Du Cardinal Antonio Cañizares, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, à propos de la concélébration, sujet d'un ouvrage de Mgr Derville :
"Le Concile a en effet décidé d’étendre la faculté de concélébrer selon deux principes : il s’agit d’une manière de célébrer la Sainte Messe qui manifeste de manière appropriée l’unité du sacerdoce et, d’autre part, elle a été utilisée jusqu’à présent dans l’Église tant en Orient qu’en Occident. De ce fait, comme le signalait encore la Constitution Sacrosanctum Concilium, la concélébration faisait partie de ces rites qu’il convenait de rétablir « selon l’ancienne norme des saints Pères ».
[…] Il s’agissait d’augmenter, de façon modérée, la faculté de concélébrer, comme il ressort de la lecture les textes du Concile. Il est en effet tout à fait logique qu’il en soit ainsi, puisque la concélébration n’a pas pour but de résoudre des problèmes logistiques ou d’organisation, mais plutôt de rendre présent le mystère Pascal, par la manifestation de l’unité du sacerdoce, qui naît de l’Eucharistie. Comme nous avons dit précédemment, la beauté de la concélébration implique sa célébration dans la vérité. Sa force significative dépend ainsi de ce que l’on vive et respecte les exigences inscrites dans la concélébration même.
Un nombre trop élevé de concélébrants masque un aspect essentiel de la concélébration. Le fait qu’il soit quasiment impossible de synchroniser les paroles et les gestes non réservés exclusivement au célébrant principal, l’éloignement de l’autel et des offrandes, le manque d’ornements pour certains concélébrants, l’absence d’harmonie dans les couleurs et dans les formes, tout cela peut éclipser la manifestation de l’unité du sacerdoce. Et nous ne pouvons manquer de rappeler que c’est précisément la manifestation de cette unité qui a justifié l’augmentation des possibilités de concélébrer.
Déjà en 1965, le Cardinal Lercaro, alors président du Consilium ad exsequendam Constitutionem de sacra liturgia, adressait une lettre aux Présidents des Conférences Épiscopales, afin de les prévenir de ce danger : considérer la concélébration comme un moyen de surmonter des difficultés pratiques. Il rappelait qu’il pouvait être opportun de la promouvoir dans le cas où elle favoriserait la piété des fidèles et celle des prêtres.
Je voudrais aborder ce dernier point très brièvement. Comme l’affirme Benoît XVI : « je recommande aux prêtres, avec les Pères du Synode, la célébration quotidienne de la Messe, même sans la participation de fidèles. Cette recommandation correspond avant tout à la valeur objectivement infinie de chaque célébration eucharistique ; elle en tire ensuite motif pour une efficacité spirituelle particulière, parce que, si elle est vécue avec attention et avec foi, la Messe est formatrice dans le sens le plus profond du terme, en tant qu'elle promeut la conformation au Christ et qu'elle affermit le prêtre dans sa vocation ».
[…] il existe aussi la possibilité de célébrer seul ou de participer à l’Eucharistie comme prêtre, sans toutefois concélébrer. Il s’agit, dans chaque cas, d’entrer dans la liturgie, de chercher la solution qui permette d’établir plus facilement un dialogue avec le Seigneur, tout en respectant la structure même de la liturgie. Nous nous trouvons ici face aux limites d’un « droit à concélébrer ou pas », qui doit respecter le droit des fidèles de participer à une liturgie où l’ars celebrandi rende possible leur actuosa participatio. Nous touchons là des questions en rapport avec la justice. […]"