Communiqué de l’Union Lex Orandi :
Alors que les grands médias d’information ont unanimement salué le succès de l’édition 2023 du pèlerinage de Chartres à la Pentecôte dernière, un esprit polémique assez vain agite depuis cette date les rédactions de quelques médias catholiques qui s’interrogent sur les causes du succès du pèlerinage de chrétienté.
Alors que deux nouveaux évêques sont mis en cause dans des affaires d’abus sexuels et que les ordinations de prêtres diocésains vont enregistrer au printemps 2023 leur plus faible nombre depuis 20 ans avec 52 candidats seulement, les ordinations des instituts ex-Ecclesia Dei ont représenté un quart de celles de 2022 selon l’hebdomadaire Valeurs Actuelles.
Alors que la vitalité ecclésiale que manifestent les fidèles attachés à la liturgie traditionnelle se révèle d’une telle manière qu’elle ne peut plus être niée, le Vatican publie cette semaine un texte qui semble remettre en cause les fondements mêmes de l’Eglise catholique, appelée à devenir une « Eglise synodale »… L’instrumentum Laboris destiné à guider le travail des participants à la première session du « Synode sur la synodalité » en octobre 2023 est-il la chronique d’une révolution en marche ?
Issus d’une « consultation du peuple de Dieu » dans tous les diocèses du monde lancée par le Pape François en 2021, ce document est le produit d’une navette entre un groupe d’experts du Vatican et sept « Assemblées continentales », enrichie par un « Synode numérique », ayant abouti à un « document consensuel ». Cette procédure hasardeuse tient à la fois des cahiers de doléances et des Etats généraux qui s’érigèrent en Assemblée constituante en 1789, ou des conventions citoyennes d’Emmanuel Macron qui préparent aujourd’hui la légalisation de l’euthanasie et la constitutionalisation de l’avortement. Elle risque fort de produire le même type de résultats…
Ce processus ressemble à un détournement du Sensus fidei, ce « sens de la foi » par lequel, selon le Concile Vatican II « la collectivité des fidèles, ayant l’onction qui vient du Saint (cf. 1 JN2, 20.27), ne peut se tromper dans la foi (…) lorsque, ‘’des évêques jusqu’au dernier des fidèles laïcs’’, elle apporte aux vérités concernant la foi et les mœurs un consentement universel » (Lumen Gentium, 2). Or le processus synodal fait dire à la « consultation du peuple de Dieu » qu’elle est en quelque sorte infaillible puisqu’elle était accompagnée par l’Esprit. Dès lors, elle peut s’autoriser à remettre en cause le magistère en proposant l’accès des femmes aux ordres sacrés ou l’ordination d’hommes mariés. Elle peut défier l’autorité des successeurs des apôtres en suggérant d’évaluer un évêque sur « la manière dont il accomplit son service dans un style synodal ». Elle peut relativiser la morale catholique en appelant à « des mesures concrètes pour accueillir sans jugement » les divorcés remariés, les polygames et les LGBTQ+…
Cependant, la définition du Sensus fidei donnée par le Concile Vatican II et le catéchisme de l’Eglise catholique associe ce dernier aux vérités concernant la foi et les mœurs, pas aux erreurs doctrinales ou aux aberrations morales. Les doctrines erronées concernant l’accès des femmes aux ordres sacrés ou des fidèles en état de péché grave à la communion sacramentelle ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’un processus d’approbation « du bas vers le haut ». Il y a une véritable falsification dans cette démarche qui prétend remplacer l’Eglise catholique par une Eglise synodale en sapant à la fois l’enseignement de la révélation, la constitution hiérarchique de l’Eglise voulue par Jésus Christ et la morale catholique fondée sur la parole de Dieu et sur la Tradition. L’Eglise est enseignante, le peuple des fidèles attend d’être enseigné par elle. Prétendre inverser cet ordre est une imposture.
La cause de cette inversion est peut-être résumée par la « question directrice fondamentale » à partir de laquelle le chemin synodal s’auto-référence et que l’on trouve au début de l’Instrumentum laboris : « comment se réalise aujourd’hui ce «’’marcher ensemble’’ qui permet à l’Eglise d’annoncer l’Evangile (…) et quels pas de plus l’Esprit nous invite-t-il à poser pour grandir comme Eglise synodale ? ». La question ainsi posée relève du postulat : l’existence d’une « Eglise synodale » n’est plus à démontrer.
Pour nous, la réponse à cette question se trouve dans le « marcher ensemble » qui a réunit 16.000 pèlerins sur la route de Chartres à la Pentecôte. L’Esprit les a invités à chercher la vérité que l’Eglise enseignante proclame à la suite des apôtres depuis la première Pentecôte, à chercher la grâce que Dieu dispense dans ses sacrements célébrés selon des rites sacrés, à chercher à vivre la charité dans une expérience à la fois pénitentielle et fraternelle.
Avis à tous les apprentis sorciers d’une Eglise synodale, le vrai synode a eu lieu sur les routes de Chartres à la pentecôte dernière, où 16.000 pèlerins sont venus se nourrir du vrai sacrifice du Christ sur la Croix, célébré par d’authentiques ministres de Jésus-Christ qui ne doutent pas de leur mission, pour le règne de Dieu et le salut de leurs âmes. Tout le reste, hélas, risque de faire perdre de vue l’essentiel. A une hasardeuse Eglise synodale, nous préférons notre Eglise catholique unie par la proclamation du même Credo, la célébration des mêmes sacrements, et la reconnaissance d’une hiérarchie instituée exerçant sa triple mission : enseigner, gouverner et sanctifier le peuple saint de Dieu.