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Religions : L'Islam

Djihad et Martyr

Extrait de la Petite feuille verte d'Annie Laurent, spécialiste de l'islam :

"[…]Les djihadistes qui meurent au combat pour le triomphe de l’Islam ont
droit au titre de « martyr » (chahîd) car le Coran établit un lien
entre djihad et martyre : « Il [Dieu]
ne rendra pas vaines les actions de ceux qui sont tués dans le chemin de
Dieu » (47, 4. Cf. aussi 3, 157 ; 3, 169 et 4, 74).
Le djihad revêt donc une dimension sanctificatrice, d’où sa désignation comme « guerre sainte ».

La mort du musulman qui sacrifie sa vie pour cette cause, considérée
comme la plus noble, est alors sacralisée, y compris lorsqu’elle prend
la forme du suicide et du meurtre.

L’attentat-suicide trouve ainsi sa justification. Hussein Fadlallah, guide spirituel du Hezbollah libanais :

 Le Coran condamne celui qui se donne la mort par
faiblesse (…). Mais l’Islam permet ce type d’acte si c’est pour une
cause juste. La libération de la Palestine et du sud du Liban [alors
occupé par Israël] en est une »
(La Croix, 6 septembre 1997).

Cette permission peut même être donnée à la femme, comme cela s’est
produit chez les Palestiniens et les Tchéchènes ainsi qu’en Irak.

Historiquement, la pratique de l’attentat-suicide, avec la valeur de
martyre qui lui est attachée, est une spécificité chiite. Tombée en
désuétude depuis le Moyen Age, elle a resurgi lors de la révolution
iranienne (1978). Mais, vu son impact et son « efficacité », elle est
imitée par des djihadistes sunnites. […]

Le martyr musulman peut donc mourir tout en haïssant et en tuant, y
compris des innocents
. Il est alors persuadé de défendre la cause de
Dieu et de hâter le règne de l’Islam sur le monde. Sa motivation n’est
pas gratuite. Il ne meurt pas pour l’amour de Dieu ou pour ne pas renier
sa Religion. Il lui est d’ailleurs permis, en cas de contrainte,
d’abjurer oralement tout en gardant sa croyance dans le cœur (cf. Coran
16, 106), selon une pratique qu’on appelle la taqiya (dissimulation).

Cette doctrine favorise le conditionnement psychologique ; elle
confère à la mort violente, volontaire ou pas, une dimension religieuse
qui la rend désirable. On l’a vu quand, pendant la guerre Irak-Iran
(1980-1988), le dirigeant chiite Khomeyni envoyait des milliers
d’adolescents iraniens sur le front contre Saddam Hussein, considéré
comme illégitime à cause de sa confession sunnite et comme impie en
raison de la coloration laïque de son régime. Ces soldats en herbe, dont
les familles se déclaraient « fières » du « don » qu’elles faisaient de
leurs enfants à la cause sacrée de l’Islam, savaient qu’une mort
certaine les attendait, mais ils avaient aussi la garantie, symbolisée
par le port d’une petite clé autour du cou, d’accéder au Paradis.

Par ailleurs, selon l’Islam, sacrifier sa vie pour une cause
gratuite, comme la charité, n’implique pas d’être reconnu martyr. Ainsi,
pendant la guerre d’Algérie (1958-62), l’ami musulman de l’officier
Christian de Chergé (futur prieur de N.-D. de l’Atlas) qui a protégé ce
dernier de son corps pour l’empêcher d’être atteint par les balles d’un
combattant du FLN, a-t-il été assassiné en représailles. En défendant un
« ennemi », il avait commis une trahison. […]

Dans le christianisme, le martyre implique nécessairement la gratuité, l’amour et le pardon.

Le martyre est le suprême témoignage rendu à la vérité de
la foi ; il désigne un témoignage qui va jusqu’à la mort. Le martyr
rend témoignage au Christ, mort et ressuscité, auquel il est uni par la
charité. Il rend témoignage à la vérité de la foi et de la doctrine
chrétienne. Il supporte la mort par un acte de force »
(Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 2473).

Le Nouveau Testament exige l’exercice inconditionnel de la charité et
du pardon, y compris envers les ennemis et les bourreaux (Cf. Mt 5,
43-47 et 6, 12-14 ; Lc 6, 27-35). Il invite à suivre l’exemple de
Jésus-Christ lors de sa Passion (Cf. Lc 23, 34 ; Ac 7, 60 ; Rm 12, 14). Un chrétien peut désirer mystiquement le martyre par imitation de son
Maître, mais il ne peut en aucun cas rechercher sa propre mort, fût-ce
en provoquant l’ennemi de la foi, dans l’espoir d’obtenir la palme du
martyre
. Ce serait pousser le bourreau au péché et donc commettre un
grave manquement à la charité.

Enfin, la finalité du martyre chrétien n’est pas d’ordre temporel
mais d’ordre spirituel : il s’agit d’œuvrer à l’avènement du règne de
Dieu."

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