’émeutes, des voitures et des poubelles incendiées, des magasins dévastés et des forces de l’ordre sauvagement agressées. De plus, ce serait contrarier le Grand remplacement qui n’existe pas…
    ?????

  3. Rappel historique sur ce que peut générer la Tolerance de l’Etat envers toutes les religions sans distinction.
    Le Droit Romain a atteint son apogée sous Marc Aurele., sui fut un remarquable legislateur pour le peuple libre de Rome.
    Or, Il fut un des plus grands persecuteurs des chretiens.
    Pourquoi?
    Car toutes les religions etaient admises par l’Empire si elles acceptaient de mettre leur pincée de cendre dans la coupelle commune d’obeissance aux lois de l’Empire.
    Or une seule le refusait:
    La Religion Chretienne
    Pourquoi?
    Car au nom du commandement instauré par Jesus Christ Verbe Incarné de Dieu:
    “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés” ils prechaient l’égalité de tous les hommes en justice et la non exploitation de l’Homme par l’Homme.
    Pour les Chretiens l’Esclavage etait donc prohibé.
    Petit a petit les conversions patriciennes au Christianisme entrainait l’affranchissement de plus en plus d’esclaves et donc un impact sur l’Economie Romaine ( ah…l’argent !)
    Devant cette destabilisation de la Societe Romaine, La haine des pratricien devenant de plus en plus forte, Marc Aurele, au lieu de choisir l’Amour du Prochain mit hors la Loi, les chretiens qui par leur non acceptation de la Societe Romaine esclavagiste par les precepte de leur religion d’Amour du prochain, metait en danger toute l’organisation economique de l’Empire.
    Si on considere Notre epoque, Les droits de vie et de mort sur les plus faibles qui sont consideres comme non rentables pour la Societe et meme coutant trop cher, On retombe dans le meme schema.
    Si les Chretiens ne prennent pas les devants en agissant politiquement quand ii est encore temps pour abroger toutes les lois et les quelques articles de la 5e Constitution de la Republique qui generent ces maux sans s’occuper des lois concernant les reglementation simples de fonctionnemrnt facilitant la vie sociale materielle, Ils menent le Bon Combat .
    On ne relevera pas la France sans remettre ses articles constitutionnels ainsi que ses lois morales a l’endroit.
    C’est sous MARC-AURELE plus que sous Diocletien qu’eurent lieu les plus grandes persecutions .et pourtant ce fut un des plus grands emprereurs de Rome, Un Chef d’Etat légaliste Hors pair.

  4. sauf que la pensée microbienne est tout sauf une démocratie moderne et apaisée, c’est une dictature où l’on étouffe, où le pouvoir est confisqué par des oligarques qui se goinfrent et font crever le peuple, où on invente des lois contre la nature et donc contre Dieu. C’est le règne du dogmatisme, de la pensée unique et de l’extrémisme d’une oligarchie doublé d’une imposture qui essaie de nous faire prendre les vessie pour des lanternes

  5. Traiter du sujet n’est pas à la portée de tous mais met en évidence l’importance de bien distinguer ce qui relève de la loi et ce qui relève du supra légal.
    En France en matière religieuse, les libertés constitutionnellement garanties sont la liberté de conscience, le libre exercice des cultes et la libre expression des cultes.
    C’est pourquoi il devient très important que les “droits sociétaux” ne soient pas érigés en normes supra légales car alors on bascule dans une nouvelle religion de l’avortement, du mariage homo et bientôt PMA, GPA, euthanasie…
    On en arrive alors à criminaliser ceux qui ne pensent pas “bien” et à faire mourir des Vincent Lambert. C’est ce que font nos gouvernements successifs, méthodiquement et avec constance depuis les lois Gayssot et cie.
    On retombe alors sur tous les excès de la Révolution Française qui a érigé la loi en religion pour liquider tous ceux qui ne pensaient pas comme ses tenants. Le culte rendu à l’être suprême le 14 juillet 1790 en est la manifestation la plus symptomatique et la plus grotesque. Ce fameux “être suprême” n’étant que l’oracle cynique du totalitarisme au pouvoir.
    C’est toute cette école, avec des Vincent Peillon and co qui voudraient nous imposer cette dictature de la pensée anti chrétienne : “il faut terminer la Révolution”.
    Le drame est que nous avons beaucoup d’évêques vendus à cette idéologie mortifère. Par les exemptions fiscales, l’Eglise de France est toujours sous concordat mais avec la République de plus en plus dominée par ses réseaux occultes. C’est bien pour cela que nos éminences sont le plus souvent totalement caoutchouteuses. Ce sont nos nouveaux prêtres jureurs. Pas toucher au grisbi…surtout, le Bon Dieu…cela passe après.

  6. “Une dictature où l’on étouffe ” : c’est exactement ce que j’éprouve.

  7. « Le Règne de Dieu est le principe du gouvernement des Etats, et c’est une chose si absolument nécessaire que, sans ce fondement, il n’y a point de prince qui puisse bien régner ni d’Etat qui puisse être heureux. »
    Armand-Jean du Plessis, cardinal de Richelieu

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