Le texte de Franck Ferrand sur le discours de Villepinte n’a pas laissé Eric Zemmour indifférent :
Cher Franck, merci pour ces mots élogieux ! pic.twitter.com/208L01vCmV
— Eric Zemmour (@ZemmourEric) December 10, 2021
Un discours peut-il changer le cours de l’histoire ? Après tout, sans « le labeur, les larmes et la sueur » , de Winston Churchill, le 13 mai 1940, ou l’hymne à l’égalité de Martin Luther King, le 28 août 1963, la face du monde eût sans doute été autre. Je me rappelle avoir lu, sous la plume de Robert Solé, que tous les grands discours étaient une leçon d’optimisme politique ; de ce point de vue, celui d’Éric Zemmour, dimanche dernier, ne semble pas déroger.
J’ai beau suivre, assidûment, notre vie politique depuis près de quarante ans, je n’ai pas souvenir d’avoir entendu, si puissamment clamés, de tels accents d’urgence. Certes, en janvier 2007, le discours d’entrée en campagne de Nicolas Sarkozy n’avait pas été ordinaire ; pas plus que l’éloge funèbre de Pierre Bérégovoy à Nevers, en mai 1993, par François Mitterrand. L’on pourrait citer aussi bien l’appel, à Verdun-sur-le-Doubs, de Valéry Giscard d’Estaing, en janvier 1978. Aucune de ces trois adresses, toutefois, ne me semble devoir être comparée à ce récent morceau de bravoure.
« L’action, disait le général de Gaulle, met les ardeurs en œuvre, mais c’est la parole qui les suscite. » Lui-même, du discours de Brazzaville à celui de Bayeux, du speech de l’Albert Hall, le 11 novembre 1942, à l’allocution radiotélévisée du 23 avril 1961, lors du putsch des généraux, avait fait la démonstration du rôle essentiel de l’envolée verbale dans la maturation des moments historiques.
Je me revois, lycéen helléniste, plancher des heures sur la traduction, dans l’Anabase de Xénophon, du discours du Spartiate Cléarque à ses soldats. Tout y était : la captatio inaugurale, l’appel à la raison, différentes figures de rhétorique, le retournement aux deux tiers de la harangue et, finalement, l’appel sans fard à l’humanité des combattants démobilisés. Ce discours me paraissait si bien construit, si finement agencé que, plusieurs décennies plus tard, j’en connais toujours, sur le bout des doigts, les phrases essentielles – vingt-quatre siècles après !
Je ne sais si, dans un lointain avenir, certains écoliers apprendront par cœur le “serment de Villepinte” – pour reprendre le titre donné par l’orateur lui-même -, mais je ne serais pas surpris que plusieurs formules en soient à jamais retenues.
La plus importante à mes yeux cite justement un grand tribun : « Au cœur de la Révolution française, Danton déclarait : “Une nation se sauve, elle ne se venge pas. ” Nous ne voulons pas nous venger, nous voulons sauver : sauver notre patrie, sauver notre civilisation, sauver notre culture, sauver notre littérature, sauver notre école, sauver nos paysages et notre patrimoine naturel, sauver nos entreprises, sauver notre héritage, sauver notre jeunesse. Sauver notre peuple. »
Dans le Discours d’un roi, film britannique vieux de dix ans, le réalisateur Tom Hooper s’était penché avec astuce sur la fameuse allocution prononcée par George VI, lors de l’entrée en guerre, en septembre 1939. Ainsi que sur les années de préparation, de conditionnement qui permirent à ce prince tellement effacé de surmonter son bégaiement et d’entraîner le peuple britannique dans une des phases les plus ardues de son histoire. C’est ainsi : le discours peut révéler, d’abord et avant tout, l’orateur ou l’oratrice qui le prononce.
Celui du dimanche 5 décembre 2021 nous en a dit peut-être davantage sur la mue intime d’Éric Zemmour que sur quoi que ce soit d’autre. À tous ceux qui, encore au début de ce mois, se demandaient comment l’ancien polémiste allait se muer en crédible candidat à la magistrature suprême, la réponse vient d’être administrée avec une force qu’aucun expert n’aurait seulement imaginée à la Toussaint. Là n’est probablement pas le principal enseignement de Villepinte, me direz-vous, ni le message essentiel de ce candidat hors normes ; mais je ne serais pas étonné que c’en devienne, pour la classe politique, la conclusion première.
VIVANT
Magnifique Franck FERRAND. Il donne un sérieux coup de sérieux à la candidature Zemmour en lui prodiguant l’onction de sa notoriété incontestée. C’est une sorte d’adoubement émanant d’un grand historien. Cela montre le courage de Franck Ferrand qui honore ainsi le courage incontesté d’Eric Zemmour. C’est beau l’amitié intellectuelle, cela donne de la joie de voir cela. Merci Franck et Eric.
F. JACQUEL
100% d’accord avec cette analyse. Et le déchaînement de haine de tous les bords politiques (“gendre” de JUPITER inclus) en prouvent la pertinence. Pour parodier le discours de Koufra :
“Jurez de ne cesser notre combat que lorsque le drapeau de la Liberté flottera sur l’Élysée !”