Ces lignes, publiées sur sa page Facebook, font d'Eric Emmanuel Schmitt l'un des rares écrivains français à s'indigner de l'indifférence occidentale à l'égard des chrétiens d'Orient :
"En ce jour de Pentecôte, je pense avec douleur aux chrétiens d’Orient qui subissent, non seulement des discriminations, mais des persécutions d’une violence inouïe : on les abaisse, on les isole, on les vole, on les chasse, on les tue ! Selon les chiffres de l’ONU, 150 à 200 millions de chrétiens dans le monde courent de grands dangers.
Ce qui me choque, c’est bien sûr le nettoyage culturel et humain qui détruit les vies autant que les lieux. Mais c’est aussi l’indifférence occidentale.
Les intellectuels qui sont si prompts à « s’indigner » – une façon moralement confortable d’assumer son impuissance – ne s’indignent même pas en grand nombre. Les politiques non plus.
Pourquoi ?
Ils sont gênés. Gênés de reconnaître le poids du facteur religieux dans le monde. Gênés d’accepter une sorte de fraternité avec ces peuples qui les conduirait à reconnaître leur origine chrétienne qu’ils nient – l’Europe s’est pourtant construite avec et par le christianisme, entre autres… Gênés de devoir sortir de leur laïcisme mal compris – celui qui prône l’athéisme alors que le vrai laïcisme est le garant de la liberté intérieure et de la possibilité de pratiquer toutes les religions. Tellement gênés qu’ils préfèrent noyer le malheur des chrétiens dans des malheurs plus généraux, l’effondrement de l’Irak et la Syrie, un fanatisme aveugle et généralisé, voire un mea-culpa sur l’impérialisme colonial européen puis américain. Tout plutôt que des parler des chrétiens accablés par ce qu’ils sont chrétiens. « Cachez cette religion que je ne saurais voir » disent les Tartuffe modernes en ne disant rien.
Franchement, cette gêne me gêne.
Je n’ai pas de mal à avouer que, en tant qu’occidental d'origine chrétienne, ces massacres m’affectent plus que d’autres ! Car c’est ma chair spirituelle qui est atteinte en des frères de pensée. Car c’est mon histoire et mon espérance qu’on tue. Car cette barbarie constitue le contraire du message évangélique, un message intéressant, pacifiste et humanisant, même pour celui qui ne croit pas. (…)"