Article proposé par Xavier Soleil :
"Quand Manuel Valls évoque René Benjamin, à propos de la liberté d’expression, on croit rêver.
Dans une interview au journal Le Monde du 7 janvier, le professeur émérite de droit public à l’université de Paris Danièle Lochak, après avoir noté que Benjamin était, selon l’expression consacrée, un écrivain d’extrême droite, flaire le danger d’un tel rappel dans une occurrence totalement différente des scènes de guerre civile que celui-ci avait connues.
En effet, à quelques jours du début de sa tournée, aucune manifestation n’est prévue contre l’humoriste Dieudonné. Jamais d’ailleurs il n’y eu rien de tel à son égard.
De plus, comme l’a noté Yves Daoudal, l’arrêt du Conseil d’État du 19 mai 1933, évoqué par le ministre de l’Intérieur, avait cassé l’arrêté du maire de Nevers, interdisant une conférence de René Benjamin – sur Courteline et Sacha Guitry – au motif que son premier devoir aurait été de prendre les mesures de sécurité nécessaires au maintien de l’ordre public, en prévision d’éventuelles manifestations des syndicats d’instituteurs, appuyés par les « gros bras » de la CGT. Rappelons que, pendant des années, les instituteurs syndiqués, malmenés par Benjamin, voulurent lui interdire de parler. Protégé par les Camelots du Roi, il parla toujours. A Saint-Etienne, un Camelot fut tué. A Lyon, le commissaire central avait dû mobiliser seize cents hommes.
Saisissons l’occasion pour rappeler que René Benjamin, né en 1885, blessé en septembre 1914, écrivain, journaliste, conférencier hors pair, prévoyant, dès le début des années 20, comme Maurras et ses amis, la survenue d’une nouvelle guerre mondiale, lutta, pendant des années, pour l’empêcher. L’impéritie des gouvernements français – 40 en 20 ans, belle démocratie ! – précipita la France dans l’abîme que l’on sait.
Rappelons aussi ses meilleurs livres : Gaspard (1915, prix Goncourt), Valentine ou la folie démocratique (1924), La prodigieuse vie d’Honoré de Balzac (1925), Clemenceau dans la retraite (1930), Chronique d’un temps troublé (1938), L’Homme à la recherche de son âme, témoignage d’un Français sur le drame de ce temps (1943), Les Innocents dans la tempête (1944), L’Enfant tué (1946), Le Divin Visage (1948). Relire son oeuvre, c’est réapprendre l’histoire. Il en fut un témoin, et parfois un acteur, capital.
Rappelons enfin la publication récente, par les Éditions Pardès, d’un Qui suis-je René Benjamin, en 2011, ainsi que des deux premiers numéros des Cahiers René Benjamin, consacrés, l’un, à une pièce de théâtre inédite, reçue en 1934, à la Comédie-Française, Balzac, le second, à ses Carnets de Guerre (1939-1948), également inédits.
René Benjamin est mort en 1948. A cette époque sinistre, un tel écrivain, l’un des plus brillants de sa génération, put être totalement occulté."
c
On peut presque dire “Merci M. Valls”.
Il aura peut-être au moins l’utilité de faire sortir de l’oubli René Benjamin!
tadea
Merci également!
Je ne concassais pas cet écrivain.
tadea
Pardon, je corrige vite……..Je ne “CONNAISSAIS” pas cet écrivain.
Gérard de Montigny
Etant élève des jésuites à Nantes ,vers 1958 je me rappelle avoir apporté, et lu avec l’aval de la censure jésuite, “Aliborons et démagogues”, de René Bejamin, un tourangeau comme moi. Une expression revenait en permanence :”un instituteur laïque et syndiqué”. J’ai conservé en mémoire cette phrase, toujours d’actualité!