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Culture de mort : Euthanasie

Introduire l’euthanasie dans un système de soin encore si insuffisamment formé à la culture palliative serait une défaite collective

Introduire l’euthanasie dans un système de soin encore si insuffisamment formé à la culture palliative serait une défaite collective

Explication de vote du député LR Patrick Hetzel à la tribune de l’Assemblée :

Il est des sujets devant lesquels toute querelle politique s’efface, tant ils engagent notre conscience collective, tant ils touchent au cœur de notre humanité. Celui de la fin de vie est de ceux-là. Il exige non pas des réponses rapides, mais une réflexion profonde, éclairée par l’expérience, la compassion, et le respect de la dignité humaine.

Je tiens ici à défendre avec force les soins palliatifs comme une voie profondément humaine et résolument moderne, portée depuis des décennies par des équipes soignantes d’une qualité remarquable. Les soins palliatifs ne sont pas un refus d’agir. Ils sont un choix exigeant : celui de soigner jusqu’au bout, d’écouter jusqu’au bout, d’aimer jusqu’au bout. Ils ne proposent pas la mort, mais un accompagnement digne dans la vie qui reste. Ils ne donnent pas la mort, mais ils donnent tout ce qu’il est possible de donner à celles et ceux qui s’en approchent : le soulagement, la paix, la présence. En 2005, la loi Leonetti a consacré ce choix de société : refuser l’obstination déraisonnable, garantir le droit au soulagement de la douleur, et affirmer le principe fondamental du respect de la personne jusqu’au terme naturel de sa vie.

Ces repères historiques ne sont pas des vestiges. Ils sont les fondations solides sur lesquelles nous devons nous appuyer. Ils nous rappellent qu’à chaque étape, notre société a su faire le choix de l’humanité, de la prudence et de l’attention aux plus vulnérables. Aujourd’hui, il serait illusoire — et dangereux — de prétendre débattre d’une légalisation de l’euthanasie sans avoir d’abord pleinement déployé l’accès aux soins palliatifs, qui restent encore inégalement répartis sur notre territoire et 19 départements qui sont toujours dépourvus d’unités de soins palliatifs.

Depuis des années, des médecins, des infirmiers, des aides-soignants, des psychologues, des bénévoles portent cette mission avec un esprit de soin admirable. Ils savent ce que signifie accompagner une personne jusqu’à son dernier souffle, sans la hâter, sans l’abandonner. Ce sont eux, ces artisans du quotidien, qui incarnent la grandeur silencieuse de notre système de santé.

Trop souvent méconnus, les soins palliatifs ne sont pourtant pas synonymes de renoncement. Les soins palliatifs ne guérissent pas, mais ils soignent. Ils soignent la douleur, l’angoisse, la solitude. Ils donnent du sens aux derniers instants, ils permettent de dire adieu, de se réconcilier, de choisir comment partir. Ils affirment, avec force et douceur, que chaque vie mérite d’être respectée jusqu’à son terme, dans toutes ses dimensions — physique, psychologique, sociale et spirituelle.

Dans un monde qui a parfois peur de la fin de la vie, les soins palliatifs osent l’affronter avec une infinie délicatesse. Ils nous parlent de ce que nous avons de plus précieux : notre capacité à prendre soin, à accompagner, à aimer — jusqu’au dernier souffle.

Dans ce premier texte, il y a des dispositifs innovants intéressants mais je crains que cela ne va pas changer la donne de manière structurelle.

En effet, comment pourrions-nous prétendre ouvrir un débat sincère sur la fin de vie sans avoir d’abord pleinement déployé l’offre de soins palliatifs dans notre pays ? Aujourd’hui encore, trop de patients y ont un accès limité, inégal, parfois inexistant. C’est là que nous devons concentrer nos efforts. C’est là que notre responsabilité d’élus se situe : donner à chaque citoyen la garantie qu’il ne sera jamais seul, jamais dans la souffrance, jamais abandonné.

Je le dis avec gravité : introduire l’euthanasie dans un système de soin encore si insuffisamment formé à la culture palliative serait non seulement une faute morale, mais une défaite collective. Car les soins palliatifs ne sont pas une solution de repli, ils sont une promesse : celle de l’humanité partagée jusqu’au bout, dans le respect de la vie et de la personne.

Nous avons collectivement un combat à mener afin que l’esprit de soin l’emporte sur toute autre considération. Nous ne pouvons pas nous résoudre à ce que des concitoyens demandent un suicide assisté parce qu’ils n’auraient pas eu accès aux soins palliatifs. Faut-il rappeler qu’actuellement en France 500 personnes meurent chaque jour sans avoir eu accès aux soins palliatifs dont ils auraient pourtant eu besoin ?

Et posons-nous aussi une autre question fondamentale. Le soutien aux soins palliatifs qui nous rassemble, je pense unanimement ici, ne doit pas devenir la caution pour légitimer la légalisation d’une mort provoquée. Il doit y avoir véritablement des moyens et une volonté pour développer la culture palliative encore et partout, cela ne doit pas être une annonce de plus juste pour se donner bonne conscience.

Mes chers collègues, n’imaginons surtout pas que cette loi offre une liberté de choix. Si c’est son but, alors c’est un artifice. J’ai très peur que dans un an, même dans 5 ans, l’égalité d’accès aux soins palliatifs que nous prônons ne sera toujours pas garantie malgré le droit opposable. Peut-on se permettre de se mentir aujourd’hui pour se donner bonne conscience ? Je ne le crois pas.

Comme le dit Paul Ricoeur : « Si l’éthique de détresse est confrontée à des situations où le choix n’est pas entre le bien et le mal mais entre le mal et le pire, alors le législateur ne saurait donner sa caution ».

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, la véritable grandeur d’une société ne se mesure pas à sa capacité à abréger la vie, mais à son engagement à l’accompagner avec humanité, courage et tendresse, jusque dans ses derniers instants.

C’est cette grandeur-là que je vous invite à défendre en votant en faveur des soins palliatifs !

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1 commentaire

  1. A ce sujet , il est temps de poser les questions pratiques du combat .A quand la manifestation nationale contre cette loi ?

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