Partager cet article

France : Politique en France

Ils y pensent tous les matins

Ils y pensent tous les matins

Après Libération, c’est BFM qui se pose la question de l’héritier légitime du trône de France. A croire qu’Emmanuel Macron a perdu toute légitimité, et que nos journalistes ont perdu leur foi en la république…

Pour certains fervents défenseurs de la monarchie, la France a toujours un roi. Même deux. Alors que depuis 1870, le pays est une République et n’a plus été dirigé par un roi ou un empereur, deux camps se livrent bataille. Et les deux revendiquent la couronne.

Il y a d’abord le camp légitimiste avec Louis-Alphonse de Bourbon, qui porte le titre de duc d’Anjou et surnommé par ses admirateurs Louis XX. En appliquant une lecture stricte de la loi salique -qui fixe l’ordre de succession par primogéniture mâle- il serait roi de France. Car si l’on regarde de plus près l’arbre généalogique de la famille royale, il est le descendant direct de Louis XIV, fils aîné de Louis XIII. Louis-Alphonse de Bourbon incarne la branche espagnole des Bourbons: banquier de profession, il vit en Espagne. Carambolage de l’histoire: s’il est l’arrière-petit-fils du roi d’Espagne Alphonse XIII, il est aussi celui de Franco. Car son père s’était marié avec la fille unique du Caudillo. “Plus jeune, sa ressemblance avec Franco était frappante”, remarque pour BFMTV.com Éric Mension-Rigau, professeur d’histoire à l’université Paris-Sorbonne et spécialiste de l’aristocratie. Cousin du roi actuel Felipe VI, il pourrait même avoir des prétentions de l’autre côté des Pyrénées. Car son grand-père a dû renoncer au trône, cédant ainsi sa place à son frère cadet, dont le fils Juan Carlos a été choisi par Franco pour porter la couronne. “Son grand-père, en plus d’être devenu sourd-muet à la suite d’une opération, n’a pas fait un beau mariage dans une Espagne à l’époque très regardante”, ajoute pour BFMTV.com Philippe Delorme, historien et spécialiste des dynasties royales. Pourtant, Louis-Alphonse de Bourbon n’a aucune légitimité à revendiquer le trône de France. En 1713, son aïeul le roi d’Espagne Philippe V -qui n’est autre que le petit-fils de Louis XIV- signe le traité d’Utrecht et renonce à ses droits sur la couronne de France. Ce qui donne naissance à la dynastie des Bourbons d’Espagne. Un argument de taille pour ses adversaires.

Ces derniers lui préfèrent Jean d’Orléans, qui porte le titre honorifique de comte de Paris. Son ancêtre n’est autre que le dernier occupant du trône, Louis-Philippe 1er, lors de la monarchie de juillet entre 1830 et 1848. S’il est bien lui aussi un descendant de Louis XIII, il s’inscrit en revanche dans la branche du frère cadet de Louis XIV, et ne pourrait donc, selon ses opposants, prétendre à la couronne en vertu de la loi salique. Jean d’Orléans est le fils d’Henri, mort le 21 janvier dernier, symboliquement le jour anniversaire de la décapitation de Louis XVI lors de la Révolution. Décapitation votée en 1792 par le cousin du roi, Louis-Philippe d’Orléans -ancêtre de Jean d’Orléans- devenu Philippe Égalité à la Révolution. Une trahison que certains royalistes n’oublient pas. “Pour la famille d’Orléans, il y a une grosse tache, c’est le régicide”, poursuit Éric Mension-Rigau, auteur de Enquête sur la noblesse. La permanence aristocratique. Mais pour Philippe Delorme, il y a prescription: “Jean d’Orléans n’est pas considéré comme responsable des fautes de ses ancêtres. C’est effacé depuis longtemps. Même à la Restauration, les rois ont considéré Louis-Philippe d’Orléans comme le premier prince de sang.”

Un schisme avant tout politique. Car jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, un consensus se dessinait autour d’Henri d’Orléans. “Mais la haine de certains royalistes qui lui reprochaient de ne pas être pétainiste, de ne pas soutenir l’OAS ou l’Algérie française et l’ont ensuite désavoué pour son gaullisme les a poussés à se trouver un nouveau champion dans la branche des Bourbons”, précise Philippe Delorme, auteur du Dictionnaire insolite des dynasties du monde. Ce que confirme Éric Mension-Rigau. “Henri d’Orléans était un homme de gauche, il a soutenu François Mitterrand. Il incarnait une vision moderne de la monarchie. La branche Bourbon s’est alors imposée en jouant la carte de la tradition, catholique et bien à droite.”

Pourtant, Jean d’Orléans et Louis-Alphonse de Bourbon font tous deux partie de la grande famille des Capétiens, “sans doute l’une des plus vieilles au monde” qui ont régné plus de 800 ans sur la France, pointe Philippe Delorme, pour qui les deux hommes représentent “l’héritage historique et la mémoire de la France”.

Partager cet article

6 commentaires

  1. “Après Libération, c’est BFM qui se pose la question de l’héritier légitime du trône de France.”

    Enfin, n’y-a-t-il pas assez de rois et de reines inutiles et couteux dans notre vieille Europe ?

    Qu’ils arrêtent donc de se poser la question : L’héritier légitime, c’est moi !

  2. Oui Dieu premier servi et le roi est son lieutenant sur la Terre. Depuis 1500 ans, il y a eu des changements dynastiques (mérovingiens, carolingiens et capétiens). Le temps venu et choisi par Dieu, pourquoi ne pas envisager une nouvelle dynastie bâtie sur les valeurs chrétiennes, la loyauté, le courage?
    Vive le Roy.

  3. Une question qui mérite d’être posée si c’est dans une optique clairement politique de souveraineté nationale retrouvée. Si c’est pour raisonner à partir de sentiments de nostalgie, ou pire, de ressentiments vis à vis d’un passé révolu, alors cette question est hors sujet et sans intérêt.
    Il est temps de dire une bonne fois pour toute qu’en l’état actuel des choses, les pires ennemis de la cause royale en France sont les royalistes eux mêmes, du moins quand ils sont encore dans une approche de défense intransigeante et caricaturale de tel ou tel prétendant. La question n’est pas là, ou plutôt n’est plus de cet ordre, dans la mesure où les liens avec la monarchie traditionnelle, mais aussi avec les brèves expériences des monarchies constitutionnelles ont malheureusement été rompus. Il appartient aux royalistes les plus caricaturaux de repenser leur approche dans un cadre politique réaliste, et non sur une base nostalgique ou de sentiments dynastiques aujourd’hui devenus sans objet. En cela, commencer par défendre l’esprit de la Ve République, et militer pour le renforcement de sa logique monarchique au détriment de la ploutocratie parlementaire qui ne fait que trahir ce qu’elle est censé représenter peut déjà constituer un début. Une monarchie sans roi dans un premier temps serait déjà mieux que rien ; car pour réacclimater le régime monarchique en France, cela ne pourra se faire que par étapes… Pour le retour d’une dynastie, cela dépendra essentiellement des opportunités politiques qui se présenteront, de la faillite complète de classe politique ou pas, du charisme et de la volonté de tel ou tel prétendant à s’engager clairement dans une démarche politique ou pas, et enfin, de la volonté d’un grand nombre de Français et de décideurs à remettre cette question dans le débat public ou pas… Cela fait beaucoup d’obstacles à franchir, mais si cette question n’est pas repensée intégralement de façon intelligente, politique et réaliste, alors la monarchie en France fera irrémédiablement partie des causes perdues…

  4. Le père de Luis Alfonso ne s’est pas marié avec la fille de Franco mais avec la petite fille du Caudillo. La fille unique du Generalissimo s’est marié avec le Comte de VIllaverde et a eu 7 enfants dont la mère de Luis Alfonso.

  5. Une monarchie sans roi, c’est un cadre institutionnel dans l’attente et la préparation d’une restauration effective : c’est l’esprit de la IIIe République (le septennat présidentiel) et de Ve République (élection du président au suff. univ.) à leurs débuts ; c’est la Hongrie de l’amiral Horthy ou l’Espagne de Franco (l’un et l’autre faisant office de régent)… Après, les circonstances permettent ou pas la restauration ; en France ça a échoué, autant en 1873, que la possibilité qu’avait entrouverte De Gaulle (oui, mais le comte de Paris bla, bla, on s’en fout, de toute façon ça ne s’est pas fait !). Sauf à baigner dans une bulle catholico-mystique providentialiste en déconnexion totale avec la réalité politique, l’option réaliste est de contribuer à créer pas à pas les conditions politiques permettant éventuellement de parvenir à cet objectif, en sachant bien sûr que comme toujours en politique la situation idéale ne sera jamais atteinte. Une société, comme une famille, repose sur du compromis, et ceux qui le refusent en sont les premiers perdants… S’imaginer que le roi reviendra comme ça par l’opération du Saint d’esprit est au mieux de la naïveté pure, au pire un déni complet de la réalité de la société française d’aujourd’hui. La royauté est un outil politique d’incarnation et d’exercice de la souveraineté, que je pense le mieux adapté à la France ; mais ce n’est pas le seul possible, et en dehors de ce cadre là, la monarchie n’a aucun intérêt. Le décor de théâtre sans la souveraineté comme chez nos voisins européens, ça ne sert à rien. Autant rester en république.

  6. A mon avis ils cherchent plutôt à réveiller les divisions au sein des monarchistes.

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services