D’Alexandre Simonnot :
C’est avec une vive émotion et une profonde tristesse que j’ai appris le rappel à Dieu de notre grand Maître Jean GUILLOU dans sa 89èmeannée.
Je dis notre grand Maître car j’ai eu l’immense privilège autrefois de le rencontrer très souvent à la tribune de Saint-Eustache, à l’époque merveilleuse où mon propre Maître Jean-Paul IMBERT était son suppléant de 1971 à 1993.
Mon plus beau et émouvant souvenir de jeune organiste restera cette soirée magique où j’ai fait la connaissance de Jean GUILLOU. Ce soir-là nous sommes montés le voir Jean-Paul IMBERT et moi à sa tribune, et il m’a fait l’honneur, alors que je n’avais que 13 ans, de jouer sur ce fabuleux instrument de Saint-Eustache. Jean-Paul IMBERT me tournant les pages et Jean GUILLOU me tirant les jeux sera pour moi un souvenir impérissable.
Disciple du Maître Marcel DUPRE, Jean GUILLOU était le dernier survivant de toute une génération d’organistes disparus récemment, comme Michel CHAPUIS, Suzanne CHAISEMARTIN, André ISOIR, Marie-Claire ALAIN et tant d’autres …
Organiste, pianiste, compositeur, écrivain, professeur, concepteur d’orgues, Jean GUILLOU était aussi très connu pour ses improvisations extraordinaires. Sa virtuosité était époustouflante, il était le PAGANINI de l’orgue. Le regarder jouer était un spectacle aussi beau à voir qu’à entendre. Sa technique était parfaite, très sûre et très précise. Il pensait chacune des notes qu’il jouait. Il détestait la médiocrité, et recherchait toujours, par son travail acharné, la perfection. Il était un Maître de la registration qui fait que sur chaque orgue où il se produisait, il en faisait entendre toutes les capacités sonores…
L’une de ses plus belles réalisations restera incontestablement l’orgue de l’Alpe-d’Huez, dont Jean-Paul IMBERT est le titulaire et dont le buffet en forme de main est connu dans le monde entier
L’argent et les honneurs n’intéressaient absolument pas Jean GUILLOU. C’est ainsi qu’en 2010 il refusa la Légion d’Honneur car il estimait, à juste titre, que c’était de l’hypocrisie et que l’Etat ferait bien mieux de s’occuper de ces innombrables orgues françaises, dont il est le propriétaire, et qui sont dans un état lamentable …
On peut le dire sans aucune exagération : Jean GUILLOU était un génie.
Il avait reçu cette grâce du Bon Dieu d’être un musicien hors du commun, un virtuose comme il y en a peu. Un journaliste du Figaro avait parfaitement décrit Jean GUILLOU en écrivant qu’il « transcendait la tradition sans jamais lui être infidèle »
Evidemment il avait, comme nous tous, ses défauts, des comportements qui pouvaient être ressentis comme cruels par ses plus proches amis et fidèles. Sa volonté de vouloir sortir l’orgue des églises et de vouloir séparer la musique de la religion était très triste.
L’orgue est au service de la Liturgie et donc au service de Dieu. Uniquement au service de Dieu. C’est ce qui est gravé dans le magnifique pupitre en bois de la console de Saint-Eustache : SOLI DEO GLORIA, pour l’unique Gloire de Dieu. Là où il est maintenant, Jean GUILLOU le sait.
Qu’il repose en paix.
F. JACQUEL
Disparition d’un des derniers Géants de la musique religieuse du XXème siècle.
Que Dieu et ses Anges l’accueillent au Paradis aux côtés de ses illustres prédécesseurs.