De Massimo Introvigne (traduit par Benoît-et-moi):
"La Cour européenne des Droits de l'Homme à Strasbourg – qui ne fait pas partie de l'Union européenne, mais d'une institution différente, plus ample, le Conseil de l'Europe, qui comprend également des pays géographiquement européens mais qui ne sont pas dans l'Union – a rendu public les motivations d'une sentence concernant l'Eglise orthodoxe, mais qui est potentiellement très dangereuse pour la liberté religieuse.
Dans son arrêt Sindicatul Pastorul cel Bun c. Roumanie, publié le 31 janvier dernier, la Cour […] a pris en considération le cas d'un syndicat de prêtres orthodoxes en Roumanie, que les autorités roumaines ont refusé de reconnaître, pour trois raisons.
La première est que dans le droit du travail roumains, les dirigeants, en particulier ceux de la fonction publique, ne sont pas autorisés à former des syndicats, et les prêtres orthodoxes sont assimilés à cette catégorie.
La seconde est que, dans une certaine mesure, le système civil de Roumanie post-communiste reconnaît l'ordre canonique de l'Église orthodoxe, lequel exclut la possibilité pour les prêtres de s'organiser en syndicats.
La troisième est que le principe de liberté religieuse doit donner la priorité à la liberté de l'Eglise orthodoxe de s'organiser comme elle l'entend en ce qui concerne le principe – important, mais hiérarchiquement inférieur à la liberté de religion – de a liberté d'association.Les prêtres syndicalistes roumains ont porté l'affaire devant la Cour de Strasbourg, qui leur a donné raison. […] la Cour précise également que «le statut du Syndicat [de prêtres] ne contient rien qui soit contraire à la foi de l'Église [orthodoxe]». Une affirmation de ce type présuppose que la Cour a compétence pour connaître ce qui est ou n'est pas contraire à la foi du Patriarcat de Roumanie, ce qui est manifestement absurde.
Mais c'est sur le point de la liberté religieuse que l'arrêt suscite une alarme particulière. Les juges de Strasbourg affirment que les prêtres orthodoxes roumains reçoivent un salaire du Patriarcat: donc, sont des employés. Et «la relation fondée sur un contrat de travail ne peut pas être "cléricalisée" au point d'échapper aux règles normales du droit civil». En réalité, c'est le contraire qui est vrai. Le sacerdoce n'est pas un simple travail comme un autre. Ceux qui choisissent de devenir prêtres savent bien que ce choix impose des renoncements, y compris celui d'interagir avec son "employeur" – l'Église – selon les paramètres habituels du droit qui s'applique à ceux qui travaillent dans un bureau ou une usine.
Comme l'a observé Grégor Puppinck, directeur de l'European Centre for Law and Justice, un centre spécialisé dans la protection de la liberté religieuse, […] [i]l s'agit […] d'un pas en arrière par rapport à l'arrêt d'appel dans l'affaire du crucifix en Italie, où il a été reconnu qu'il n'existe pas un droit unique européen en matière de religion et que la Cour doit reconnaître les spécificités nationales, en particulier dans les cas où une religion – le catholicisme en Italie, mais aussi l'orthodoxie en Roumanie – apporte une contribution particulière à l'identité nationale, qui ne peut manquer de trouver une reconnaissance juridique particulière."
P G
A cette énième tentative de rétablissement d’une forme de Constitution Civile du Clergé, on mesure le degré de totalitarisme qui existe dans l’eurofédéralisme.
c
C’est une affaire qui dure depuis 4 ans et qui est je crois plus complexe que cela compte tenu de l’organisation de l’église orthodoxe elle-même au sein de l’Etat Roumain, une organisation qui reste encore trop rattachée à César et prête donc plus le flanc à cette lamentable histoire où tout n’est pas blanc d’un côté et noir de l’autre, et où en tout logique puisque la CEDH a été saisie, elle a donné son avis sur quelque chose qui n’est pas vraiment de nature ecclésiale.
Ce qui est très grave dans l’affaire c’est plus il me semble la démarche des popes que celle de la Cour. Ils se sont montrés dans le monde et de ce monde. Même si c’est peut être explicable notamment pour des raisons financières compte tenu que beaucoup sont chargés de famille et que cela rend leur situation matériel encore plus précaire.
C’est un peu comme le cas de militaires français par exemple qui se seraient constitués en syndicat et auxquels la cour européenne aurait donné raison. Ces militaires auraient, en revendiquant un syndicat, franchi une ligne entre leur condition très particulière et à part de citoyens, une ligne que certains considéreraient comme une faute morale eu égard à leur condition et vocation de soldat, même si les lois de ce monde autorisent le syndicalisme.