Sur le blog de L'Homme Nouveau, le père Daniel-Ange réagit contre la proposition de loi Claeys-Leonetti, dans un texte intitulé :
"Heureuse sédation terminale ou insidieuse exécution capitale ?"
Extraits :
"[…] « Abrutir » ainsi une personne, c'est la priver de ces derniers adieux aux siens, souvent seulement quelques mots, mais qui prennent une valeur de testament […] On risque bientôt de ne plus pouvoir recueillir ces merveilleuses ultimes paroles dont l'ensemble forme un trésor d'humanité et de sainteté.
Bien sûr, il faut par ailleurs aussi médicalement me soulager un maximum d’une trop forte souffrance physique, car elle aussi me déshumanise, m’enferme dans le biologique, m’obsède et par là porte atteinte à ma lucidité, trouble ma sérénité, affaiblit ma combativité. (C’est toute la question du dosage des analgésiques). Au mieux, on va minimiser, banaliser, relativiser un max. Oh ! mais ce n’est rien. Un simple petit mauvais moment à passer, qui passe très vite. Faut pas s’en faire !
Alors qu’en réalité, c’est le plus grand moment de toute ma vie !
Ces « disparitions » – comme le disent maladroitement des journaux dits cathos – mine de rien, faits divers parmi d’autres, mais c’est tragique !
Ces pauvres gens partent tels des bêtes ou des larves, complètement amorphes, dans l’ignorance de ce qui se passe : c’est un des plus grands drames d’aujourd’hui. Du même ordre que ces stérilisations forcées, imposées, non seulement sans le consentement de la femme mais sans même qu’elle en ait conscience (simple piqûre sous prétexte d’une grippe !)
Certaines personnes d’ailleurs préfèrent partir ainsi. Pourquoi ?
Pourquoi ? La plupart du temps, parce que personne n’a osé leur parler du sens profond et des enjeux de ce départ, encore moins les y préparer.
Déposséder une personne de sa mort, n’est ce pas l’amputer de quelque chose d’essentiel à sa vie ? […]
Demandons à nos prêtres de célébrer régulièrement cette si belle messe « pour la grâce d’une bonne (et donc : belle) mort ». C’est parce que je ne suis jamais sûr que je pourrai vivre cet Instant, en toute conscience et lucidité, que je puis dès maintenant, étant encore pleinement lucide, offrir mon passage, en faire le plus bel acte d’amour de ma vie. […]
Ma vie m’a été donnée. Je l’ai reçue. Tout au long de mon passage sur terre, je puis en faire ce que je veux : Dieu me l’a confiée, l’a remise aux mains de ma liberté. Mais la fin terrestre de cette vie reçue ne m’appartient pas non plus. Elle est à Celui qui me l’a donnée. C’est à Lui d’en choisir pour moi et le temps, et le lieu, et les circonstances, aussi déroutantes soient-elles. Comme Il a choisi celles de ma venue au monde, aussi déconcertantes puissent-elles être.
La conception comme la « disparition » de l’horizon terrestre, ma naissance sur terre comme ma naissance au Ciel sont les deux moments clefs qui n’appartiennent qu’à Dieu, ne relèvent que de Lui, ne dépendent que de Lui. Bien sûr à nous d’influer sur ce moment par notre manière de vivre, pour que ce soit le plus beau moment de ma vie, mais pour le reste : la balle est dans son camp. […]
Voici le péché originel actualisé : je refuse net de dépendre d’un autre. Je suis autonome. Je décide de la vie à sa conception. Je mets la main sur gènes, ovocytes, sperme. Logiquement, je décide, moi, de la fin : où, quand, et comment. On manipule les deux seuls moments où Dieu a tout à dire. On les lui arrache. Car il s’agit de « se rendre maître de la mort en la provoquant par anticipation »(Evangelium vitæ n. 64).
La mort est décidée, hâtée, accélérée, provoquée, donnée (mais le mot est trop beau), imposée plutôt.
Paradoxe : on abolit la peine de mort dans le social, et on la promeut à l’hôpital, lucidement voulue, décidée. On se lamente devant le plus déchirant des drames pour familles et proches qu’est un suicide, et on légalise tranquillement le suicide assisté."