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Des chefs : prêtres, prophètes et rois

Des chefs : prêtres, prophètes et rois

François Bert est interrogé dans Courrier Cadres sur le retour des chefs et de l’autorité dans les entreprises, suite à son ouvrage. Pour que tout le monde comprenne l’analogie, il prend comme exemple des politiques :

Nous sommes tous, suivant l’image biblique “prêtres, prophètes et rois”. Mais il existe bien des “prêtres”, des “prophètes” et des “rois”.

Le problème, c’est quand on les intervertit. Un prêtre, c’est quelqu’un qui a d’abord l’intelligence du lien. Un prophète, c’est quelqu’un qui se nourrit de données pour créer du contenu. Un roi, c’est quelqu’un qui se nourrit des contextes pour produire de la décision.

En politique, le drame que l’on a, c’est qu’on n’a plus que des prophètes et des prêtes, on n’a plus de roi.

Pour illustrer, Nicolas Sarkozy ou François Hollande sont deux formes de prêtres. Quand le métier politique consiste à être candidat, ces personnalités accèdent facilement au pouvoir car elles sont excellentes pour se vendre. Mais dès qu’elles sont au pouvoir, leur métier change. On ne leur demande plus de se vendre, mais de décider dans le cloître du discernement d’un chef isolé. Et là, elles sont perdues. Du coup, elles communiquent sur des éléments de détail.

Tandis qu’un Alain Juppé, un Jacques Attali ou un Henri Guaino sont des prophètes. Ce sont des sachants, mais le problème c’est qu’ils construisent des paquebots dans une crique grecque. Des trucs parfaits qui ne peuvent pas sortir.

Dans ce cas, qui sont les rois ?

Il n’y en a quasiment pas, c’est le problème. L’univers politique est totalement dépeuplé de rois, un terme à ne pas prendre au premier degré.

Si la politique est une jungle aujourd’hui, on a une alliance improbable de Tartarin et de Botanistes.

Ce que ne supportent plus les gens dans les entreprises comme en politique, c’est l’autorité des planificateurs, qui vous font des plans parfaits et qui considèrent que parce que le plan est bien conçu, cela va dérouler.

Il y a des générations de directeurs industriels qui considèrent que leur légitimité c’est le savoir et ils font des plans pour se sentir exister. Sauf que comme on dit dans l’armée, le premier mort de la guerre, c’est le plan !

Le boulot du chef n’est pas de faire des plans, même si cela participe, mais de se taire beaucoup. Et d’écouter les contextes pour savoir où les choses se jouent. Je peux vous assurer que les gens aiment très vite l’autorité à partir du moment où ils savent où ils vont.

Le levier le plus puissant de la motivation des gens, ce n’est ni de savoir qu’ils sont une case dans un plan parfait, ni qu’ils sont employés pour leurs compétences, c’est de savoir que par ce qu’ils sont, ils sont contributeurs de la victoire collective.

Il ne s’agit donc pas d’une autorité, au sens de prises de décisions arbitraires ?

Clairement. C’est la différence entre un chef et un petit chef.

Les gens réclament souvent les chefs, incarnés dans la figure de l’homme providentiel, mais à l’arrivée ne les supportent plus. Les temps n’ont-ils pas changé ?

Cet appel et puis ce rejet tient au fait que les gens ont cette espérance mais se font souvent avoir sur le casting. Ils vont choisir des personnes qui vont accéder au pouvoir par une vague émotionnelle, et dans ce cas ce sont les meilleurs vendeurs ou les meilleurs narcissiques qui réussissent. Ou ils vont aller chercher quelqu’un sur des bases de compétences pures.

Pour ce qui est de l’homme providentiel, attention, je n’ai pas dit le temps DU chef est venu. Je dis, le temps DES chefs est venu !

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