Editorial de Philippe Maxence dans L’Homme nouveau :
Fin novembre, l’avortement a été de nouveau au devant de l’actualité. À l’initiative d’un député de la France insoumise (LFI), mais avec le soutien de la majorité présidentielle, l’Assemblée nationale a voté à une très large majorité (337 voix pour, 32 contre) en faveur de l’inscription du droit à l’avortement dans la Constitution.
Un vote symbolique, qui doit encore être confirmé par le Sénat et, éventuellement, par un référendum. Quoi qu’il en soit de l’avenir de ce texte, l’idée même de faire entrer le droit à l’avortement dans la Constitution, de le « sanctuariser » en quelque sorte, montre la direction profonde donnée par les institutions de notre pays : celle de la mort.
L’AVORTEMENT, UN MOINDRE MAL ?
Face à cette volonté affirmée et largement partagée par les responsables politiques, certains ont pensé un temps proposer la constitutionnalisation de la loi Veil, au titre d’un « moindre mal ».
Mais la mort d’un innocent ne reste-t-elle pas toujours un mal, qu’il faut combattre et empêcher ? Dans un article publié sur ce site, le chanoine Benoît Merly apporte des éléments de réponse. Je n’y insiste donc pas.
L’AVORTEMENT POSE NOTAMMENT DEUX PROBLÈMES POLITIQUES
En revanche, cet épisode parlementaire, odieux par ce qu’il signifie, pose deux problèmes de fond que nous ne pourrons pas toujours esquiver sous prétexte de ne pas troubler notre confort dans un monde de plus en plus antichrétien.
Le premier entre dans une perspective assez large : doit-on laisser à la volonté générale le pouvoir de remettre en cause la loi naturelle, particulièrement en ce qui concerne le respect de la vie innocente ? C’est tout le problème posé par la Constitution de 1958 qui renvoie dans son préambule à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Celle-ci postule en son article 6 que « la Loi est l’expression de la volonté générale ». Tant que nous ne remettrons pas en cause cette affirmation, notre défense de la vie humaine risque d’être vaine. Nous sommes là en effet face au cœur nucléaire de notre système politique.
Celui-ci entraîne justement un deuxième problème. Celui de la légitimité d’un système politique qui impose toute une série logique de lois directement contraires à la loi naturelle et donc au respect de la vie. Dans Evangelium Vitæ, Jean-Paul II écrivait
« que, lorsqu’une loi civile légitime l’avortement ou l’euthanasie, du fait même, elle cesse d’être une vraie loi civile, qui oblige moralement » (n. 72).
Ne conviendrait-il pas d’élargir ce principe au système lui-même qui ne cesse d’émettre des lois civiles qui légitiment des pratiques directement opposées à la loi naturelle. Autrement dit, ce système est-il encore lui-même légitime ? […]