Ces parents d'un enfant handicapé s'inquiètent :
"Nous, parents d'un jeune homme polyhandicapé et sourd, avons obtenu, il y a quelques jours, une audience auprès d'un membre du cabinet de Monsieur Dominique Baudis, Défenseur des droits. Nous étions reçus suite à un courrier que nous avions envoyé dénonçant le manque de structure d'accueil pour les jeunes polyhandicapés sourds, mais aussi le manque d'accompagnement des familles. Après un entretien d'une heure et quart, nous avons compris que nous n'avions rien à faire là, que des droits, nous n'en avions pas.
En effet, la démonstration a été faite sous nos yeux d'un désengagement assumé et volontaire de l'Etat sur les questions du handicap. Voici ce que nous avons entendu : que nous étions seuls responsables – voire coupable – de ce jeune homme handicapé. Nous avons entendu que dans les années 80, les mères des handicapés ne travaillaient pas et montaient les structures d'accueil nécessaires car, à cette époque, les parents étaient plus entreprenants. Ce qui était sous-entendu, c'est que nous ne faisons rien, et que nous attendons tout des autres (voire de l'Etat). […]
A la fin de l'entretien, et alors que nous allions partir, notre interlocutrice nous a tendu un article du quotidien Aujourd'hui sur le succès du film « Intouchables ». C'est sur cela que nous nous sommes quittés. L'engouement pour ce film, qui sert même de modèle dans les plus hautes sphères de l'Etat, pose quelques questions que nous voudrions aborder ici. Pourquoi ce film a-t-il autant de succès ? Avançons quelques hypothèses.
Tout d'abord le film raconte l'histoire d'un homme riche, travaillant dans le luxe, qui se retrouve arrêté dans sa course et paraplégique. Le public adore. Il peut s'identifier, se dire que cela peut arriver à tout le monde… Inutile de vous dire que jamais ce film n'aurait pas eu autant de succès si l'handicapé l'avait été de naissance (ça, ça n'arrive qu'aux autres). Ensuite il est riche, donc il peut se payer l'aidant qu'il veut, celui qui le fera vibrer et lui permettra toutes les folies dont il rêve. Là aussi, sa richesse plaît, elle soulage. Car, qui voudrait voir ou savoir que les handicapés sont, dans la réalité, maintenus en dessous du seuil de pauvreté ?
Pour conclure, il nous semble, sans pour autant nier le plaisir que certains peuvent y prendre, que ce film est un merveilleux filtre de la réalité. Une ode aux « soignants-naturels » que l'Etat rêve de voir proliférer pour mieux se désengager. Un filtre qui donne bonne conscience et qui permet au spectateur de ne pas voir ce qui se trame en coulisse. Car, même si le film raconte une partie d'une histoire vraie (j'imagine que cet homme a souffert, même si cela n'est guère montré) la réalité d'un très grand nombre de personnes handicapées est tout autre : précarisation, absence de structure d'accueil, isolation, dépression."
e
Ajoutons bien évidemment que ce film est aussi un manifeste pour le gentil et pauvre qui vient d’ailleurs, et le riche et d’ici qui ne trouve l’affection que grâce à l’étranger. CQFD
Tabitha
On peut parfaitement adhérer à l’analyse de ce film telle que vous l’avez décrite.
Pour ma part, je l’ai trouvé absolument excellent pour de toutes autres raisons, bien évidemment.
Avant cela, je dois dire un mot du film “La guerre est déclarée”, qui a rencontré un grand succès et qui m’a exaspéré : j’ai analysé le comportement de la mère comme hautement significatif de la mentalité féminine actuelle, souvent incapable de dominer une mentalité égoïste caractérielle. Seul son compagnon a un rôle viril mais le couple a éclaté, dans le film comme dans la vie, à cause de ce comportement si pathologique que nous avons si souvent l’occasion de dénoncer.
Dans les Intouchables, c’est le contraire! et l’on assiste à un comportement viril des deux côtés, où l’amitié, hautement improbable au départ, va aller croissant, à la suite d’une “rencontre”, le thème cher à Giussani.
L’Evangile est tissé de ces rencontres qui vont aller directement au coeur de chacun et, dans nos paroisses, on voit bien qu’il faut se laisser guider par l’Esprit pour aller au-devant de ceux qui, a priori, ne devraient pas faire partie de nos proches
C’est donc une perspective radicalement différente de la vôtre dont, encore une fois, je mesure toute la pertinence puisque vous parlez de quelque chose que vous vivez.
Pour ma part, je le répète, on peut aimer le message, essentiel pour moi : n’ayons pas, vis-à-vis de la maladie, du handicap et même de la mort, une vision si handicapée elle-même : voyons les personnes telles qu’elles sont et méfions-nous du côté sentimental d’une pitié révoltante pour elles et leurs familles.
A ce titre, ce film, comparé au précédent, pourrait être une leçon de vie, même si bien des à-côtés ne sont pas autre chose qu’une concession à l’air du temps…
PK
J’avoue ne pas partager complètement votre vision…
Que l’État ne s’engage pas à fond – ou pas du tout – pour le handicap ? A priori, ce n’est pas son rôle.
Il est évident que c’est peut-être choquant de dire cela – surtout à des parents qui souffrent seuls avec leurs enfants – mais si on veut mettre en place une vraie subsidiarité, ce n’est pas en allant pleurer dans le giron de l’État à chaque fois qu’il y a un manque qu’on y arrivera.
Il n’y a rien ? Très bien, il faut donc créer. Et comme il n’y a rien, on peut créer ce que l’on veut À L’IMAGE DE CE QU’ON VEUT ET DE QUI ON VEUT.
C’est aujourd’hui une « chance » inespérée pour les catholiques de France de récupérer l’espace abandonnée par l’État providence… Qui le handicap, qui l’avortement, qui les pauvres (les vrais !), qui les soins, etc.
Reconstruisons ce qui était et offrons à la France et aux Français un autre visage… agissons localement et unissons nous nationalement (pour l’union nationale, on a Internet… et plein de réseaux sociaux sur lesquels s’appuyer). Pour le local, il faut se lancer…
On n’est pas tout seul comme on le croit. Quand on se lance, on est étonné du nombre de soutiens qu’on peut avoir, surtout de gens qu’on ne soupçonnait pas a priori. Par contre, la plupart des gens n’agissent pas mais soutiennent : ils ont besoin d’un moteur.
Que les catholiques deviennent ces moteurs qui aspireront la société à leur suite…
Toutes mes prières envers cette famille et j’espère que mes propos ne seront pas perçus négativement mais comme un véritable encouragement à continuer…
claude Timmerman
Un grand coup de chapeau à ce commentaire de PK, tant en ce qui concerne le nouveau rôle possible des catholiques qui ont aujourd’hui “déserté” l’espace social et public (il est vrai que la lutte implacable de la République contre la Catholicité depuis cent cinquante ans l’explique aisément), qu’en ce qui a trait au rôle de l’Etat et à son potentiel engagement ici évoqué…
“Ce n’est pas son rôle” dit PK. Effectivement ce n’est pas le rôle de l’Etat!
Ce qui est en cause, c’est un rôle sociétal: celui de la responsabilité de ceux qui pratiquent la charité vivante – et donc pour nous qui souhaitent vivre la morale chrétienne, de ceux qui dynamisent le monde social donc, et non pas de ceux qui participent de l’appareil juridico-administratif étatique!
A une époque où il est de bon ton – surtout chez les catholiques “engagés” – de vous envoyer l’Evangile à la figure à chaque minute, je mets au défi quiconque de me démontrer que le Christ aurait dit, ou aurait laissé entendre, que l’Etat doive intervenir à tout propos dans les affaires qui relèvent des rapports entre les hommes, ici donc de la pure charité..
J’oserai même dire que tout dans l’Evangile y montrerait l’inverse…
“Rendez à César”…Etc.
Plus grave, et j’irai jusque là: le suis profondément choqué (j’insiste sur le mot) de la façon dont ces parents (quelque soit la détresse morale où ils se trouvent effectivement plongés et à laquelle je compatie pleinement) commentent leur déconvenue: “Après un entretien d’une heure et quart, nous avons compris que nous n’avions rien à faire là, que des droits, nous n’en avions pas!”
En quoi le fait d'”avoir un enfant handicapé” serait-il un élément constitutif d’un “droit”?
J’aimerai bien que quelqu’un me l’explique et surtout me le justifie moralement!
C.B.
“Nous avons entendu que dans les années 80, les mères des handicapés ne travaillaient pas et montaient les structures d’accueil nécessaires car, à cette époque, les parents étaient plus entreprenants.”
Serait-ce un appel à
-remettre en question le dogme post-soixant’huitard de l’immense bienfait du travail rémunéré des femmes
-remonter nos manches et montrer que les catholiques savent toujours mettre en actes les “œuvres de miséricorde corporelle” (cf http://catechisme.free.fr/cat2part5chap04.htm), donc créer ce qui n’a pas su l’être par d’autres
-ainsi montrer que la République est peut-être bonne fille mais pas d’une efficacité notable.
Anne
Je suis tentée d’intervenir dans cette discussion car j’ai actuellement une fille handicapée de 15 ans. Elle est trisomique et en septembre, nous avons décidé, mon mari et moi-même de la “sortir du système IME-IMPRO” pour nous en occuper personnellement. Il nous a fallu prendre contact avec l’inspection académique. Avant même d’expliquer les raisons de notre choix, la personne de l’Inspection nous annonce que nous n’aurons aucune aide. Mon mari lui a fait comprendre que ce n’était pas du tout notre démarche. Mais, cette réflexion nous a fait beaucoup réfléchir, car même si des parents s’investissent personnellement pour le bien de leur enfant handicapé, c’est perçu comme “source de revenus”. “Ils le font pour avoir des aides”. Voilà ce genre de réflexion que l’on peut avoir.
V D
A Claude Timmermann,
Visiblement vous ne savez pas ce que c’est que d’avoir un enfant sévèrement handicapé mental et de vivre avec. Vous devez être performant à 100% matin midi soir le weekend et aussi durant les vacances. Donc oui, on se dit parfois qu’on perd son temps avec l’administration et aussi avec d’autres personnes telles que vous.
Quand il vous est nécessaire d’emmener tous les jours votre enfant en rééducation, vous êtes contents d’avoir le droit de vous garer sur des places réservées. Et des exemples comme cela il y a en a bien d’autres.
Donc je vous laisse à vos questions de morales, nous parents d’enfants handicapés avons des défis autrement plus ardus tous les jours que de répondre à ce genre de questions qui ne font pas avancer nos enfants.
PS: ce genre de comportement me fait penser à certains regards désapprobateurs que je rencontre quelquefois à la messe…
VD
Opa
BRAVO à VD, ma tante est trisomique,elle a 50 ans et vieillit beaucoup plus vite, c’est très lourd à porter pour ma mère.
C’est une HONTE de voir de tels propos, que savez-vous du handicap? avez-vous déjà laver une personne de 50kgs qui est comme un poids mort? je suis stupéfaite de vous voir acclamer un film totalement commercial et si loin de la réalité, merci de réfléchir quand vous voudrez parler du handicap.
jpr
Effectivement, l’état providence, c’est sans doute fini, puisqu’on nous dit qu’il n’y a plus d’argent, ni dans les caisses de l’état, ni dans celles des collectivités locales (qui sont, à vrai dire, des trous sans fond); mais il faudrait que ce soit réellement fini pour tout le monde, pas que pour les familles dans l’épreuve : fini pour les associations bobo-humanistes-de-gauche, fini pour les groupuscules avides de la mort des bébés à naître ou de celle des personnes âgées dépendantes, fini pour les pseudo-artistes-contemporains sans génie ni savoir-faire autre que celui de la provocation, fini pour les régimes très spéciaux de privilégiés de la fonction publique ou des sphères syndicales, etc.
Si un tel état providence était effectivement fini, c’en serait fini aussi de l’état vampire que l’on ne connait que trop actuellement : celui qui ne sait qu’inventer pour alléger votre portefeuille de l’argent que vous avez gagné à la sueur de votre front (certains ont même cru qu’en travaillant plus…) ; car – je ne sais pour vous – je constate qu’il n’y a plus d’argent alors que l’on m’en prélève toujours davantage sous de fallacieux prétextes…
Alors – on peut rêver – les familles retrouveraient une plus grande aisance, les pères et mères du temps pour leurs enfants, du temps pour la vie associative, pour la culture, pour le bonheur, pour la vie, les citoyens ré-inventeraient les moyens de se prendre en mains eux-mêmes pour régler leurs problèmes là où l’état donne la preuve, jour après jour, de son incapacité chronique. On tenterait de mettre un œuvre, pour le bien commun, un principe fort de la doctrine sociale de l’Eglise : la subsidiarité. Et on placerait l’homme – dans toutes ses dimensions – au centre de la construction.
Mais ne rêvons pas : il faudrait pour cela tordre le cou à bien des mythes d’il y a quarante ans (et plus), mythes éculés qui ont cependant la vie dure au point d’être devenus de véritables tabous qu’il est politiquement incorrect de remettre en question, mythes ardemment défendus, avec un prosélytisme virulent, par la meute médiatico-syndicalo-politique et culturo-éducative.
Handicapés, personnes âgées, jeunes enfants, familles… la crise a bon dos : les jours les plus sombres sont sans doute à venir. Prions pour la France, avec foi.
rosybuddon
Bonjour !
Votre projet de reconstruction catholique m’intéresse ! Pour l’unité nationale, il existe en effet Internet : je pourrais apporter ma contribution en réalisant un site web puisque je connais en autodidacte l’informatique.
senex
a vD ;Vous faites bien de “reprendre” C.T, qui “compatit” à votre souffrance en vous infligeant la lecture d’ une réflexion maladroite.
Oui, élever un enfant handicapé donne des droits.Car l’égalité est dans la devise française.Et la collectivité doit tout faire pour compenser ce qu’elle appelle les “handicaps.”,aides matérielles diverses,allocations,soins et aide morale respect et attention accrue.Les parents d’enfants handicapès ne sont pas des quémandeurs.Ils réclament leur dû,en toute justice pour que leur enfant ne soit pas exclu de la vie.Ayant participé pendant des années aux commissions spécialisées,je n’ai pas rencontré beaucoup de “profiteurs”,mais des souffrances souvent aussi cachées qu’atroces.Chapeau à ces parents,qui ménent un combat quotidien,extrêmement méritant.Je pense aux parents d’enfants autistes et aux polyhandicapés qui n’entrent pas dans les “cases informatiques”.Mais”Il n’y a rien de moins humble qu’un humilié”.Si parfois certains paraissent revendicateurs, c’est par épuisement devant la froideur méprisante de la société jouisseuse qui n’aime pas que l’on trouble ses plaisirs.Merci de votre intervention.