La Repubblica a interviewé le Père Rodrigo Miranda, missionnaire de l’Institut de la Parole incarnée, qui a passé les quatre dernières années à Alep. Chilien, on peut lui accorder le crédit d'être neutre dans le combat médiatique entre l'Occident et la Syrie :
"(…) « la guerre est arrivée à l’improviste, et a frappé des personnes qui ne se seraient jamais attendues à une telle réaction face à un conflit qui a tout d’artificiel. » Cette dernière phrase nous intrigue un peu. « La population syrienne, nous explique-t-il, n’a jamais demandé un changement, ni politique ni culturel. Jamais. Ils étaient bien comme ils étaient. Je ne veux pas faire les louanges d’Assad, mais ce que je veux dire, c’est que le conflit a été le fruit d’un processus aussi rapide que violent. Parmi les combattants, seuls 2% sont syriens, les autres sont tous des étrangers, de 83 nationalités différentes. »
Avant la guerre, les chrétiens d’Alep étaient au nombre d’environ 300 000. Des 4000 fidèles qui fréquentaient la paroisse de Père Rodrigo, il n’en reste que 25 aujourd’hui. Tous les autres ont fui, ou bien « ils ont été tués, surtout les femmes et les jeunes. Il y a eu beaucoup d’enlèvements, » nous explique le curé. En effet, les chrétiens de Syrie ont plus que les autres été pris pour cible par des groupes islamistes radicaux. « Cela survient du fait de leur grande influence dans de nombreux secteurs de la société, et parce qu’ils ont cette capacité au dialogue, cette faculté de s’ouvrir à l’autre, de le respecter [qui les rend si vulnérables]. Quand nous entendons dire que l’EIIL avance dans le nord de l’Irak ou de la Syrie, c’est parce que ces zones sont peuplées de chrétiens, et la réponse d’un chrétien est très différente de celles des autres [confessions]. » (…)
À quelques mètres de la paroisse de Père Rodrigo se trouvait l’Université d’Alep, qui a été le théâtre d’un violent attentat le 15 janvier 2013, attentat dans lequel des centaines de jeunes étudiants ont perdu la vie. « Il était midi, l’heure de pointe, lorsque les trois missiles sont tombés. L’université était pleine de monde, et la plupart étaient dehors, » nous raconte-t-il. « Après la frappe du premier missile, j’ai commencé à aider les personnes à côté de moi. Ensuite, alors que je courais vers l’université pour aller aider les autres, j’ai vu le 2e missile arriver. J’ai tenté de me réfugier entre un mur et quelques voitures. J’ai entendu un fracas, puis un long silence, et après… le désastre. Ça a été un massacre. Au début, poursuit-il, on nous a dit que les missiles avaient été tirés par l’armée d’Assad. Mais notre quartier était contrôlé par l’armée régulière. Ça voudrait dire qu’ils se seraient tirés sur eux-mêmes (?). Après, ils ont raconté que l’armée avait frappé par erreur. Mais si tu te trompes, tu le fais une fois, pas trois. L’autre hypothèse est que ce sont les rebelles qui ont tiré, pour frapper l’armée qui contrôlait le quartier. » (…)"
PapounetBGT
Merci pour ce précieux témoignage.
Louise
Merci pour cet article.
Pour aider les Syriens
https://www.aed-france.org/projets/careme-2015-aux-cote-des-chretiens-qui-souffrent/
http://www.oeuvre-orient.fr/site-web/nous-aider/faire-un-don/formulaire-de-don/