Nous avons déjà évoqué ici l’importance cruciale de la Cour suprême dans la vie politique américaine, en particulier sur les sujets de société tels que l’avortement, la peine de mort ou les "droits" des homosexuels.
Bush y avait désigné en octobre le juge Samuel Alito pour remplacer Sandra O’Connor, démissionnaire. Ce choix, après le malheureux épisode Harriet Miers, avait été bien accueilli par les conservateurs. Dans le système américain, le candidat désigné par le Président doit ensuite être approuvé ("confirmé") par le Sénat. Les auditions d’Alito au Sénat ont eu lieu ces trois derniers jours, et un vote aura lieu au cours de ce mois. Hors du Sénat, des campagnes médiatiques concurrentes des pro-Alito et des anti-Alito se sont opposées.
Le consensus est que les auditions se sont bien déroulées pour Alito, et qu’il devrait être confirmé. Un indicateur assez ludique, et souvent fiable, est le "bookmaker" en ligne TradeSports : en fonction des paris, la "cote" de différents événements sportifs ou politiques baisse ou descend. Or la prévision qu’Alito sera confirmé y est à plus de 93%.
La confirmation d’Alito ferait passer de trois à quatre (sur neuf) le nombre de juges à la Cour suprême présumés "conservateurs", tous catholiques d’ailleurs, contre un centriste et quatre engagés "à gauche". Le Figaro se trompe donc en prétendant qu’Alito "ancrera la Cour suprême à droite", et doublement (il se trompe aussi en évoquant Harriet Myers – c’est Miers…).
D’abord parce qu’il ne s’agit que d’un rééquilibrage. Une majorité de 5 contre 4 sera par exemple présumée être encore en faveur du statu quo désastreux sur l’avortement. La Cour suprême restera plus "à gauche" qu’ "à droite".
Ensuite, parce que parler de juges "conservateurs" est plus légitime que de parler de juges "de droite". Dans le paysage judiciaire américain, il n’y a pas de symétrie entre une "gauche" et une "droite" : il y a bien une gauche, qui fait de l’activisme judiciaire pour imposer ses idées; mais les "conservateurs" ne veulent pas faire la même chose à l’envers ("à droite"), ils veulent que cesse l’activisme et que le système judiciaire retrouve impartialité et retenue.