Charles Gave est interrogé dans La Tribune. Extraits :
"Depuis soixante ans, coexistent deux idées européennes. La première, celle de De Gasperi, Adenauer, Pie XII et Robert Schumann, voulait recréer l'Europe catholique des XIIe et XIIIe siècles, et voyait dans l'Europe un espace de liberté basé sur le principe de la subsidiarité. En cas de problème entre deux entités, on en appelle à l'échelon supérieur et on crée des instances d'arbitrage. La seconde est celle de Jean Monet et des technocrates français qui ont décidé de créer un État pour faire renaître l'Empire romain afin de s'opposer aux Américains et d'empêcher la domination allemande. Cette vision l'a emporté. Évidemment, la volonté d'augmenter leur pouvoir personnel existe aussi. Ces technocrates pensent que leur rôle est d'assurer le bonheur des peuples malgré eux. Ils ne croient pas à la liberté individuelle. Il suffit d'observer les institutions européennes : il n'y a pas de séparation des pouvoirs. […]
Depuis la présidence Giscard, la France est gouvernée par une classe administrative qui, de droite comme de gauche, est représentative de cette idée technocratique. Les référendums sur Maastricht ou sur la Constitution européenne ont montré que le peuple n'acceptait pas cette dérive. Mais il l'admettait. À présent, les gens se rendent compte que cela ruine le pays. La prochaine étape sera donc de se débarrasser de cette classe administrative. Mais j'ignore comment. […]
Nombre d'économistes mettent en garde sur les conséquences de la fin de l'euro. Qu'en pensez-vous ?Je ne suis pas très inquiet. Ceux qui vous expliquaient que l'euro allait rendre les femmes plus belles et les oiseaux plus chantants, comme Alain Minc et Jacques Attali, nous expliquent à présent que, si l'on quitte l'euro, ce sera le désastre absolu. Ils se sont trompés. Ils n'ont rien vu, rien compris. Pourquoi leur donner de la crédibilité sur l'après-euro ? C'est comme demander au général Gamelin [chef des forces françaises en 1940, Ndlr] de diriger le débarquement en Normandie. Concrètement : le système bancaire européen est en faillite, le taux de chômage, Allemagne exceptée, est historiquement élevé, la moitié des États européens n'ont plus accès aux marchés financiers dans des conditions normales, la Bourse de Paris n'a pas cessé de reculer depuis la création de l'euro. En 2000, le niveau du CAC était deux fois plus élevé qu'aujourd'hui. Pourquoi ? Parce que l'euro conduit à une mauvaise allocation des capitaux et fait passer l'argent de ceux qui le gagnent à ceux qui ne le gagnent pas. Ceci conduit toujours à un marché vendeur qui, d'ordinaire, ne dure pas plus d'un an et demi. Mais ce marché vendeur dure en Europe depuis dix ans parce que le secteur public, la BCE et les politiques dépensent l'argent du futur pour maintenir une unité qui ne tient pas la route. Le désastre n'est-il pas suffisant pour que l'on passe à autre chose ?Comment jugez-vous le quinquennat de Nicolas Sarkozy ?
Pour faire des réformes, il faut faire comme Madame Thatcher : être un gouvernement de conviction et pas de consensus. Nicolas Sarkozy a suivi une politique schizophrène : il tenait un discours de réformes et il a essayé de séduire ses ennemis naturels. Comme disait Pompidou : si vous essayez de gouverner avec vos opposants, vous allez perdre vos partisans. Ces cinq ans ont été un échec total, à part la réforme de l'université. Les impôts ont augmenté, les déficits et le poids de l'État aussi. Il n'y a pas eu de réformes. […] L'État chinois réalise 30 % du PIB du pays. En France, c'est 55 %. Il faut que notre mur de Berlin tombe, l'État doit sortir des domaines où il n'a rien à faire. Sinon, c'est le FMI qui le fera pour nous. D'après mes calculs, le système français atteindra ses limites en 2013 ou 2014."
lavandin
…du vent, des reformes en trompe l’oeuil, ou des reformettes qui ne traitent pas les problèmes de fond , un accroissement considérable et inutile de l’endettement, une grand emprunt dont il ne savait quoi faire, une trahison de l’expression du peuple sur la constitution européenne ….echec complet sur les problèmes de l’immigration et de l’insécurité…..Non, il n’est vraiment pas l’homme qui va sauver la France . Certes il s’agite…mais diriger la France ce n’est pas faire du cinéma
l'anarcho
L’UE est un hold-up contre les souverainetés… contre les peuples… par une bureaucratie supranationale à la solde du grand capital mondialisé…
Charles-Henri
Ceux qui ne connaissent pas cet économiste trop méconnu peuvent aller faire un tour sur son excellent blog, dont le nom reprend le titre de son dernier ouvrage dont je conseille la lecture à ceux qui veulent comprendre ce qui se passe aujourd’hui :
http://lafaillitedeletat.com/
Ludo
Excellentissime
A diffuser
Merci
SD-Vintage
“Parce que l’euro conduit à une mauvaise allocation des capitaux et fait passer l’argent de ceux qui le gagnent à ceux qui ne le gagnent pas.”
mais pas à cause de l’incurie des dirigeants européens, et que “Nicolas Sarkozy a suivi une politique schizophrène : (…) Ces cinq ans ont été un échec total, à part la réforme de l’université. Les impôts ont augmenté, les déficits et le poids de l’État aussi. Il n’y a pas eu de réformes”
Avant l’euro, la France était super bien gérée
Noe
Il devrait ajouter que les modèles économiques chinois fondés sur l’offre monétaire par les banques centrales et la manipulation des taux d’intérêt ne sont pas très différents du modèle européen dont il partage d’ailleurs les mêmes affres nés de l’éclatement des bulles du crédit dans des économies dirigées par les banques et des Etats de nature totalitaires. La conjoncture reste désespérément stagnante aux Etats-Unis , tandis que la Chine est touchée à son tour par la crise immobilière, l’effondrement de ses exportations et le fort recul de son indice de production industriel. Deux des plus importantes provinces chinoises ne peuvent plus faire face au paiement des intérêts de leur dettes. Nous sommes en train de découvrir avec horreur que la croissance est en panne partout, du fait de l’échec des politiques de relance par l’offre monétaire et du centralisme démocratique fondé sur la toute puissance de la norme censée produire le meilleur des mondes. Résultat ce monde idéal ne sait plus comment sortir de l’impasse, autrement que par l’affrontement militaire entre les super puissances sur le point d’en découdre au Moyen Orient. La cause du gouvernement mondial, la cause première de la création de l’euro, avance à coups de crises, de révolutions et de guerres. Nous assistons en ce moment à une sorte de fusion entre la BCE et la FED, la seconde finançant la première à hauteur de centaines de milliards de dollars pour préserver la solvabilité des banques européennes, tandis que le Japon et la Chine proclament leur volonté de s’affranchir du dollar comme monnaie de réglement de leurs échanges bilatéraux. Nous avançons très vite vers la troisième guerre mondiale, celle qui manque encore au tableau pour provoquer la venue de l’Antichrist.
tite
Je pense qu’il a raison, c’est la fin de l’Etat-providence, mais comment le faire comprendre aux français dont plusieurs générations ont grandi avec ?Ce serait une révolution que de l’annoncer.Une autre solution existe, celle du “fait accompli”en passant par des réformes drastiques “dictées”par les nécessités.Dans ce cas il suffit de créer les conditions amenant à ces décisions.N’est-ce pas ce qui arrive ?
trahoir
tite,
Vous avez raison sauf que “Ce serait [pas seulement] une révolution que de l’annoncer.” mais une émeute dans les quartiers qui vivent de ses allocations et qui ne manquerait pas de faire référence à l’habituel “racisme” et la gauche rajouterait comme d’habitude sa sauce subversive, menteuse et manipulatoire.
Comme je l’ai déjà dit içi, la situation est un vrai bâton mer…
Servant
Ceci fait depuis longtemps que je suis le blog de Monsieur Gave, après avoir lu “La faillite de l’Etat”. J’en suis également un second, celui de Philippe Herlin, très intéressant également, et dont voici l’adresse : ladettedelafrance.blogspot.com.
Sur ce, je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 2012.