De Marion Duvauchel :
Maurice Druon n’est pas seulement l’auteur du Chant des partisans, il est aussi l’auteur d’un livre au titre très actuel : Ordonnances pour un État malade, publié en 2002. La maladie n’est pas récente, on s’en doutait, mais cela va mieux en le disant.
Octogénaire, Druon tint pendant quatorze mois une chronique dans Le Figaro, qu’il intitula : le franc-parler. On trouve ces chroniques rassemblées dans un livre paru sous ce même titre aux éditions du Rocher.
L’une d’elles s’intitule « Père, gardez-vous au centre », en référence à la bataille de Poitiers où Philippe le Hardi ne cessait de crier à Jean le Bon : « père, gardez-vous à droite…, père, gardez-vous à gauche ».
Les octogénaires sont des hommes de la longue mémoire, cela a du bon. Maurice Druon nous donne un bref rappel de la capacité à nuire de ce qui depuis soixante ans, fut toujours le ventre mou de la République. Cela commença très tôt, à Alger, en 1942 et 43, avec les giraudistes qui voulaient libérer la France mais qui voulaient aussi sauver Pétain et son gouvernement.
« Au début de 46, se joignant aux socialistes et aux communistes, ce furent les centristes qui refusèrent à de Gaulle les moyens de gouverner efficacement et l’amenèrent à démissionner. Ils accouchèrent de la navrante IVe république, frappée d’instabilité congénitale et qui s’empêtra dans deux guerres coloniales aussi contraires à l’histoire que désastreuse pour la France. L’UDSR, première formation de François Mitterrand, était centriste ».
Les centristes giscardiens furent responsables de l’échec du référendum de 69 et du départ du Général.
Il en est des centristes comme des surréalistes : ils ne sont devenus de grands poètes que lorsqu’ils ont cessé de croire aux bêtises d’André Breton. Les centristes ne deviennent vraiment bons que lorsqu’ils sortent du marais pour se placer sur des terrains un peu fermes. On est bien d’accord avec vous monsieur Druon, le centrisme a ses vertus, mais à l’échelon cantonal, à Pau par exemple, là où il faut faire adhérer sur des problèmes ponctuels à des solutions médianes. « Il ne peut être la forge d’une ardente politique nationale ».
En 2002, François Bayrou s’était déjà taillé la réputation à laquelle il est resté fidèle jusqu’à aujourd’hui et que la plume acérée de Druon restitue avec une âpre lucidité.
« Que veut-il ? Exister. C’est un programme un peu bref pour la France. M. Bayrou s’est accroché au veston un dossard marqué 2007 (les élections présidentielles). Il prend le départ vraiment de très loin. Le désir ne gage ni le talent ni le succès. (…) Je ne suis pas grand stratège mais j’ai les yeux bien ouverts. J’aimerais que M. Bayrou les eût aussi et que son avenir ne lui fit pas écran avec le présent. (…) Il y a au moins 16% d’électeurs d’extrême-droite et autant d’extrême gauche qui ne veulent plus de notre régime. Ils semblent irréductibles. Le débat est donc restreint entre la gauche sortante et la droite républicaine. En divisant celle-ci et en provoquant, comme on dit des triangulaires qui aboutiraient à l’élection de candidats socialistes, M Bayrou, à quelques sièges près pourraient nous condamner à une nouvelle cohabitation, d’où résulterait une crise grave ».
Ce ne sont plus 16% d’électeurs d’extrême-droite et autant pour l’extrême-gauche qui ne veulent plus de ce régime corrompu à tous niveaux. C’est, à l’exception d’une petite caste de bobos parisiens et d’une population inintégrable, à peu près toute la nation qui rejette les idéologies qui se sont imposées, lentement, sournoisement, puis avec violence. Et qui ont ruiné ce qui était une grande puissance et une nation dont nous avions tout lieu d’être fiers.
Il y a plus de vingt ans, l’essentiel de ce que nous pouvons espérer a été formulé dans cette courte chronique :
« Si François Bayrou dans une belle tradition béarnaise faisait passer l’union avant ses propres sentiments, il rendrait tout à la fois service à la France, et nous rendrait confiance en sa personne ».
Il suffit de mettre le mot « France » à la place du mot « union ». Mais je ne vois pas que dans sa longue carrière, François Bayrou ait jamais révélé dans sa conduite quoi que ce soit de « cette belle tradition béarnaise ». Quand bien même aujourd’hui son ambition ne fait plus écran avec le présent, il n’y aucune raison de croire que l’âge lui aura donné l’envergure qui lui a toujours fait défaut et les qualités d’homme d’État dont notre nation, ou ce qu’il en reste, a cruellement besoin. Qualités que devrait cimenter une chose essentielle et largement oubliée : l’honneur. À commencer par celui de la France.
La gauche en veut au monde entier de son échec. Infiltrée de trotskisme depuis des décennies, elle a recouru à la vieille méthode marxiste qui consiste à déshonorer les mots pour déshonorer les idées qu’ils représentent. Dévoyer le vocabulaire est une spécialité des communistes : ils ont abusé les peuples pendant soixante-dix ans avec ce procédé-là, et ils n’ont pas fini. Par exemple, quand on proteste aujourd’hui contre l’immigration imposée aux peuples de l’Europe, ce sont des « émeutes raciales ». Quand voudra-t-on bien comprendre que de la même manière qu’on ne dialogue pas avec les marxistes, on ne dialogue pas avec les nouveaux idéologues : on leur obéit ou on est éliminé. La réalité du pouvoir politique, depuis plusieurs décennies, est détenue par les syndicats de la fonction publique. Quand cessera-t-on de trembler devant eux ? Depuis Philippe le Bel, Louis XI, Richelieu, la grande règle française a été très simple : « Pas d’État dans l’État ». Les syndicats de la fonction publique sont un État dans l’État. Mais ils partagent désormais cette prérogative avec d’autres forces nouvelles : le lobby LGBT, les écologistes, l’islam, les féministes. Ça en fait du monde, et qui veut la même chose : le pouvoir.
Mais avec François Bayrou, nous pouvons être tranquilles. En bon centriste, il rappellera comme un credo son attachement au dialogue social. Sa diction embarrassée, la mollesse de son propos, son ton de vieux professeur à la retraite nous garantissent une chose s’il nous venait l’idée de l’écouter : l’ennui.
PS : Lors de la messe du jour de Noël célébrée dans ma paroisse, on nous a demandé de prier pour que notre politique permette un « dialogue social équilibré ». Entrevoyant enfin la folie pure des idéologies de la gauche, les Églises deviennent centristes. Ô pôvre comme on dit chez nous. Supprimons la prière universelle. Nous cesserons ainsi de donner une tribune à la sottise bonasse qu’il est de bon ton d’exhiber dans les milieux diocésains.
AFumey
Sur la PU, je rappelle à l’auteur – qui ne semble pas avoir eu l’occasion de participer à l’animation d’une messe – que cette “prière de l’assemblée” est rédigée par ceux qui l’écrivent, des laïcs plus ou moins inspirés – d’où l’agacement légitime qu’on peut avoir lorsqu’elle s’égare dans des considérations très éloignées de la foi.
Pour le reste, je pense au psaume (n°?) où Israël exprime son soulagement d’être relevé après avoir subi double punition pour ses fautes: cela me semble décrire assez exactement les déboires d’une France championne de l’avortement et du reniement.
France Fougère
Ne jamais oublier à propos de Maurice Druon sa belle formule : ” La sebille d’une main, le cocktail molotov de l’autre “.
Jean Sablon, frère de Germaine Sablon, témoigne que “le Chant des partisans ” fut composé alors que Germaine Sablon, Joseph Kessel et Maurice Druon étaient réunis dans la demeure du Midi de Germaine Sablon, avant que les deux hommes partent rejoindre Londres et le Général. Interview de Jean Sablon rediffusion sur France culture. C’est Germaine Sablon qui la première a chanté l’hymne célèbre, à Londres. Ensuite, elle s’est engagée comme infirmière combattante. Rupture assez mystérieuse des liens avec Joseph Kessel.
A cette époque, il y avait du style et de la grandeur, de la passion aussi. Nous, nous avons m. Bayrou, et ce n’est pas Demosthene.
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Ah oui supprimons les PU et arretons de dire au Bon Dieu ce qu’Il doit faire!!!
France Fougère
“PU” c’est si épuisant d’écrire- prière universelle ?
La manie de ces abréviations – et la paresse !