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L'Eglise : L'Eglise en France

Homélie de Monseigneur Centène à l’issue du Tro Breiz

Voici le texte de l'homélie prononcée par Monseigneur Centène à l'issue du Tro Breiz le 9 août, en la cathédrale de Vannes :

"Alors que nous avons déjà beaucoup marché, les textes de la liturgie de ce jour nous invitent, et nous le sentons bien, à faire encore un pas de plus. Un pas de plus sur le chemin de la conversion, un pas de plus sur le chemin de la connaissance du vrai Dieu. Nous sommes invités à accomplir la même démarche que le prophète Elie, tel que nous l’a décrit le livre des Rois. Il vient de combattre l’idolâtrie avec beaucoup de zèle, si bien qu’il est désormais en danger. Quarante jours et quarante nuits de marche lui sont nécessaires pour arriver sur la montagne de l’Horeb. Quel long pèlerinage ! Après cette longue marche, il lui faut encore faire un pas pour s’apercevoir qu’il n’était pas sur le bon chemin, et qu’il s’était peut-être trompé de Dieu. Comme ceux qu’il combattait, il avait toujours imaginé un Dieu de puissance, un Dieu vengeur, punissant le péché jusqu’à la septième génération de pécheurs. Et que découvre-t-il ? Un Dieu de tendresse qui prend soin de lui, un Dieu qui ne se trouve ni dans l’orage, ni dans l’ouragan, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu, mais dans le murmure d’une brise légère. Alors Elie comprend que le vrai Dieu n’est pas celui de la violence, que ce n’est pas en massacrant les infidèles comme il l’a lui-même fait naguère sur le Mont Carmel avec les prophètes de Baal que l’on sauvera l’honneur du vrai Dieu.

Plus tard, Jésus révèlera un Dieu d’amour et de miséricorde, et nous fera comprendre par l’exemple de sa vie que c’est en aimant que l’on peut révéler quelque chose de Dieu. L’apôtre saint Paul, lui aussi, s’était trompé de Dieu. Dans un premier temps, il avait violemment persécuté les disciples de Jésus. Lui aussi croyait ainsi défendre l’honneur de Dieu, mais un jour il a rencontré Jésus sur le chemin de Damas, et ce fut le point de départ d’une conversion radicale, d’une conversion profonde, d’une conversion définitive. Dans le texte que nous venons d’entendre, il rappelle aux chrétiens tout ce qu’ils doivent aux juifs : « l’adoption, la gloire, les alliances, la Loi, le culte, les promesses de Dieu, les patriarches et Jésus lui-même qui est au-dessus de tout, Dieu béni éternellement ». Dans le même temps, Paul nous dit sa douleur face à l’incrédulité de ses frères de race qui suivent les pharisiens et qui n’acceptent pas de partager les privilèges dont ils furent comblés avec tous les païens qui ont mis leur foi dans le Christ.

L’évangile que nous venons d’entendre fait suite au récit de la multiplication des pains. Jésus vient de nourrir une foule affamée. Le soir venu, Il se retire sur la montagne pour prier, comme Il a l’habitude de le faire. Il veut échapper à tous ces gens qui veulent le faire roi, non parce qu’ils adhèrent à la beauté de sa Doctrine, mais parce qu’Il les a nourris, non parce qu’Il leur a révélé les secrets du Père, mais parce qu’Il les a soignés, non parce qu’Il leur a montré le visage de Dieu en Lui et en leurs frères, mais parce qu’ils y trouvent leur intérêt temporel. Nous comprenons sa déception, et sa lassitude devant se peuple si lent à croire.

Tandis que Jésus prie sur la montagne, dans l’intimité de son Père, les disciples traversent le lac. Ils avancent péniblement vers l’autre rive, au milieu des éléments déchaînés. Cette barque de Pierre n’est-elle pas devenue le symbole même de l’Église, qui avance sur les flots du monde en faisant face aux vagues et aux vents mauvais. Lorsque saint Matthieu écrit son évangile, il le fait pour des chrétiens en butte aux persécutions. Ils comprennent combien les vagues et les vents contraires sont évocateurs de ce monde qui a refusé le Christ. Et c’est encore plus vrai aujourd’hui !!! En Irak, en Syrie, dans le berceau même du christianisme, mais aussi en Corée du Nord, en Afrique, les chrétiens persécutés sont bien plus nombreux qu’aux premiers siècles comme si nous assistions à une accélération de l’Histoire. On veut leur imposer une autre religion, ne leur laissant comme alternative à l’apostasie que l’exil ou la mort.

Tandis que nous marchions sur nos beaux chemins de cette terre de Bretagne, je ne pouvais pas m’empêcher de penser à tous ceux qui marchaient en même temps que nous, la mort aux trousses, fuyant, loin de leurs maisons brûlées dans leurs villages pillés, sans trêve ni repos, la peur au ventre, portant sur leur dos, leurs vieillards et leurs enfants, leur mémoire et leur avenir. Savons-nous suffisamment que depuis trois jours, dans le souk de Mossoul, des chrétiennes sont vendues comme esclaves [pause] dans l’indifférence générale. Les frappes américaines, de l’aveu même du gendarme du monde, n’étant destinées qu’à protéger le personnel diplomatique américain résidant à Erbil.

Si aujourd’hui nous arrivons à saint Patern, terme de notre étape annuelle du Tro Breiz, il est encore bien long, le chemin qu’il reste à parcourir à notre humanité pour découvrir le visage du vrai Dieu. Mais voilà qu’en ce jour, nous entendons une bonne nouvelle : l’évangile nous montre Notre Seigneur qui marche sur les eaux. Si la mer déchaînée est le symbole des puissances du mal, Jésus marchant sur les eaux nous montre que le mal n’a pas de prise sur Lui. Avant même que nous l’appelions, Il avance vers les siens. Son empressement à vouloir nous sauver montre combien Il nous aime. Il est l’Emmanuel ! c’est-à-dire « Dieu avec nous ». Il nous assure de Sa présence « tous les jours jusqu’à la consommation des siècles ». Il nous invite à la foi ! à la foi en sa Victoire totale et définitive sur le mal ! Demandons-lui pour nous-mêmes et pour tous la grâce de la conversion, persuadés que la cause de l’évangile est la cause de l’humanité. Demandons-lui la grâce de pouvoir dire, avec les apôtres et comme eux : « Vraiment, Tu es le Fils de Dieu ! » Amen."

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