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Cathophobie / France : Laïcité à la française

La laïcité c’est la distinction du spirituel et du temporel et non l’exclusion de Dieu de la Cité

Mgr Centène déclare dans Famille chrétienne :

"Notre vie, la vie de l’Église est entre les mains du Seigneur, pas des instances gouvernementales. La persécution, qu’elle soit frontale ou plus pernicieuse, est le lot du disciple de Jésus-Christ, prêt à donner jusqu’à sa vie pour témoigner de la vérité tout en pardonnant à ses bourreaux. Mais que cette réalité ne soit pas un prétexte pour nous enfermer dans un silence coupable, signe d’un abandon de nos frères et sœurs, d’une résignation face au scandale de l’injustice. Plus largement, il en va du respect de la dignité de tout être humain, chrétien ou non, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. […]

Souvent, on pense que les chrétiens du Proche et du Moyen Orient bénéficient d’une relative liberté de culte. Or, la liberté religieuse, ce n’est pas seulement la liberté de culte. C’est aussi la liberté de conscience et donc la possibilité de se convertir au christianisme sans être persécuté. Il n’existe pas de vraie liberté de conscience lorsque certains États tolèrent, voire promeuvent, le viol de la conscience par des moyens que le simple respect de la justice et de la dignité humaine réprouve. […]

En Occident, cette conception de l’homme et de la dignité humaine est issue de l’évangélisation de la culture. La grande erreur de nos hommes politiques est de croire que ces valeurs sont universellement reconnues. Notre mentalité culturelle a été façonnée par vingt siècles de christianisme. Cela a permis le développement en France et en Occident de notions fondamentales, telles que la dignité de la personne humaine ou la distinction des pouvoirs spirituel et temporel, que l’on nomme aujourd’hui – dans une acception erronée – la laïcité. Les Français croient souvent qu’ils le doivent à la pensée moderne ; ils ne savent plus qu’elle a pourtant pour origine cette phrase du Christ : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu, ce qui est à Dieu » (Mt 22, 21). La philosophie chrétienne, à la lumière de la Révélation, a ainsi établi une distinction entre pouvoir spirituel et temporel.

La laïcité est donc pour vous d’origine chrétienne ?

Oui, et le malheur de notre temps est d’avoir vu cette distinction comme une séparation radicale excluant Dieu et la religion de la vie sociale pour prétendre les enfermer dans la sphère privée des consciences. D’un côté, les instances gouvernementales des nations européennes refusent de reconnaître leurs racines chrétiennes. De l’autre, elles s’obstinent à croire universellement partagé un reliquat perverti des valeurs sur lesquelles ces nations furent bâties. Cette confusion des idées, qui ne reposent plus sur un socle philosophique solide, nous rend incapables d’analyser la réalité sans angélisme ni complaisance. Ce qui laisse la part belle aux fondamentalismes, religieux, areligieux, ou politiques, devant lesquels nous sommes devenus impuissants. […] Parce que cette notion de distinction des pouvoirs est entrée dans la culture occidentale, nos hommes politiques s’imaginent qu’elle est une composante universelle de la pensée. Cette conception n’est pas partagée par tous et notamment par l’islam. L’islam ne sépare pas pouvoirs spirituel et temporel. Il n’accepte pas non plus, avec raison, que la religion soit confinée à la sphère privée. Au contraire il les confond, au point de considérer la laïcité comme un véritable blasphème."

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16 commentaires

  1. Les mots sont de véritables pièges…
    Que signifie “distinction” ?
    La “distinction” spirituel/temporel est-elle un bien ?
    Par analogie, l’âme est-elle distincte du corps ? certainement pas : c’est la définition de la mort. Au contraire l’âme est la forme (au sens philosophique) du corps. Elle entre dans sa définition. Le corps distinct de l’âme n’est plus un corps…

  2. Oui mais on les distingue tout de même au sens où elles ne sont pas identiques. Mais distinguer ne signifie pas forcément séparer.
    Saint Thomas d’Aquin lui-même affirme que les pouvoirs spirituel et temporel doivent être distingués (au sens où ils sont distincts l’un de l’autre).
    Et oui, l’âme et le corps sont distincts, sinon ils seraient identiques et on ne pourrait pas dire alors qu’ils sont unis.

  3. “La laïcité est donc pour vous d’origine chrétienne ?
    Oui, et le malheur de notre temps est d’avoir vu cette distinction comme une séparation radicale excluant Dieu et la religion de la vie sociale pour prétendre les enfermer dans la sphère privée des consciences.”
    C’est l’Islam qui considère la séparation du spirituel et du temporel comme de l’athéisme.

  4. @ Roro,
    je ne suis pas d’accord avec vous : c’est la séparation de l’âme et du corps qui est propre à la mort. Comme la laïcité pervertie qui est la séparation de l’Eglise et de l’état.

  5. Compliquée, la déclaration de Mgr Centène, avec tout le respect que je lui dois et la légitimité de son opinion, je vais me permettre de ne pas être d’accord.
    La laïcité religieuse dont Mgr a raison de souligner l’initiative et qui renvoie comme on le fait aujourd’hui systématiquement à Saint Augustin, avait surtout un caractère de non exclusivité c’est à dire, dans ce contexte éloigné, à l’acceptation de l’autre dans l’usage pratique de la vie économique.
    En effet et cela doit être également souligné la parole de Jésus-Christ, sa pratique sur cette Terre aura été tout aussi profondément économique que profondément spirituelle.
    Cependant il était évident que l’action à court terme ne pouvait pas être uniquement “chrétienne” ce qui aurait été contraire au principe de la diffusion de la parole et du dialogue.
    L’enseigment et si je puis dire le retour d’expérience nous en a été donnée par Calixte, notre premier Pape.
    La séparation dont Mgr parle est donc toute théorique et principalement destinée à la relation avec l’autre lorsqu’il n’est pas chrétien.
    Il est évident que pour tout croyant l’action au jour le jour est toute empreinte de l’enseignement de l’Eglise mais qu’elle sait s’adapter à d’autres inspirations lorsqu’il est nécessaire comme par exemple à l’occasion d’un voyage.
    Celui qui n’est pas chrétien n’est pas un ennemi mais un réceptif nouveau de la parole de Jésus Christ, de son exemple, de sa pratique et de son économie.
    L’ensemble de l’inspiration formant en effet des actes et ces derniers une économie, sur tout propos, sans sujet tabou.
    L’évolution nécessaire dans la relation des religions est alors le dialogue pour effacer les mauvaises pratiques constatées.
    Concernant l’Islam plus précisément, cet effacement est possible puisque la structure d’organisation non radicalisée qui existe souvent le permet.
    Les croyants pourront donc manger selon leur pays d’adoption, pratiquer de façon paisible en repoussant les textes guerriers et en le faisant savoir, adopter un vêtement régional, etc.
    Mgr Centène sait mieux que d’autres le pouvoir de la Parole, il sait alors que nous ne sommes pas impuissants mais peut-être que cette faculté de persuasion n’est pas suffisament révélée car entre les mains d’êtres faibles, c’est à dire au final moins croyants.
    Chacun doit entreprendre assurément un travail de méditation introspective tant pour sa conscience que pour son “professionalisme” puisque un poste quel qu’il soit induit cette notion.
    Les anti catholiques usant du “soft power” faussement compréhensif abusent de cette latence en s’étonnant certainement d’une si faible conviction dans la réponse.
    Mon opinion est qu’un débat visant à l’universalisation de l’Eglise a fait l’erreur d’une pratique non différenciée, unifiée donc mondialiste qui n’a aucune raison d’être.
    Pourrait-on imaginer que l’enseignement scolaire soit fait par une classe unique sans distinguer les avancées des uns et des autres, faisant que le cours s’aligne sur le niveau le plus bas ?
    Que l’on dise ensuite qu’avec cette captation basse la remontée d’un seul tenant sera la stratégie la plus pertinente et que tout le temps des siècles sera laissé pour ce faire ?
    Je pense que c’est une pratique qui aurait comme fondement d’oublier l’autre, le reléguant à un rôle supposé d’inactif.
    C’est justement le contraire de l’expression de la laïcité catholique qui est de tenir compte de l’autre comme de la complexité du monde.
    Mgr Centène devrait à mon sens exposer à notre plus grand théologicien q’une stratégie complémentaire est nécessaire car il y a bien là cette fois une une distinction à faire.
    [Après vous avoir lu, je trouve la déclaration de Mgr Centène bien moins complexe que la votre. MJ]

  6. Erratum
    Le philosophe improvisé pourrait-il maintenant nous dire en langage accessible, ce qu’il a voulu enseigner.
    Tout ce qui se conçoit de façon floue…
    On pense à certains personnages de Molière

  7. Laïcité, Laïcisme, Laïque, .. ?

  8. Un chrétien n’a pas besoin que le christianisme soit la religion de “césar” pour obéir à ses lois, tant que celles-ci ne lui commandent pas de l’adorer comme un dieu : voilà, il me semble, tout ce que voulait dire le “rendez à César ce qui est à César, etc.” Il n’y a pas là une théorie sur la convenance de la “laïcité”. Les premiers chrétiens ont cherché à vivre pacifiquement dans une société où le christianisme n’était pas la religion officielle de l’Etat. Mais quand ils ont pu remplacer la théocratie païenne par la théocratie chrétienne, ils l’ont fait, et sans la moindre hésitation. Alors, voir dans la “laïcité” un héritage chrétien, ce n’est pas, historiquement, très sérieux. Un Etat chrétien vaut mieux qu’un état islamique ou qu’un état laïque. C’est simple à penser et à dire.

  9. —La laïcité est donc pour vous d’origine chrétienne ?—
    Oui et non. Il y a certes le “tu rendras à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu” attribué à Jésus de Nazareth. Il y a aussi la démarche d’Augustin d’Hippone s’appuyant sur cette base.
    Mais, la laïcité est d’origine gréco-romaine, pas d’origine chrétienne. Elle préexistait. La laïcité au sens strict c’est la domination du laos sur les affaires religieuses. C’est le fait que les responsabilités religieuses étaient confiées à des hommes politiques, comme Caius Iulius Caesar qui fut fait pontifex maximus, alors que son grand-oncle avait été flamen iouialis.
    A Rome, tout comme en Grèce, le politique primait sur le religieux, et c’était cela la laïcité. Des promoteurs de la loi de 1905 comme le socialiste Maurice Allard étaient d’ailleurs conformes à ce sens là de la laïcité. De son aveu même, Allard souhaitait soumettre la religion catholique et à terme la faire disparaître.
    Il y a donc deux laïcités, une seulement étant compatible avec la religion chrétienne. La laïcité romaine qui s’opposait aux chrétiens d’ailleurs, et la laïcité chrétienne. La laïcité d’une Marine Le Pen paraît relever davantage de la version romaine… fort peu compatible avec l’islam certes mais aussi avec le christianisme.
    [C’est faux : avant NSJC, le politique et le religieux étaient confondus, l’empereur étant un demi-dieu. Il n’y avait pas de distinction entre Dieu et César. Les chrétiens ont ainsi bouleversé l’ordre établi en refusant le culte du à César. MJ]

  10. Cher Michel,
    Quand vous parlez christianisme, on vous croit volontiers.
    Quand il s’agit de paganisme, c’est un autre débat.
    En premier lieu, la laïcité romaine préexistait bien sûr à l’empire, puisque c’était une institution de la république (et avant elle, de la royauté romuléenne). C’est Numa Pompilius qui est l’organisateur des institutions religieuses de la Rome ancienne.
    Auguste était-il un demi-dieu ? De son vivant, il a refusé qu’on le présente comme autre chose que le premier des citoyens (primus inter pares, id est princeps) et avait interdit, même si cela ne fut pas respecté, qu’après sa mort, il soit honoré comme autre chose qu’un citoyen.
    Par ailleurs, ce que vous appelez un demi-dieu demeure un mortel. C’est en grec un hêros, en latin un diuus. Un diuus n’est pas un deus mais un “divin”, c’est à dire un mortel distingué par les dieux, ce qui ne le protégeait pas nécessairement. César fut “condamné par les dieux” en raison de son hybris, une arrogance qui lui faisait croire que, malgré les signaux envoyés par les dieux (Mars se signala à plusieurs reprises la nuit précédente, Calpurnia fit des cauchemars visionnaires… etc), il était au-dessus de sa condition de mortel.
    L’empereur romain était pontifex maximus, le chef suprême de la religion, du temps d’Auguste puis de ses successeurs. Si vous lisez les oeuvres de Flauius Claudius Iulianus, où voyez-vous les empereurs morts comme dignes d’un culte ?
    Qu’il y ait eu des dérives impériales, sous influence orientale, présentant un empereur comme un dieu, c’est indéniable. Mais ce n’est pas originel, ce n’est pas conforme à la religion romaine. Romulus n’était pas honoré comme un dieu, ni Camillus, ni Scipion, ni Cincinnatus, ni même Marius…
    Le Dieu des Romains, Jupiter, régnait certes mais au ciel. L’empereur était au mieux son représentant sur terre en tant que pontife (mot à mot “bâtisseur de pont”, lien entre le monde des hommes et le monde des dieux).
    Dans le paganisme, le politique prime sur le religieux.
    Dans l’islam, qui en est l’antithèse absolue, le religieux prime sur le politique.
    Quand vous évoquez la confusion entre les deux fonctions, vous n’avez pas tort, mais comme l’avait constaté Machiavel dans son “Discours sur la première décade de Tite-Live”, c’était quand même “politique d’abord”. Cette confusion n’était de toutes façons pas problématique puisque le paganisme est une religion du rite et du doute.
    Socrate n’a pas été condamné parce qu’il ne croyait pas à l’existence des dieux, il n’était pas le seul athénien dans ce cas, mais parce qu’en introduisant des idées religieuses nouvelles, il porte atteinte à la communauté des citoyens.
    Et si dans l’antique Rome, des chrétiens étaient condamnés, ce n’était pas parce qu’ils refusaient de considérer l’empereur comme un dieu, aucun païen ne le considérait non plus comme tel (ce qui aurait été impie aux yeux des vrais dieux), ni parce qu’ils ne croyaient pas en Jupiter, Mars ou Venus. Seulement parce qu’en refusant d’honorer symboliquement, et le “symboliquement” l’empereur, non l’homme mais la fonction, ils étaient considérés comme de mauvais citoyens.
    Païens et chrétiens raisonnaient véritablement de manière très différente quant à la perception de la religion. Ils étaient donc fondamentalement irréconciliables. Dans cette guerre à mort entre deux visions du monde, l’action de Constantin a été décisive. Il a adopté le christianisme en païen, c’est à dire selon des considérations politiques spécifiques. Ayant compris qu’il serait impossible de repaganiser les chrétiens, l’échec de deux siècles de tentatives le prouvait, et même Dioclétien avait échoué, il se dit qu’il valait mieux christianiser les païens afin de faire à nouveau l’unité.
    [Je reconnais bien là votre vision idéaliste du paganisme antique, propre à une certaine frange de la droite dite nationale.
    Il faut bien comprendre que c’est le christianisme qui a inventé la notion même de laïcité.
    “Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu”. Avant que ne soit prononcée cette phrase qui servira de socle à la construction de la Chrétienté, la plus totale confusion régnait entre le pouvoir de César et celui de Dieu.
    Les sociétés antiques par expérience autant que par sagesse, savaient que tout ce qui gravite et vit en ce monde est issu du pouvoir des dieux. L’harmonie, l’agencement et le bon fonctionnement de l’univers dépendaient de toute évidence d’une intelligence divine, qui gérait en même temps les destinées individuelles et collectives de l’homme en ce bas monde. La survie de la cité ou du royaume, comme ses succès militaires ou l’abondance des moissons dépendaient entièrement du bon plaisir des dieux dont on essayait de s’attirer les bonnes grâces.
    Ignorant des raisons de sa présence en ce monde, l’homme subissait totalement un destin qui lui était imposé par la volonté divine. Cette volonté s’exprimant au travers des prêtres qui étaient chargés de la servir, le pouvoir clérical était sans limite… et pesait considérablement sur la direction de la cité jusqu’à se confondre avec elle. Pharaon, roi, dictateur ou tyran, les dirigeants antiques portaient en eux une partie de la vie divine. Ils étaient moitié fils de dieux ou de déesses, divinisés de leur vivant, tant on était convaincu que le pouvoir, même politique, échappait à la volonté de l’homme qui n’avait aucune prise sur sa destinée. “L’Etat était une communauté religieuse, le roi un pontife, le magistrat un prêtre, la loi une formule sainte” [Fustel de Coulanges].
    Cette totale confusion du politique et du religieux, l’Empire romain, par l’intermédiaire d’Auguste, la portera à son sommet, en réalisant la fusion du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel en la personne de l’Empereur. “César, à cette époque, était le grand pontife, le chef et le principal organe de la religion romaine ; il était le gardien et l’interprète des croyances, il tenait dans ses mains le culte et le dogme. Sa personne même était sacrée et divine” [Fustel de Coulanges].
    Avec la Bonne Nouvelle de l’Evangile, l’homme apprend qu’il a été créé à l’image de Dieu et par amour.
    C’est la grande révolution de l’histoire de l’humanité.
    A la suite de son maître, l’Eglise a donc engendré deux pouvoirs distincts, mais non séparés : le pouvoir spirituel, qui est le domaine des clercs, et le pouvoir temporel, qui est le domaine des laïcs, terme et notion que le monde ignorait avant le christianisme et dont il recommence aujourd’hui à méconnaître la réelle signification, au risque de replonger à nouveau l’humanité dans la confusion des pouvoirs et le totalitarisme qui s’ensuit.
    MJ]

  11. Quand Napoléon décide de transformer l’église des Invalides en temple de Mars, d’y mettre une statue du dieu et des drapeaux consacrés à chacune de ses victoires, faut-il considérer par exemple Napoléon comme un polythéiste assumé, c’est à dire comme un homme qui croirait vraiment que le dieu Mars en personne le protège ? Il n’était pas moins laïc que les hébertistes plaçant une statue de Minerve comme déesse de la raison dans les églises. Est-ce qu’Hébert croyait en la divinité de Minerve ? Je ne le crois pas. La porte de Brandebourg à Berlin est décorée avec des statues de dieux, et il y a même une statue de Mars au Capitole à Washington D.C.
    La sacralité de la fonction dans l’antiquité, et même aujourd’hui, n’était pas une divinisation de l’homme. Les mythes rappellent d’ailleurs que ceux qui voulaient s’élever au-dessus de leur condition de mortels étaient sans pitié jetés au sol par le cronide.
    C’est bien pourquoi je parle de deux laïcités, une laïcité romaine, une “religion populaire”, celle du laos ou “peuple”, c’est à dire la coutume ancienne, les traditions et les rites ancestraux, et une laïcité chrétienne qui est celle que vous avez parfaitement défini.
    Il y a la laïcité des païens, profondément identitaire, qui est de soumettre la religion à l’identité et aux institutions. Et il y a la laïcité des chrétiens, qui est de permettre à la religion de s’exprimer librement dans son cadre sans que l’état ne vienne imposer ses valeurs du moment.
    Bien cordialement,
    TF
    [Napoléon n’est justement pas un bon exemple de l’application de la laïcité : comme dans la Rome antique, il veut soumettre la religion au politique. Grave erreur que l’on retrouve chez nos laïcistes.
    MJ]

  12. Un exemple “chrétien” pour finir, et ne pas monopoliser le débat, où le politique a imposé au religieux ses dogmes. C’était au sud-est des USA au XIXème siècle. Pour justifier de l’esclavage, alors que le message chrétien était profondément anti-esclavagiste, de nombreux chrétiens sudistes adaptèrent leur christianisme à leurs objectifs politique en inventant le christianisme pré-adamite.
    Du point de vue de la laïcité chrétienne, ils étaient en tort, puisqu’ils soumettaient au politique la religion.
    Bien cordialement.
    [Sur ce sujet précis, il faudrait plutôt aller vous cultiver chez Alain Sanders. On a raconté beaucoup de billevesées sur les sudistes…
    MJ]

  13. —Napoléon n’est justement pas un bon exemple de l’application de la laïcité : comme dans la Rome antique, il veut soumettre la religion au politique. Grave erreur que l’on retrouve chez nos laïcistes. —
    Un bon exemple de l’application de la laïcité à la païenne, mais pas du tout à la chrétienne.
    Nous sommes en fait fondamentalement d’accord. Simplement vous restreignez la notion à votre religion, ce qui est logique et légitime, alors que je conçois l’existence d’autres formes de laïcité, donc l’hypocrite laïcité maçonnique.
    Beaucoup de “laïcistes” actuels sont des hypocrites qui voudraient règler leur compte au christianisme, tout en faisant le jeu de l’islam et de l’ “Überfremdung”. Et là je ne suis pas d’accord.
    J’entends personnellement défendre les européens dans leur ensemble, et un européen chrétien, voire un européen de l’islam balkanique ou caucasien [avec davantage de pincettes], est un compatriote. Un allogène supposément “païen” (je n’entends pas “paganisme” dans un sens universaliste mais comme synonyme de “polythéisme européen”) en revanche n’est pas pour moi un compatriote. Je pense être clair sur ce point.
    Sur le pré-adamisme, c’est un courant original du christianisme américain, je ne prétends pas qu’il ait été très important dans le sud, ni dans le nord d’ailleurs, le seul courant polygéniste au sein du christianisme pris dans sa globalité.
    [“Simplement vous restreignez la notion à votre religion” : c’est logique, la laïcité est une vertu chrétienne. Comme disait Chesterton, elle est devenue folle, car elle a été isolée…
    MJ]

  14. —Je reconnais bien là votre vision idéaliste du paganisme antique, propre à une certaine frange de la droite dite nationale.—
    Personnellement, je ne suis ni de droite ni national mais “euro-socialiste”, un courant européiste qui attache une grande importance à la défense et à la préservation de l’européanité (ce que les media présentent comme une idée “de droite”) tout en l’associant au progrès social (qui n’est pas du tout le “libertarisme” mais la progression des conditions de vie des travailleurs européens en Europe).
    Je ne pense sincèrement pas idéaliser les religions antiques, que je pense bien connaître vu le nombre d’années depuis lesquelles je l’étudie, y compris dans une perspective reconstructiviste, mais rétablir une vision claire de ce qu’elles ont pu être. Vous me permettrez je l’espère d’avoir une lecture de la christianisation bien moins angélique que la votre.
    —Il faut bien comprendre que c’est le christianisme qui a inventé la notion même de laïcité.—
    Le mot lui-même date de 1935. Je reviens personnellement, c’est mon mode de fonctionnement, à l’étymologie des mots. Or “laïc” signifie “populaire” en grec (laïkos). Je conçois donc la laïcité comme une forme de religiosité populaire, un mos maiorum. Ainsi, c’est au nom de notre identité que le fait de ne pas manger de porc ou de ne pas boire d’alcool heurte le sens commun (“commun” étant une autre traduction de “laïkos” en grec).
    —entre le pouvoir de César et celui de Dieu—
    Quand il y a eu un César… La décadence de la république, et donc de la religion romaine authentique, ne saurait permettre de comprendre le paganisme dans son génie propre. Faut-il juger le paganisme romain à l’aune de l’empire ? Faut-il juger le catholicisme à l’aune de Vatican II ? Toute religion, comme toute société, connaît l’involution.
    Selon mon point de vue, qui est aussi celui de l’historien Piganiol, les forces de renouveau du paganisme qui commençaient à fleurir au IVème siècle ont été étouffées dans l’oeuf par le choix de Constantin.
    —Cette volonté s’exprimant au travers des prêtres qui étaient chargés de la servir, le pouvoir clérical était sans limite…—
    Je crains là que vous ne confondiez avec les polythéismes égyptien et mésopotamien, voire le monothéisme zoroastrien, qui correspondent assez bien à votre démonstration. Les prêtres païens étaient des responsables politiques en charge d’une fonction sacerdotale. Dans le monde germano-scandinave, les pères de famille des familles aristocratiques avaient la charge de prêtres, ils étaient godar. Il n’y a jamais eu en Europe à l’époque antique de clergé au sens où on l’entendrait en Egypte ou en Assyro-babylonie.
    —Cette totale confusion du politique et du religieux, l’Empire romain, par l’intermédiaire d’Auguste, la portera à son sommet, en réalisant la fusion du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel en la personne de l’Empereur.—
    Auguste était d’un respect scrupuleux des divinités les plus anciennes de Rome, Jupiter Tonans, Mars Ultor et Apollo Palatinus, qui étaient les divinités ethnarques de Rome. Cette dimension patriotique du paganisme européen ne saurait vous avoir fondamentalement échappé. Vous regroupez sous ce terme des religions radicalement différentes. Il n’y a rien de commun entre la religio romana, issue de la matrice indo-européenne, et la religion égyptienne par exemple.
    Il est normal que vous idéalisez le christianisme comme sans doute j’idéalise le paganisme. C’est bien normal, et je ne cherche nullement à vous convaincre mais à débattre avec des gens qui ne pensent pas comme moi mais dont la discussion est enrichissante.
    A mes yeux, la christianisme est une régression. A vos yeux, elle est une libération. Mais c’est un débat d’historiens voire d’hommes de foi (au sens d’avoir des convictions religieuses). Alors que la menace est là et bien là et qu’elle doit nécessiter l’unité des européens, païens comme chrétiens.
    Je vous précise en toute sincérité être un véritable polythéiste, c’est à dire croyant, et ne pas “jouer au païen” comme l’ont fait pendant des années la Nouvelle Droite, pour qu’au final un Alain de Benoist ose dire qu'”il est ridicule de croire en Jupiter”. Le paganisme mis en avant par antichristianisme m’a toujours paru mensonger.
    Je vous remercie, Michel, pour votre courtoisie, votre sens de l’hospitalité, qui est plaisant et plus qu’estimable. Tous n’ont pas cette noblesse d’attitude à l’égard de gens affirmant leur paganité. Il va de soi que mon objectif ici n’est en aucune manière de faire la promotion de ce qui n’est pas l’objet de votre blog. Le sujet a simplement amené à confronter des points de vue amenant à l’évocation des convictions religieuses de chacun.
    Bien cordialement
    [Mince, “euro-socialiste” c’est encore pire que ce que je croyais. Et vous êtes beaucoup comme cela, ou êtes vous tout seul, égaré sur le net ? L’européanité, j’ignore ce que c’est. Franchement.
    Mais quand vous écrivez ” Les prêtres païens étaient des responsables politiques en charge d’une fonction sacerdotale.” vous adhérez à ce mélange politico-religieux, contraire à la saine laïcité, puisque vous faites du prêtre païen un responsable politique, mélange du religieux et du politique.
    Ce que le christianisme, à la source de la civilisation européenne, a su distinguer.
    MJ]

  15. 1. J’ai dû mal m’exprimer alors je précise sur le cas des prêtres du paganisme. A l’origine, les prêtres étaient choisis parmi les citoyens, c’est ce que j’entendais par “responsables politiques”. Ils n’étaient pas choisis par hasard mais en vertu de leurs qualités éminentes. Ce que je veux dire c’est qu’un prêtre païen avait un rôle fort réduit – présider aux assemblées, exécuter les rites, et transmettre la connaissance des mythes et traditions. C’est à dire qu’il avait essentiellement une fonction représentative. Il n’était pas un guide spirituel, pas un maître de sagesse.
    Dans le cas spécifique du druide, à l’image de son dieu tutélaire Lug, était “polytechnicien”, c’est à dire qu’en vingt ans de formation, il apprenait de nombreux métiers. Il était poète, juriste, enseignant, architecte, conseiller politique… et parmi ses rôles, il était prêtre.
    Les anciens avaient un principe, pan esti politikon. La religion était ainsi un élément du politique. On peut se satisfaire qu’il n’en soit plus ainsi ou le regretter.
    2. L’européanité ? C’est beaucoup de choses. Une somme d’héritages, une parenté culturelle et anthropologique multimillénaire, une parenté linguistique (pour 96% des européens au moins), une spiritualité commune (ce qu’en Russie on appelle la double foi, celle qui fait qu’une fête dédiée au dieu Mars [le 11 novembre] soit ensuite dédiée à Saint Martin, “Martinus” signifiant “petit Mars” en latin) [cf Pierre Saintyves, “Les saints successeurs des dieux”, 1910]. Ce 80% de commun entre européens qu’évoquait Ortega Y Gasset. Ce qui fait aussi qu’un chinois sera incapable de distinguer un français d’un allemand ou d’un russe.
    L’européanité c’est l’évidence qui saute aux yeux de tous ceux qui ne sont pas européens.
    Sur ces bonnes paroles, je vous souhaite une bonne soirée et un bon dimanche/soldi.

  16. A ceci près que St Martin ne doit rien de ses oeuvres et de ses miracles à un Mars quelconque, petit ou grand, sinon le hasard de son nom. Mais comme il n’était pas encore sur les autels, personne ne pouvait se réclamer de son patronage : il faut bien que quelque un commence une lignée. L’Eglise, une fois encore, n’a pas “baptisé” une force étrangère pour se l’approprier, elle a dégagé dans un comportement humain ce qui relevait de la similitude divine (Genèse) pour le louer et le donner en exemple à la vénération des foules. C’est le nom de Martius qui s’en est trouve baptisé !

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