D’Aurelio Porfiri, éditeur et écrivain catholique italien, pour le Salon beige:
Vous avez peut-être vu des propositions dans lesquelles le chant grégorien est présenté comme “musique de méditation”. Pour beaucoup, cela semble être une exaltation du chant grégorien, presque une récupération de sa fonction importante après trop d’années de négligence et d’ostracisme. A cela s’ajoutent toutes ces théories qui voient le chant grégorien comme bénéfique pour la santé ou qu’il fait produire plus de lait aux vaches, etc.
Je ne pense pas que ce renouveau new-age du chant grégorien soit une bonne chose. Cela tient au simple fait que la fonction première du chant grégorien peut être perdue, celle d’être une musique liturgique. La méditation à laquelle incite le chant grégorien n’est pas de type bouddhique, mais a un centre précis, et ce centre est Dieu. Le chant grégorien est d’abord la prière incarnée, non pas la prière au sens religieux vague, mais prière qui ne peut trouver sa nourriture que dans la liturgie.
Il faut veiller à associer le chant grégorien à quelque chose qui lui est fondamentalement étranger et qui est finalement aussi superflu. Si le chant grégorien perd sa fonction première, il perd complètement le but pour lequel il a été conçu.
Le discours de l’exécution du chant grégorien en concert n’est pas très différent. Aussi bien interprété soit-il, cela aussi est un véritable étirement, le chant grégorien n’est pas une musique de concert. N’oublions pas qu’elle trouve sa dimension la plus importante et la plus essentielle dans l’action liturgique. Malheureusement, nous vivons aujourd’hui à une époque où le chant grégorien a été expulsé de la liturgie et donc faire croire que c’est une musique qui sert un autre but est complètement déplacé.
En fait, ce n’est même pas bien de l’appeler “musique”, certains disent “musique grégorienne” mais ça sonne vraiment impropre. C’est une prière chantée, je crois qu’il n’y a pas de meilleure définition que celle-ci pour comprendre ses objectifs. L’Église y chante ses louanges au Créateur de toutes choses. En perdant le chant grégorien, nous avons non seulement perdu un type de chant, mais nous avons également perdu un chemin spirituel fondamental pour être conduit sur la pointe des pieds dans la présence de Dieu.
nicole2
En octobre 2005, ma mère étant dans le coma, au service Réanimation de l’hôpital de Garches (suite à un accident), la seule musique que je pouvais écouter, c’est du chant grégorien, dont les paroles (surtout “Puer natus est pro nobis”) soutenaient mon courage. Et, plus tard, après le décès de ma mère, atténuaient mon chagrin..
TontonJean
Les notes du grégorien sont placées pour orner le texte et les “vocalises” sont mises au dessus du mot que l’auteur a voulu mettre en valeur.
Le grégorien c’est un peu comme les images faites pour orner un livre pour enfant: au dessus de chaque phrases, ou presque, l’auteur fait un dessin qui orne le paragraphe!
prenons l’introït du jour de Noël: Puer natus est: les notes élancent les mots avec une joie envoyant ce nouveau né. etc…
Antrustion
C’est bien une prière chantée; c’est comme cela que j’en ai parlé à un novice franciscain basque espagnol, qui découvrait le grégorien en apprenant le Christus Factus est avec moi. “You’have to pray when tou sing” (je ne parlais ni basque, ni espagnol !).
Mais cette prière est aussi méditation, ou bien elle y conduit : Souvent, lorsque je suis confronté aux turpitudes de cette “lacrimarum valle”, me revient automatiquement en tête le “quare fremuerum gentes ?” qui ponctue la fin d’un introït du temps de Noël.
Enfin, la méditation sur la mort est source d’une grande joie pour moi, rien qu’en imaginant dans quel état d’esprit je serai alors : “laetatus sum in his quae dicta sunt mihi ; in domum Domini ibimus”. À quelle magnifique voyage et quel splendide accueil nous nous préparons ! Moi qui n’est jamais atterri en Transall bien qu’ayant décollé plusieurs fois avec, je peux dire que sauter de la portière est vraiment peu de choses en comparaison !