A l’occasion du 4e anniversaire de la mort d’Arnaud Beltrame, une de nos lectrices présente à la conférence de Paris à St-Sulpice le 8 mars donnée par le Père Jean-Baptiste, a pris des notes – qu’elle nous a très aimablement transmises pour en faire profiter tous les lecteurs – sur le portrait spirituel fait par le prêtre qui a donné les derniers sacrements à Beltrame.
Le Père Jean-Baptiste, chanoine de Lagrasse, était invité par la paroisse Saint-Sulpice de Paris, plus grande église de la capitale, à donner son témoignage sur le gendarme, lui qui le prêtre qui l’a le mieux connu les 2 dernières années de sa vie et devait le marier religieusement avec Marielle.
Un parcours spirituel complexe avant de choisir la foi chrétienne
Arnaud Beltrame, baptisé enfant par convenance, n’a reçu aucune éducation chrétienne. À travers les propres écrits d’Arnaud Beltrame, dans des carnets inachevés, retrouvés par sa femme après sa mort, le Père Jean-Baptiste reconstitue son cheminement. « J’ai été athée jusqu’à l’âge de 25 ans, puis j’ai commencé à croire ». A 33 ans, il se convertit, fait son catéchuménat et reçoit la 1re communion et la confirmation à 36 ans. Il fréquente beaucoup l’abbaye de Timadeuc et admire la radicalité du choix de vie des frères.
Le Père Jean-Baptiste révèle que le Colonel Beltrame avait toujours un chapelet dans sa poche. Il avait écrit dans ses notes : « Récitez souvent le chapelet ! C’est l’Arme la plus puissante pour vous sauver ! » en rouge surligné de vert. Il commente, amusé : quand c’est le Père Jean-Baptiste qui dit arme la plus puissante c’est une chose, quand c’est un officier de gendarmerie qui a toujours une arme de service sur lui c’est autrement éprouvé !
Un couple uni et chrétien, désireux de fonder un foyer chrétien et désireux d’enfants
Ensuite, le Père Jean-Baptiste Golfier détaille sa rencontre avec le couple Arnaud – Marielle Beltrame. Le jour de leur mariage civil, indispensable pour obtenir la mutation géographique d’Arnaud, ils visitent l’abbaye de Lagrasse dans le cadre des journées du patrimoine et rencontrent par hasard le chanoine, qu’ils prennent pour un moine. Le contact passe immédiatement, ils cherchent un prêtre pour les préparer au mariage religieux, et la préparation aux fiançailles et les couples constituent justement la spécialité du chanoine. Une trentaine de rendez-vous en 2 ans suivront, où le prêtre est témoin de l’évolution de ce couple très amoureux, et de l’enthousiasme volubile d’Arnaud Beltrame qui, grâce au Père Jean-Baptiste avec lequel l’admiration est réciproque, approfondit la doctrine catholique et notamment le sujet des tactiques du diable. Le Père Jean-Baptiste détaille le cursus suivi par le couple et montre des extraits de la bouleversante lettre d’intention au mariage qu’Arnaud lui a envoyé 2 jours et demi avant l’attentat où il explique sa ferme adhésion à l’ensemble de l’enseignement de l’Eglise et son aspiration à fonder un foyer chrétien selon les plans du Seigneur, s’engageant à accueillir tous les enfants que le Bon Dieu voudra bien lui donner dans sa bonté.
La Semaine Sainte du Colonel, configuré au Christ par son geste singulier à la résonnance spirituelle intense
Le Père Jean-Baptiste revient ensuite sur le jour de l’attentat. Il rappelle que le Colonel a eu l’idée prémonitoire peu de temps avant d’organiser un exercice-test de prise d’otages dans un supermarché, mode opératoire d’attentat pourtant encore jamais arrivé en France. Le jour de l’attentat, il raconte un signe sidérant qu’il a reçu et qui ne lui était jamais arrivé. Alors qu’il priait à l’office de none dans son abbaye, et sans rien connaître alors de l’implication d’Arnaud dans l’attentat, il voit dans un flash son ami Arnaud Beltrame couvert de sang. Ceci arrive alors qu’il récite le Psaume 88, psaume d’Isaïe prophétisant les souffrances du Christ, ici s’actualisant parfaitement à la situation d’Arnaud, prouvant que la Parole de Dieu est vivante. C’est seulement à 20h que le prêtre apprend que son ami est impliqué dans les événements. Il va alors au chevet d’Arnaud, priant sur lui avec Marielle à ses côtés. Une infirmière s’arrange pour qu’une médaille miraculeuse soit collée sur son corps, lui dont une large plaie au cou est bandée, afin que la Vierge Marie qu’il aimait tant soit auprès de lui dans les derniers instants. En recoupant avec les gendarmes devant l’hôpital, le Père Jean-Baptiste découvre que son flash extraordinaire est arrivé au moment de l’assaut de Beltrame avec le terroriste.
Mise au point sur la franc-maçonnerie
Le Père Jean-Baptiste est également revenu sur la franc-maçonnerie à laquelle avait été initié Beltrame avant sa conversion. Il n’en avait pas parlé avec le Père, qui a d’abord été choqué de cette information après son décès, au point, par honnêteté et vérité, de vouloir arrêter tout hommage sur la dimension catholique, imaginant une double vie totale, et a ensuite enquêté sur le sujet. Personne n’avait su expliquer à Arnaud Beltrame l’incompatibilité du catholicisme – auquel il s’identifiait même à la loge – et la franc-maçonnerie. Comme il n’était pas d’un degré très élevé, il n’en voyait pas l’occultisme, réservé aux grades élevés, d’autant que dans sa loge déiste, on le laissait doucereusement parler de sa foi catholique, prêter serment sur l’évangile de Saint-Jean ou disserter sur les Templiers, mais y voyait un lieu où il avait noué des amitiés sincères. S’il avait été mis au courant, le Père Jean-Baptiste l’aurait rouspété et il est convaincu qu’Arnaud aurait avec ces franches mises au point coupé tous les ponts restant avec la franc-maçonnerie, son souci d’honnêteté intellectuelle et de mise en cohérence étant tels. En revanche, le Père réfute catégoriquement qu’Arnaud était assidu en maçonnerie, contrairement à ce qu’un officiel de la loge a dit faussement. Suite à sa mutation dans l’Aude, il n’avait d’ailleurs jamais pris attache avec sa loge de Carcassonne qu’il aurait dû fréquenter. Le Père Jean-Baptiste s’amuse de constater qu’il profite des conférences sur Arnaud Beltrame pour rappeler fermement l’incompatibilité entre appartenances catholique et maçonnique, pas assez dite. La leçon est qu’une conversion sincère comme celle d’Arnaud peut être accompagnée d’erreurs qui restaient à purifier. Signe de la primauté de la référence catholique, c’est le Père qui a récupéré récemment son ancien tablier de franc-maçon, qu’il a exorcisé.
Arnaud Beltrame peut-il être déclaré saint ?
Le Père ensuite témoigne de l’aspiration à la sainteté très forte chez Arnaud. Il avait été très fier de se dire que le premier couple béatifié en tant que couple, les Beltrame-Quattrocci, était peut-être de sa famille, ayant des origines en partie italiennes. Sans s’avancer sur l’ouverture d’un éventuel procès de béatification, décision qui serait du ressors de l’évêque de Carcassonne ou de celui des Armées, à partir de l’an prochain (délai des 5 ans après la mort), il décrit ce qu’en serait une voie possible : la nouvelle catégorie « offrande de vie », promulguée en 2017 par le Pape François, s’ajoutant aux voies déjà existantes de martyre pour la foi ou héroïcité des vertus, correspondrait bien au cas d’Arnaud.
En revanche, le prêtre a témoigné de grâces surnaturelles, y compris la guérison d’un cancer, déjà obtenues par son intercession. Plus fort encore, deux conversions, après le geste d’Arnaud. Celle d’une adolescente, n’ayant reçu dans sa famille aucune éducation religieuse, et qui en mai 2018 a entendu le Colonel lui dire de rester dans l’église dans laquelle elle était entrée par hasard ; à la suite de la messe à laquelle elle assistait pour la 1re fois sans le savoir, elle a reçu instantanément le don de la foi et s’est préparée, seule de son entourage, au baptême qu’elle a reçu en 2021. Et celle… de l’otage, Julie, qui a permis au Père Jean-Baptiste d’en parler au cours de la conférence, qui est elle aussi en chemin vers le baptême, se convertissant ainsi à la religion de son sauveur.
Enfin, le Père Jean-Baptiste a exposé des leçons spirituelles à tirer du geste d’Arnaud ainsi que sa méditation des raisons ayant pu le pousser à poser cet acte surhumain à quelques semaines de son mariage, identifiable à une motion de l’Esprit Saint.
Après la prière du gendarme qu’Arnaud affectionnait (« je suis gendarme et je veux être chrétien… »), le conférencier a invité l’assemblée à réciter ensemble la prière adressée à Arnaud Beltrame ayant reçu l’imprimatur de l’évêque aux Armées.
En sortant de St-Sulpice, chacun armé d’une petite image de prière généreusement distribuée par les organisateurs, alors que les auteurs de la nouvelle BD et du livre « Arnaud Beltrame, gendarme de France », ayant assisté à la conférence, dédicacent leurs ouvrages, on pressent que l’affaire Arnaud Beltrame n’est pas terminée, et, ayant aperçu une partie de l’âme d’Arnaud Beltrame incroyablement insoupçonnée jusque-là, que le Colonel est aujourd’hui d’une actualité encore plus forte, 4 ans jour pour jour après sa mort héroïque, après avoir donné sa vie pour son prochain à l’exemple du Christ.
F. JACQUEL
“Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime”.
Le Colonel Arnaud Beltrame est allé au-delà : il a donné sa vie pour sauver une parfaite inconnue.
Hier après-midi, je suis aller porter un bouquet de roses blanches à la brigade de Gendarmerie dont je dépends territorialement. L’Adjudant-chef, adjoint du Commandant de la brigade, m’a accompagné jusqu’au pied du mât des couleurs où il m’a invité à déposer mes fleurs.
Nous avons ensuite observé une minute de silence à la mémoire de cet Officier d’exception.
J’avais laissé une carte de visite “à la mémoire du Colonel Arnaud Beltrame, victime de la barbarie islamique”.