Comme dans la culture ou le vin, les moines ont été précurseurs dans l’art de brasser de la bière. Entre autres, les moines en ont fait un signe d’hospitalité pour les pèlerins de passage, ou encore un moyen de donner de l’emploi à la région (comme à Chimay). Depuis 1997, toute bière “trappiste” doit même reverser une partie des revenus qu’elle génère à des œuvres de charité.
Mais au-delà de l’histoire et de la noblesse que porte chaque bière monastique, vous pourrez surtout savourer de grands crus, qui occupent souvent la tête des classements de la meilleure bière du monde : Westvleteren 12, Orval, Rochefort 10 etc…
Pour déguster ces trésors, autant le faire dans les règles de l’art… C’est ce qu’on vous explique dans cet article !
Déguster une bière trappiste, pas à pas
Une bière trappiste est, par définition, une bière d’exception. Il convient donc de la déguster en bonne et due forme !
Tout d’abord, il vous faut le bon matériel :
- une vraie bière trappiste (avec le logo de certification “Authentic Trappiste Product” sur l’étiquette de la bouteille) – on vous en parle un peu plus bas
- … à la bonne température. Cela varie évidemment selon chaque bière trappiste : La Trappe Witte se déguste très fraîche entre 4°C et 6°C, tandis que la Chimay Bleue se déguste entre 10°C et 12°C, et la Rochefort 10 entre 12°C et 14°C. Vous trouverez en général cette info sur l’étiquette de la bouteille
- un décapsuleur, sinon vous n’irez pas bien loin !
- un verre “calice”, qui est le type de verre recommandé pour déguster une bière trappiste. Le nom ne s’invente pas, nous sommes chez des moines trappistes… Chaque abbaye recommandant bien sûr son propre verre calice !
Ensuite, pour verser, il faut incliner la bouteille et le verre calice à 45° environ, et verser doucement à une hauteur de 4-5cm. L’idée est de préserver un peu de pétillance des bulles (ce qui est nécessaire pour profiter d’une bière), et en même temps de ne pas boire tout ce gaz, votre ventre vous remerciera !
Enfin, comme pour un grand vin, la dégustation d’une bonne trappiste suit trois grandes étapes :
- On contemple d’abord. Pour cela, on va regarder la robe : sa couleur (est-elle blanche, blonde, ambrée, brune ou noire ?), ainsi que sa clarté (est-elle trouble ou limpide ?). Ensuite, on observe la mousse de la bière : sa couleur (est-elle blanc neige, blanc cassé, beige, marron, brun foncé ?), sa texture (très aérée, moyennement épaisse ou très épaisse) et sa persistance. Toutes ces infos ne vont pas forcément révéler si cette bière trappiste va vous plaire ou non, mais il faut l’apprivoiser !
- Étape suivante : le nez ! A ce stade, on plonge franchement son nez dans le verre calice pour sentir les généreux arômes. Les bières trappistes dégagent en effet, selon les recettes, des notes de fruits blancs, de caramel, d’épices, de pain grillé, d’agrumes etc… Passez-y le temps qu’il faut pour bien identifier quelle(s) famille(s) d’arômes sont présents !
- Dernière étape : en bouche ! Ici, on prend une large gorgée de bière, qu’on avale généreusement en profitant de la rétro-olfaction : on agite la bière dans la bouche, tout en soufflant par le nez. A ce moment-là apparaissent alors des notes d’agrumes, des notes de fruits exotiques, parfois des notes de torréfaction ou de café etc… tout dépend encore une fois de la bière trappiste que vous êtes en train de déguster !
Moines trappistes de l’abbaye de Zundert (aux Pays-Bas) contemplant leur bière © SNOW DONUTS
Qu’est-ce qu’une bière trappiste ?
Déguster une bière trappiste c’est bien, mais encore faut-il savoir ce que c’est ! Car oui, le terme de bière trappiste est très contrôlé, notamment pour éviter les contrefaçons. Voici les trois critères à respecter scrupuleusement :
- la bière doit être brassée dans l’enceinte du monastère (et pas chez un ami brasseur !)
- la bière doit être brassée par des moines trappistes, ou bien sous leur strict contrôle (contrôle des recettes, contrôle des volumes, contrôle de la communication etc…)
- les bénéfices de la brasserie doivent être alloués à la communauté des moines, et en cas de surplus, à des oeuvres sociales
Une bière qui réunit ces trois conditions peut donc arborer le logo “Authentic Trappist Product”, délivré depuis sa création en 1997 par l’Association Internationale Trappiste. A ce moment, elle devient donc officiellement une “bière trappiste”. Ça ne rigole pas !
Moines trappistes de l’abbaye de Zundert (aux Pays-Bas) en plein office © Abbaye de Zundert
Quelles sont les bières vraiment monastiques ?
Le sujet est complexe, mais on vous résume les grandes lignes ici.
Une “bière d’abbaye” est une bière qui fait seulement référence à la vie monastique, ou à une abbaye qui parfois n’existe plus, voire n’a jamais existé. Le terme de bière d’abbaye est donc très flou, et ne certifie en rien l’authenticité monastique d’une bière… Dans la majorité des cas d’ailleurs, il n’y a effectivement aucun lien avec des vrais moines vivants. C’est bien dommage !
En revanche, une bière trappiste est un terme rigoureusement contrôlé par l’Association Internationale Trappiste, qui certifie que la bière respecte bien les trois critères dont on a parlé précédemment. Déguster une bière trappiste, c’est donc avoir la garantie de l’implication d’une vraie communauté de “moines cisterciens de la stricte observance” (surnommés trappistes). Santé !
Mais alors… quelles sont-elles ? Pour être précis, il faut dire qu’aujourd’hui en 2025, 10 abbayes dans le monde peuvent apposer la marque “Authentic Trappist Product” sur leurs bières, ce qui fait au total une trentaine de bières trappistes différentes. Voici la liste :
- Abbaye d’Orval (Belgique)
- Abbaye de Westmalle (Belgique)
- Abbaye de Westvleteren (Belgique)
- Abbaye de Scourmont / Chimay (Belgique)
- Abbaye de Rochefort (Belgique)
- Abbaye de Konginshoeven (Pays-Bas)
- Abbaye de Zundert (Pays-Bas)
- Abbaye de Mount-Saint-Bernard (Angleterre)
- Abbaye de Tre Fontane (Italie)
- Abbaye du Mont des Cats (France) – cas particulier car brassée à Chimay
Parmi les dernières abbayes à avoir arrêté de brasser de la bière trappiste, on retrouve :
- Abbaye d’Achel (Belgique) – perte du logo ATP en janvier 2021
- Abbaye de Spencer (Etats-Unis) – arrêt du brassage en mai 2022
- Abbaye d’Engelszell (Autriche) – arrêt du brassage en mai 2023
A cette liste, il faudrait ajouter bien sûr les quelques fiertés françaises, en dehors de l’ordre cistercien de la stricte observance :
- Abbaye Saint-Wandrille – la première abbaye (bénédictine) française a brasser de la bière
- Abbaye de Lagrasse – la deuxième abbaye française a brasser de la bière, mais en 2025, ce sont encore des cuvées confidentielles, vendues sur place uniquement…
- Abbaye de Boulaur – avec ses bières “Or et Mousse” (jeu de mot avec “Oremus”), fabriquées par un brasseur local, avec les céréales des sœurs cisterciennes !
- Abbaye de Solignac – dont les bières sont, pour l’instant, brassées par un brasseur local pour les moines bénédictins
Moines bénédictins de l’abbaye Saint-Wandrille, dégustant leur bière ambrée, dans leur cloître © Abbaye Saint-Wandrille
Où trouver des bières trappistes ?
Pour trouver des bières trappistes, le mieux est bien sûr d’aller directement à l’abbaye de votre choix ! Sinon, un bon caviste devrait avoir quelques références en stock. Et évidemment, allez voir le rayon “bières d’abbayes et bières trappistes” de chez Divine Box !