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L'Eglise : Foi

Au-delà de la lettre de la loi – L’Académie pontificale pour la vie conteste les enseignements d’Humanae Vitae et de Donum Vitae

Au-delà de la lettre de la loi – L’Académie pontificale pour la vie conteste les enseignements d’Humanae Vitae et de Donum Vitae

First Things a publié le 27 aout un article co-écrit par le cardinal Müller, préfet émérite de la Congrégation pour la doctrine de la foi, et Stephan Kampowski, professeur d’anthropologie philosophique à l’Institut pontifical Jean-Paul II pour le mariage et la famille à propos de l’ouvrage publié le 1er juillet par l’Académie pontificale pour la vie et intitulé « Éthique théologique de la vie » (déjà évoqué ici et ). Extrait :

Pourquoi les auteurs du document de l’Académie Pontificale pour la vie ont-ils choisi d’ignorer ce que dit Humanae Vitae ? On peut supposer qu’un engagement avec les déclarations réelles de l’encyclique aurait révélé un désaccord beaucoup plus profond, non plus sur une question concrète de moralité sexuelle, mais sur un problème appartenant à la théologie morale fondamentale : la question de savoir s’il existe des types d’actes, c’est-à-dire si les actes humains, objets de nos choix rationnels délibérés, ont des natures ou des espèces et dans quelle mesure on peut juger moralement un acte sur la base de cette seule espèce. La position qui nie que les actes ont des natures ou des espèces est appelée nominalisme. Bien que les auteurs du document de l’Académie Pontificale pour la vie ne prétendent pas explicitement être des nominalistes, ce qu’ils écrivent devient beaucoup plus intelligible lorsqu’il est lu dans cette perspective.

[…]

Les choses sont différentes lorsqu’il s’agit du choix de la contraception. Lorsque le mari et la femme privent délibérément leur acte sexuel de sa fécondité, ils ne peuvent prétendre accomplir un acte qui a une signification procréatrice. Or le choix contraceptif est le choix d’une sexualité stérile, même si, biologiquement parlant, en raison de l’échec de la contraception, elle pourrait bien conduire à la conception d’un nouvel être humain. En privant délibérément leur acte sexuel de sa fécondité potentielle, les partenaires choisissent leur acte sexuel comme un acte intrinsèquement incapable de générer une nouvelle vie humaine. Ainsi, au niveau intentionnel, c’est-à-dire au niveau de ce qui est effectivement choisi, on peut dire avec Elizabeth Anscombe que la différence entre le choix de la contraception et le choix des actes homosexuels est une question d’esthétique et de goût uniquement : Dans les deux cas, les objets de son choix sont des actes sexuels stériles.

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Mais même si l’on admet ce qui précède, on peut encore se demander : ” Où est le problème du choix d’un acte sexuel stérile ? “. La première chose à dire est que le choix du sexe stérile banalise notre sexualité. Ce choix prive notre sexualité de toute forme de transcendance, de toute forme de mission, et ce, dans chacun de ses actes, et pas seulement au niveau de l’attitude générale. En s’unissant dans un sexe stérile, les deux personnes restent seules l’une avec l’autre, vivant pour le moment. Que ces deux-là soient du sexe opposé ou du même sexe est accidentel, comme l’est d’ailleurs le fait qu’ils soient deux. Ainsi, on perd le sens de ce qui est propre à l’amour entre l’homme et la femme, ainsi que le sens profond de la différence sexuelle. Déjà en 1984, Augusto del Noce suggérait que l’amour homosexuel est devenu le paradigme de la façon dont nos sociétés pensent l’amour. Nous pouvons également le dire avec les mots de Benoît XVI : “Le choix du sexe stérile est le choix de quelque chose de trivial, et même s’il était limité à un couple marié de sexe opposé, par sa logique interne, il ne peut pas rendre compte de cette limitation et, en fait, il “met sur un pied d’égalité toutes les formes de sexualité.”

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Voilà donc les deux concepts irréconciliables de la personne humaine et de la sexualité humaine : Le choix de la contraception est un choix contre la possession vertueuse de soi et la maîtrise de soi. Le concept sous-jacent de la personne humaine est celui d’un être gouverné par des instincts et des pulsions, lâché comme une tornade, une force de la nature dont on ne peut contrôler les opérations. On ne peut que prendre des mesures prudentes, appliquer des expédients techniques, afin de limiter tout dommage éventuel. Le concept de sexualité sous-entendu est celui d’une force brute, incapable d’être intégrée dans l’ordre de la raison – et avec elle dans l’ordre de la liberté et de l’amour. Dans cette optique, intégrer et modérer cette force, assumer la responsabilité personnelle de ses effets indésirables en s’abstenant de l’exercer, ne doit être proposé à personne, car de telles tentatives sont potentiellement nuisibles. L’idée est que le mieux que l’on puisse faire est de réprimer sa pulsion sexuelle, qui peut alors éclater à tout moment comme un volcan, l’éruption étant d’autant plus violente que l’on a refusé auparavant tout exutoire à cette pulsion. Cette vision de la sexualité humaine, pratiquement implicite dans chacun des choix contraceptifs, trouve sa formulation la plus brutale dans les paroles du grand prophète de la révolution sexuelle, Wilhelm Reich, qui a affirmé de façon célèbre que “l’expérience médicale en matière de sexualité nous enseigne que la répression sexuelle provoque la maladie, la perversion ou la lascivité “26.

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Que la sexualité n’est pas une force brute mais peut être intégrée dans l’ordre de l’amour et de la raison, que les époux sont vraiment capables de faire un don d’eux-mêmes et de se recevoir mutuellement avec la liberté même de ce don : C’est une bonne nouvelle. Que notre sexualité comporte, selon les termes mêmes du document de PAV, un Gabe et un Aufgabe, un don et une mission (n. 168) : cela aussi est une bonne nouvelle. Qu’il existe un contexte approprié pour recevoir ce don et vivre cette mission, à savoir l’institution que l’amour conjugal se donne à lui-même, qui porte le nom de mariage : C’est une bonne nouvelle. La solution aux problèmes actuels de l’Église – de la crise des abus à la baisse du nombre de mariages et de baptêmes, de la quasi-absence de conversions d’adultes au nombre croissant de personnes qui tournent le dos au Corps mystique du Christ – ne consiste pas à renoncer à la bonne nouvelle qu’elle possède, mais à commencer enfin à la proclamer avec confiance, en particulier et précisément dans le domaine de la sexualité humaine. Comme l’a dit un jour Elizabeth Anscombe, “Que peut-on faire ? Si vous voulez réparer la situation, vous devrez prêcher la chasteté, toute la doctrine de l’Église : tout le paquet. Car tout cela va de pair. “28 Oui, tout va de pair. Les considérations qui précèdent auront, je l’espère, montré que la question de la contraception n’est pas seulement un problème mineur dans un domaine délimité de la théologie morale spéciale. C’est plutôt l’ensemble de l’enseignement ecclésial sur la sexualité, le mariage et la famille qui en dépend : de l’évaluation morale des actes homosexuels à la question des relations pré-maritales et extra-maritales, en passant par le sens du mariage et la possibilité du célibat pour le Royaume des Cieux.

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Le problème des PMA, la raison de l’illégitimité morale de chercher à avoir des ” bébés sans sexe “, trouve son origine dans les répercussions que ces procédures ont sur la relation parent-enfant et dans le respect que l’on doit à l’enfant en tant que personne, en tant que personne qui a une dignité. Même si les PMA homologues portent moins atteinte à l’unité du mariage et ont donc “moins de négativité éthique” (DV II, B, 5), il est vrai que le simple fait d’avoir “moins de négativité éthique” ne rend pas une pratique bonne. L’argument principal fourni par Donum Vitae s’applique à la procréation artificielle dans toutes ses variétés, y compris les homologues : Elle “confie la vie et l’identité de l’embryon au pouvoir des médecins et des biologistes et établit la domination de la technologie sur l’origine et le destin de la personne humaine. Un tel rapport de domination est en soi contraire à la dignité et à l’égalité qui doivent être communes aux parents et aux enfants” (DV II, B, 5).

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Lorsque Donum Vitae parle du “lien entre la procréation et l’acte conjugal” (DV, II, B, 4, c), il s’agit des répercussions morales de la naissance de “bébés sans sexe”. Le texte fait référence au droit de l’enfant à être conçu dans un acte d’amour, une étreinte concrète, physique et amoureuse entre son père et sa mère. Séparer la procréation et l’acte conjugal reviendrait alors à priver l’enfant de ce droit et à provoquer la conception par un acte technique, médical, qui n’est pas un acte conjugal. Pourquoi n’est-ce pas un acte conjugal ? En fait, le protagoniste, celui qui agit, est le médecin. Le mari regarde le médecin féconder sa femme, en utilisant, espérons-le, le sperme du mari, mais, de par la nature même de la procédure, une confusion ne peut être exclue. Quelles que soient les intentions ou les attitudes des époux, si les actes ont un sens en eux-mêmes, alors l’acte d’un médecin fécondant la femme du mari ne peut être qualifié d’acte conjugal. Même si le médecin utilise le sperme du mari dans une insémination artificielle, l’acte est beaucoup plus proche d’un acte d’adultère que d’un acte conjugal. La génération et l’acte conjugal sont clairement séparés.

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