Pierre-Olivier Arduin apporte ses lumières à la recente polémique :
"Contrairement à ce qu’ont pu écrire nombre de commentateurs mal avisés, Benoît XVI n’a opéré aucun virage à 180° par rapport à son analyse de 2009. Bien au contraire, il persiste et signe : «Nous ne pouvons pas résoudre le problème par la distribution de préservatifs […]. Il faut autre chose.» Ajoutant que «même dans le milieu laïc s’est développée la théorie dite “ABC” – Abstinence, Be Faithful (fidélité), Condom ¬– où le préservatif est utilisé uniquement en dernier recours lorsque les deux autres ne fonctionnent pas» […]. Ce qu’ignorent en effet tous ceux qui instrumentalisent la pensée de Benoît XVI, […] c’est qu’il est à l’heure actuelle un des meilleurs spécialistes de la question. Benoît XVI suit en effet attentivement ce dossier depuis l’apparition de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) dans les années quatre-vingt. Au début de son pontificat, il a eu en main un rapport extrêmement documenté sur l’usage du préservatif et la problématique du Sida émanant du Conseil pontifical pour la santé. De fait, le Vatican observe depuis longtemps la parution d’études qui écornent sévèrement la supposée efficacité du préservatif dans la prévention de la pandémie.
Plusieurs enquêtes montrent en effet que le taux d’infection augmente proportionnellement avec son utilisation. Comment est-ce possible ? Tout se passe en fait comme si l’usage du préservatif favorisait l’augmentation de conduites à risque (adultères, vagabondage sexuel, multipartenaires,…), lesquelles démultiplient les possibilités de défaillances de son utilisation, d’où un taux de contamination qui s’élève paradoxalement dans les pays qui ont tout misé sur cette technique. […]
S’abstenir de relations sexuelles avant le mariage, demeurer fidèle à un conjoint qui l’est lui-même, non seulement honorent la signification et la dignité de l’amour humain mais se révèlent être l’unique solution épidémiologique durable. Et Benoît XVI sait pertinemment que l’authenticité de l’anthropologie déployée par le magistère, loin d’être théorique, a été traduite dans les faits de manière éminemment concrète avec l’exemple éclatant de l’Ouganda. Détenant le triste record du taux d’infection le plus élevé au monde au début des années quatre-vingt – 15% de prévalence du VIH – une politique d’envergure engagée avec le soutien de l’Église, prônant l’abstinence et la fidélité, a ramené le taux d’infection à 5,4% en 2007. […]
Le préservatif introduit objectivement un mensonge au plus intime de la communion entre un homme et une femme. Il fait mentir en partie le langage des corps, le prive de sa vérité plénière et altère la structure spécifique de l’acte sexuel comme donation réciproque. […]
Après avoir déployé une anthropologie positive et dynamique de l’essence de la sexualité humaine, le pape revient sur le terrain de la transmission du VIH par voie sexuelle et […] Benoît XVI prend des hommes et des femmes blessés là où ils en sont, soutenant un premier pas fragile qui peut être la première étape d’une croissance morale. Le pape rappelle dans toute sa force la loi morale seule susceptible de libérer l’homme et de lui montrer le vrai bien auquel il est appelé. Mais il est également attentif à ne pas éteindre la mèche qui fume encore et, tout en reconnaissant le caractère intrinsèquement désordonné d’une sexualité non conjugale, ne condamne pas les personnes qui se livrent à «une sorte de drogue qu’ils s’administrent à eux-mêmes».
Il n’est pas anodin que le pape prenne l’exemple de la prostitution, une pratique qui enferme les personnes dans leurs souffrances, leurs errances, leurs culpabilités plus ou moins consciemment exprimées. Peu importe qu’il s’agisse d’un homme, d’une femme ou d’un transsexuel comme l’a déclaré le père Lombardi après avoir demandé à Benoît XVI si son propos s’appliquait seulement à un prostitué masculin, le fait de prendre en considération la vie de l’autre est un premier pas dans la maturation éthique balbutiante de la personne. […]
Il ne s’agit pas ici d’une éthique de situation s’abritant derrière une logique du «moindre mal» comme on l’a lu ici ou là. Sans excuser le mal moral d’un acte sexuel désordonné, le pape dit que l’usage du préservatif par la personne qui se prostitue permet ici de ne pas surajouter un deuxième acte mauvais – infecter autrui par un virus mortel – à un premier geste lui-même mauvais – une relation sexuelle privée de sa valeur et de sa dignité. Un geste auquel sa volonté n’a malheureusement pas encore la force de renoncer. C’est un tout petit pas «sur le chemin de la reprise de conscience», qui signifie que la personne comprend «que tout n’est pas autorisé et qu’on ne peut pas faire tout ce qu’on veut», précise Benoît XVI dans sa réponse. […] Benoît XVI ne dit donc pas qu’il faut réserver à un groupe humain, ici celui des prostitué(e)s, une espèce de sous-morale. Il prend en compte ce petit pas qui consiste à se soucier de la vie de l’autre et appelle à partir de là les personnes impliquées à cheminer sans se lasser, à surmonter les obstacles pour se libérer d’une emprise aliénante pour elles-mêmes et autrui."
Alain
Reste le probleme du paragraphe sur Humanae Vitae. Voir ce qu’en dit Jeanne Smit. On a plus parlé du préservatif que de ce paragraphe. C’est dommage, à mon sens les mots dits sur HV méritent un éclaircissement urgent…
Jean Theis
C’est quand même un peu emberlificoté.
Ce que j’en tire c’est que les exceptions confirment la règle.
K.
@Alain: je ne vois pas le problème. C’est ptet facile pour vous, il n’empêche que pour moi, et bien j’en bave.
Vie de couple & Paternité responsable, c’est une équation difficile à résoudre, qui peut être trop souvent résolu par la ligature des genoux, chose pas forcément souhaitable dans un couple, ou d’autres déviances, non souhaitables.