Le tribunal administratif de Rennes a enjoint le CHU de Rennes à exporter le sperme du mari décédé d'une jeune femme de nationalité française en vue d'une insémination post-mortem à l'étranger (car c'est interdit en France). Le tribunal justifie :
"Des circonstances exceptionnelles justifient qu'il soit enjoint au centre hospitalier régional universitaire de Rennes de prendre toutes les mesures utiles afin de permettre l'exportation, dans un établissement européen acceptant de procéder à une insémination post-mortem, des gamètes d'un époux décédé".
La légalisation d'une pratique transgressive commence toujours par le recours aux circonstances exceptionnelles… Avant de passer à l'universalisation voire le droit fondamental, remboursé par la sécu.
La femme, âgée de moins de 30 ans, a perdu en janvier son mari malade, puis son enfant in utero à quelques jours du terme.
En France, le code de la santé publique interdit l'insémination post-mortem et l'exportation des gamètes. Pas de problème pour le juge administratif qui invoque
"les circonstances très particulières que représentent pour la requérante le décès de son époux puis celui de leur enfant au terme de sa grossesse constituent, dans la présente affaire, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa décision et de celle de son défunt époux de devenir parents".
Le juge devient roi en violant délibérément la loi. Aude Mirkovic, Maitre de conférences en droit privé, expliquait en mai dernier :
"La volonté du couple n’est pas toute puissante. Elle n’est pas le seul critère, surtout lorsqu’un tiers est directement concerné par cette décision, l’enfant à venir. Dans le cadre de la procréation naturelle, la société ne peut contrôler la procréation et n’a pas à le faire. Elle peut certes encourager ce qui est profitable aux enfants, par exemple le cadre protecteur du mariage, mais c’est la nature qui se charge de mettre des limites aux désirs de procréation des adultes. En revanche, dès lors que la société est sollicitée, comme c’est le cas ici, pour permettre la réalisation d’un désir en dehors de la procréation naturelle, alors oui, bien sûr, elle doit intégrer dans sa réponse le bien de l’enfant à venir. La loi a pour rôle de protéger les droits de tous et, en particulier, des plus faibles qui sont à la merci des puissants. En droit français, la procréation artificielle suit au plus près les exigences de la nature : les parents doivent être un couple homme/femme, vivant et en âge de procréer. Tout cela pour le bien de l’enfant à venir.
La raison première pour laquelle ce couple ne peut pas procréer n’est donc pas la loi française, mais la nature des choses : dès lors qu’un des membres du couple est décédé, le couple ne peut plus procréer. Tous les couples, fertiles ou infertiles, se retrouvent à égalité devant la mort. D’ailleurs, pourquoi les couples infertiles seraient-ils les seuls à pouvoir procréer après la mort ? A ce compte-là, il faudrait permettre à tous les citoyens de congeler des gamètes pour le cas où ils viendraient à mourir avant d’avoir pu réaliser leur projet parental… On voit bien que la volonté des adultes ne peut être sans limite et que la société doit protéger aussi les enfants"